Européennes 2019 : la gauche fracturée entre eurosceptiques et pro-UE

Européennes 2019 : la gauche fracturée entre eurosceptiques et pro-UE© Philippe Wojazer Source: Reuters
La gauche divisée sur la question de l'UE
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Un proche de Benoît Hamon reproche à Jean-Luc Mélenchon son «nationalisme de gauche», l'Insoumis assume le protectionnisme, quitte à déroger aux traités européens. La gauche se scinde ainsi entre européistes et eurocritiques.

Les courants et partis de plus ou moins grande taille, à gauche, sont toujours aussi nombreux. Certains craignent une division qui favoriserait un nouveau succès électoral d'Emmanuel Macron et de la majorité présidentielle aux élections européennes de mai 2019. Dans cette perspective, Jean-Luc Mélenchon, leader de La France insoumise (LFI), a tendu la main le 30 juin à Benoît Hamon et son mouvement Génération.s pour tenter une union des forces.

Une initiative qui a fait des vagues. Pascal Cherki, proche de Benoît Hamon, a répondu sèchement à «l'offre» de Jean-Luc Mélenchon : «On ne répond pas au nationalisme de droite par un nationalisme de gauche.» Autre proche de Benoît Hamon, Guillaume Balas a ajouté : «Sur l’Europe, les différences ne sont pas accessoires.» Et Benoît Hamon de conclure le 6 juillet sur BFMTV : «Sur la question européenne, ce n'est pas ma priorité de dialoguer avec Jean-Luc Mélenchon [en raison] de ses orientations sur le fond.»

Les Hamonistes, les écologistes et les socialistes, des «Union-européistes» assumés

En effet, Benoît Hamon a, à plusieurs reprises, souhaité ne pas remettre en cause l'intégration européenne. Un projet politique qui – on le verra – est éloigné du projet de Jean-Luc Mélenchon. Par exemple, le 14 janvier, Benoît Hamon avait tweeté : «Nous pouvons, à traité constant, changer l'Europe. Sans accepter l'UE telle quelle est, mais sans la rejeter par principe.» Lors de la campagne présidentielle de 2017, en tant que candidat du Parti socialiste (PS), Benoît Hamon n'avait jamais caché son ambition de créer une grande «alliance» avec les «écologistes» et les «progressistes».

Dans la même inspiration, le parti Europe-Ecologie-Les Verts (EELV), probable futur allié de Benoît Hamon pour les européennes de 2019, a déjà avancé son pion, en désignant le soir du 11 juillet sa tête de liste en cas de non-accord. EELV a toujours défendu une ligne fédéraliste, à l'image de leur ancien leader au Parlement européen Daniel Cohn-Bendit. «Concernant l'Europe, on ne lâchera pas l'affaire : nous n'avons pas à faire un choix entre un libéralisme débridé ou le repli sur les nationalismes... Les écologistes peuvent constituer un pivot vers un nouvel imaginaire politique», a notamment déclaré le 17 janvier le secrétaire national d'EELV, David Cormand, devant la presse.

Par ailleurs, le PS, comme Benoît Hamon et les écologistes, refusent de diaboliser les institutions européennes. Lors du congrès du parti, le 8 avril 2018, son premier secrétaire, Olivier Faure, déclarait : «Nous ne sommes pas seuls, nous sommes les eurosocialistes, nous sommes en mouvement et nous allons ensemble construire un autre avenir pour l’Europe.»

Le PS défend moins ouvertement l'Europe fédérale, mais s'inscrit parfaitement dans l'UE, assumant la construction européenne. «L’Europe porte un modèle économique et social singulier, qui la distingue dans le monde, un modèle de valeurs et de droits», a de fait attesté Olivier Faure le 8 avril. Logique, les socialistes français ont voté à de nombreuses reprises avec la droite européenne (PPE) et les libéraux (ALDE) sur plusieurs projets au Parlement européen. En outre, les socialistes, comme le PPE et l'ALDE, ont soutenu la candidature du social-démocrate allemand Martin Schulz à la tête dudit Parlement en 2014. Parmi ses idées politiques, Martin Schulz s'était prononcé à plusieurs reprises pour une Europe fédérale avec l'idée de créer les «Etats-Unis d'Europe».

