Référendum sur l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie : quels enjeux pour la France ?
Les ressources naturelles de la Nouvelle-Calédonie, notamment le nickel, en font un territoire important pour la France. Et à l'heure de la rivalité grandissante entre Pékin et Washington sa position dans le pacifique en fait un territoire clé.
Relevant de la souveraineté française depuis 1853, la Nouvelle-Calédonie, qui dispose d’un statut d’autonomie très avancé, va se prononcer sur son indépendance lors d'un référendum le 4 novembre. Si les sondages donnent le «non» assez largement en tête, une surprise n'est jamais à exclure. Quelles seraient les conséquences pour l'Hexagone d'une indépendance de cet ensemble d'îles et d'archipels ?
Ressources naturelles
Si la Nouvelle-Calédonie devait prononcer son indépendance et devenir la «Kanaky-Nouvelle-Calédonie», la France perdrait immédiatement son statut d'acteur majeur sur le marché du nickel. L'archipel dispose en effet d'importantes réserves de ce métal dont il est le 6e producteur au monde, avec plus de 200 000 tonnes par an.
La zone économique exclusive (ZEE) de Paris, c'est-à-dire l'espace maritime sur lequel un Etat côtier exerce des droits souverains en matière d'exploration et d'usage des ressources, se verrait en outre considérablement réduite. La Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française représentent la moitié de cette ZEE, donnant à la France le deuxième espace maritime mondial derrière les Etats-Unis. Or, si à l'heure actuelle Paris n’a pas commencé à exploiter les réserves qui s'y trouvent, celles-ci s'avèrent hautement stratégiques pour le futur. Elles regorgent notamment de terres rares, ces métaux aux propriétés exceptionnelles qui sont utilisés dans la fabrication de produits de haute technologie.
Qui plus est, l'Australie et la Nouvelle-Zélande voisines ont confirmé dans les eaux de leurs ZEE l’existence de zones de production pétrolières. Ce qui signifie que la Nouvelle-Calédonie disposerait, selon toute vraisemblance, elle aussi de gisements d’hydrocarbures (pétrole et gaz), pour l'heure inexploités.
Territoire stratégique
Située en plein océan Pacifique, la Nouvelle-Calédonie est un atout stratégique important pour la France, puisqu'elle lui permet d'avoir une présence de ses forces armées dans la région. S'il a choisi de ne pas intervenir directement dans le débat sur l'indépendance, Emmanuel Macron n'en fait pas mystère. «Nos forces armées sont présentes dans la zone indopacifique, qui est clé pour la stabilité mondiale», avait-il souligné dans un discours à Sydney début mai. La Nouvelle-Calédonie est en effet un territoire idéalement placé pour observer au plus près la rivalité grandissante dans la région entre la Chine et les Etats-Unis.
«L'indopacifique est au cœur du projet français pour toutes ces raisons, parce que nous y sommes et parce que cette région du globe est en train de vivre un basculement profond», avait d'ailleurs ajouté le chef d'Etat quelques jours plus tard à Nouméa. Or selon lui, la Chine étant en train de «construire son hégémonie» dans cette région du globe, il est essentiel de s'organiser, sans quoi, «ce sera une hégémonie qui réduira nos libertés, nos opportunités et que nous subirons». Une déclaration qui laisse peu de doutes quant à l'importance que revêt la Nouvelle-Calédonie aux yeux de l'Elysée.
La classe politique contre l'indépendance
Alors, si Emmanuel Macron ne s'est pas prononcé sur le référendum, la chose semble entendue. «Sans la Nouvelle-Calédonie, décidément, la France ne serait pas la même», avait-il d'ailleurs déclaré lors de sa visite à Nouméa, en mai dernier. Un point de vue qui, une fois n'est pas coutume, rejoint celui de ses adversaires politiques. Critiquant la méthode employée par le locataire de l'Elysée, la présidente du Rassemblement national Marine Le Pen l'a rejoint sur le fond. «Non, Monsieur le Président, la Nouvelle-Calédonie n’est pas une "possession" de la France. Elle est une part de la France dont la Constitution vous ordonne de défendre l’intégrité du territoire», avait-elle écrit dans un message sur Twitter le 6 mai.
Non, Monsieur le Président, la Nouvelle-Calédonie n’est pas une « possession » de la France. Elle est une part de la France dont la Constitution vous ordonne de défendre l’intégrité du territoire. MLP https://t.co/0W49l5HS4s
— Marine Le Pen (@MLP_officiel) 6 mai 2018
Le président des Républicains Laurent Wauquiez qui avait visité «Le Caillou» en septembre dernier, l'avait qualifié «d'atout extraordinaire» pour la France. Et il avait, clairement pris position sur le scrutin : «Ma parole est claire, c’est celle d’une Calédonie française, d’une Calédonie qui choisit sa voie, son chemin, son autonomie, mais au cœur de la France.»
De l'autre côté de l'échiquier politique, le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon a adopté une position plus mesurée. «Indépendants ou Français, notre affection leur est acquise», avait-il déclaré refusant de se prononcer sur l'indépendance le 28 septembre sur France 3. Mais le député des Bouches-du-Rhône avait néanmoins expliqué : «Si je faisais parler mon cœur, je dirais "restons ensemble".»
🔴 @JLMelenchon (invité de @France3tv@letellier_ftv ) refuse de se prononcer pour le oui ou le non à l'indépendance en #NouvelleCaledonie au #Referendumnc2018 du 4/11
— La1ere.fr (@la1ere) 30 septembre 2018
"Je m'en remets aux Calédoniens", mais il ajoute : "Si je faisais parler mon coeur, je dirais, restons ensemble" pic.twitter.com/RFg8WOu3Pu
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