Avocats et magistrats se mobilisent dans toute la France contre la réforme de la justice

Avocats et magistrats se mobilisent dans toute la France contre la réforme de la justice© Patrick Kovarik
Avocats rassemblés à l'appel de divers syndicats contre le projet de réforme de la justice, devant le Tribunal de grande instance de Bobigny le 15 février 2018.
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Nicole Belloubet porte un projet de réforme de la justice qui n'emporte pas l'adhésion des juges et des avocats. Ils se mobilisent ce 15 février un peu partout en France. L’avocate syndicaliste Laurence Roques a répondu aux questions de RT France.

«Justice en colère», «Touche pas à mon tribunal»... Dans toute la France, avocats, greffiers et juges se rassemblent ce 15 février pour protester devant les sièges des tribunaux contre la réforme de la justice entreprise par la Garde des Sceaux Nicole Belloubet. Le projet, composé de cinq volets, vise à améliorer la rapidité et l'efficacité de la justice. Il est critiqué par la présidente du syndicat des avocats de France, Laurence Roques : «Cette réforme ne vise qu’à éloigner les justiciables de leur juge.» Selon elle, elle découragera les citoyens de mener des poursuites, ce qui diminuerait de fait le nombre de procédures, mais par défaut. 

Au programme de cette réforme : «l’amélioration et la simplification» des procédures pénales et civiles, la «transformation numérique», la réorganisation des tribunaux et la réforme de la durée et du type de peines. L'élaboration de la réforme est présentée comme «collaborative» par la ministre de la Justice, notament parce qu'une consultation a été lancée mais les syndicalistes estiment avoir été dupés. «C'est une consultation de façade, car les chantiers ont été annoncés en novembre alors que notre travail devait être rendu en décembre : on ne peut pas tout créer en un mois. De plus, la Garde des Sceaux ne dévoile rien, elle ne mène aucune discussion de fond», estime Laurence Roques.

Une question de budget

«Pour Nicole Belloubet, l’essentiel est la modernisation ; mais, pour la mener à bien, il faut un budget... Or celui qu’elle propose est loin de répondre à nos besoins», déplore Laurence Roques. «Nous sommes très mal classés en matière de budget consacré à la justice par rapport aux autres pays de l'Union européenne», ajoute-t-elle. En effet, en 2014, la France se classait 14e sur les 28 Etats membres de l'Union européenne en matière de budget de la justice, avec 72 euros par habitant et par an en 2014. C'est beaucoup moins qu'en Allemagne (146 euros) ou qu’au Royaume-Uni (155 euros).

Pour la syndicaliste, la réforme, pour atteindre ses objectifs, nécessiterait de doubler le budget alloués aux magistrats. En 2017, le budget de la justice s'élève à 7 milliards (dont 732 millions seront directement affectés à l'administration pénitentiaire). Or, si Nicole Belloubet a annoncé une augmentation du budget de la justice de 3,9% en 2018, cette hausse reste presque symbolique selon Laurence Roques.

Quel que soit le critère retenu, la comparaison entre la situation de l'institution judiciaire française et celle de ses voisins de l'UE est sans appel : la France figure en fin de classement en 2016, tant lorsqu'il s'agit d'évaluer le nombre de magistrats ou d'avocats pour 100 000 habitants que lorsque l'on estime la durée d'une procédure, ou la rapidité de traitement des dossiers.

L'arrivée du numérique n'est pas si bienvenue

Nicole Belloubet mise en outre sur la «transformation numérique». Les procédures pénales seront dématérialisée, les justiciables pourront être convoqués par SMS… Là encore, la syndicaliste proteste : «On va rendre difficile l'accessibilité des gens à la justice à cause de la fracture numérique : les plus vulnérables n’auront pas accès aux tribunaux.»

Là encore, la dématérialisation de la justice s'impose comme un objectif prioritaire aux yeux du gouvernement compte tenu du retard de la France sur ses voisins de l'UE en la matière. Aujourd'hui, seul le suivi des dossiers peut être consulté en ligne, la plainte elle-même ne peut pas être déposée en ligne. Laurence Roques estime que la dématérialisation «ne marchera que si une alternative papier existe, et si un accompagnement au numérique est mis à disposition du public». Le projet du gouvernement ne semble pas inclure ce dernier point.

Parmi les autres chantiers ouverts par Nicole Belloubet, certains tribunaux verraient leurs compétences réduites à un seul type de contentieux. Là encore, la syndicaliste voit rouge : «Tout le monde se dirigera vers les grands pôles qui regroupent plusieurs compétences, comme lorsqu’une femme accouche, elle choisit d’aller dans un grand hôpital général avec toutes les spécialités plutôt que dans une petite maternité. Cela se fera au détriment des tribunaux, qui vont fermer faute d'affaires.»

Quant aux propositions sur l'«efficacité des peines», dont celle qui prévoit que certaines condamnations ne soient pas entièrement effectuées derrière les barreaux, les magistrats sont loin d'y être opposés sur le principe mais les modalités, faute d'avoir été précisées, n'offrent aucune garantie quant aux objectifs de cette mesure. Et là encore, le budget semble constituer le nœud du problème. «Sans argent ça ne sert à rien de songer à des peines alternatives», tranche Laurence Roques.  

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