Emmanuel Maurel va-t-il faire exploser le PS sur le sujet des européennes ?

Le PS, très affaibli après la présidentielle et les législatives de 2017, jouera sa survie politique lors des élections européennes. Et Olivier Faure devra composer avec une possible nouvelle fronde, menée par Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Liennemann. Leur courant politique, baptisé «Nos causes communes», souhaite «fédérer la gauche républicaine dans toutes ses composantes, écologistes, anti-libérales». Emmanuel Maurel a précisé le 11 juin sur la chaîne Public Sénat que ce micro-courant visait à mettre «tout le monde d'accord à gauche pour les élections européennes». Une vaste affaire puisque le PS a, depuis 1983, accepté la rigueur économique, l'économie de marché et le quinquennat de François Hollande n'a, selon ses détracteurs de gauche, pas rompu avec le libéralisme.

Aussi, difficile pour Emmanuel Maurel d'attirer le Parti communiste français (PCF) sur cette ligne puisque ce dernier n'a jamais nié défendre l'industrie nucléaire (ce à quoi s'oppose Emmanuel Maurel).  Son université de rentrée en septembre se déroulera à Marseille où il est prévu d'inviter l'Insoumis Jean-Luc Mélenchon.

Jean-Luc Mélenchon veut-il reprendre le flambeau de la gauche souverainiste ?

Un coup politique qui a de quoi inquiéter le PS. Jean-Luc Mélenchon est effectivement la principale force politique à gauche actuellement, tant par la farouche opposition de La France insoumise à l'Assemblée nationale que par son score à la présidentielle (19,58% des voix au premier tour). Jean-Luc Mélenchon est d'ailleurs l'un des seuls à gauche qui, aujourd'hui, dénonce les institutions européennes. Il définit en outre une stratégie pour appliquer un programme défendant «une Europe laïque [et] une Europe où l'on protège les services publics». L'ex-candidat à la présidentielle a des allures de Jean-Pierre Chevènement dans le texte. Le  9 juillet sur BFMTV, le leader de la France insoumise a ainsi martelé : «Oui je crois à la France, je préfère une Europe à la française qu'une Europe à l'allemande !» Il défend ainsi une Europe qui ouvre la possibilité pour un Etat de créer des monopoles. «Ce que hait l'Europe», déplore-t-il en souhaitant promouvoir un monopole sur l'énergie comme l'électricité, sur les transports «avec la SNCF». «Dire cela ce n'est pas faire preuve d'un nationalisme étroit et étriqué», poursuit-il en fustigeant les propos des hamonistes à son égard. Pour cette mise en œuvre, Jean-Luc Mélenchon propose de revoir le cadre des traités qui ne peuvent pas permettre un «protectionnisme européen» sur les marchandises, ni «l'harmonisation du droit social», ni «une politique de relance des salaires».

Jean-Luc Mélenchon assure ainsi que son plan A sera d'abord de discuter avec les partenaires européens. Dans le cas, où les autres pays européens refuseraient cette politique, Jean-Luc Mélenchon affirme appliquer un plan B qui sera de «désobéir» aux traités et d'«augmenter les coopérations» avec les seuls pays qui accepteraient la mise en place de telles politiques dans leurs pays.

Néanmoins, dans tout ce jeu, Jean-Luc Mélenchon doit lui aussi faire face à une discorde dans son alliance politique. Son partenaire politique habituel, le PCF, a déjà placé l'adjoint au maire de Paris, Ian Brossat, comme tête de liste pour les élections européennes de 2019. Le PCF est-il sceptique sur la stratégie mélenchonienne ? Nul doute. Son poids électoral devrait, malgré tout, l'engager dans une alliance. Mais avec qui ? Les européistes ou les eurocritiques ?

Bastien Gouly

Lire aussi : Hamon appelle Mélenchon à abandonner sa «stratégie solitaire» tout en soulignant leurs différences

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