Délation, vegans... quand la polémique s'invite sur le hashtag anti-harcèlement #balancetonporc
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Sous l’impulsion de la journaliste Sandra Muller, des milliers de femmes dénoncent sur Twitter le harcèlement sexuel qu'elles ont vécu avec #balancetonporc. Une initiative suscitant des réactions très variées, y compris chez les politiques.
Effarée par le scandale du producteur Harvey Weinstein, la journaliste Sandra Muller a lancé, quasiment sur le ton de l'humour, un appel sur Twitter pour que les femmes victimes de harcèlement, puissent sortir du silence, autour du hashtag #balancetonporc, sur Twitter. Elle a inauguré le mouvement le 13 octobre en racontant une histoire qui se serait produite avec un patron de chaîne libidineux.
" Tu as des gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit" Eric Brion ex patron de Équidia #balancetonporc
— Sandra Muller (@LettreAudio) 13 octobre 2017
L'initiative a provoqué maintes réactions, des plus diverses.
Un hashtag anti-vegan pour certains, un appel à la délation pour d'autres
Pour l'écrivain Aymeric Caron, ancien chroniqueur de l'émission On n'est pas couché, ce qui gène c'est... la partie animale du hashtag. En tant que vegan et opposant au spécisme (une idéologie consistant à considérer la vie de l'être humain comme plus importante que celles des animaux), il a utilisé le terme de «dommage» à propos du nom de l'itiniative, ajoutant qu'il aurait préféré le hashtag #balancetonharceleur ou encore... #balancetonweinstein.
Dommage d'avoir choisi un hashtag spéciste. Il aurait été préférable de choisir #balancetonharceleur ou #balancetonweinsteinhttps://t.co/qzt8ulUkSH
— AymericCaronOfficiel (@CaronAymericoff) 15 octobre 2017
Une autre personnalité qui s'est exprimée sur le sujet est le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, qui a affirmé qu'il ne dénoncerait pas, par principe, un harceleur s'il en connaissait un.
-Connaissez-vs un politique #harceleur sexuel ?
— Emmanuel Foulon (@efoulon1) 16 octobre 2017
Bruno Le Maire:NON
-Le dénonceriez-vs ?
Lemaire:NON#Balancetonporcpic.twitter.com/uE2G8FNJbS
Suite au tollé et à l'emballement médiatique en réaction à ses propos, le ministre a tweeté un communiqué d'excuses en vidéo, en avouant qu'il s'était mal exprimé, rappelant qu'il n'aimait pas la «dénonciation».
Je me suis exprimé ce matin sur le problème du harcèlement sexuel subi par les femmes en France et je me suis mal exprimé.
— Bruno Le Maire (@BrunoLeMaire) 16 octobre 2017
Je le regrette. pic.twitter.com/jI3JpAyKFh
Une balance reste une balance.
L’animateur d'Europe 1 Raphael Enthoven s’oppose quant à lui au principe de dénonciation qu’il assimile à de la délation. Pour lui, le «balance» ne passe pas.
Non. Les "porcs" ≠ problème. Porcs = l'ennemi à débusquer.
— Raphaël Enthoven (@Enthoven_R) 15 octobre 2017
Le problème, c'est qu'une balance reste une balance, qqes soient ses intentions https://t.co/enZdDXflTi
La secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa s'est interrogée sur la mobilisation en déclarant : «Twitter n'est pas un tribunal.»
Marlène Schiappa à propos de #balancetonporc : « Twitter n’est pas un tribunal, ça ne remplace pas un dépôt de plainte » pic.twitter.com/Ni9S0d3c1i
— CNEWS (@CNEWS) 16 octobre 2017
Sandra Muller répond aux critiques
Directrice de la rédaction du média professionnel La lettre de l’audiovisuel, la journaliste à la base de la mobilisation Sandra Muller n'imaginait pas ni le succès de la campagne Twitter, ni les polémiques qui naîtraient de son initiative. Elle s'est confiée à RT France.
«En réalité sur le fil Twitter, il y a très peu de noms», explique-t-elle, ajoutant que l'initiative était, au départ réservée aux journalistes avant de prendre une telle ampleur.
Sur les remarques faisant état de «délation», elle ne décolère pas : «Je trouve dénigrant le fait de parler de délation au sujet de #balancetonporc. On n’est plus dans une période de l'histoire. Et puis quand on est victime on fait quoi ? Il faut penser à tous les faits qui sont prescrits. [...] Cela sous-entend quoi de ne pas dénoncer ? On fait comment pour que les pervers s'arrêtent ?»
Ajoutant qu'elle dispose d'éléments de preuves pour appuyer sa dénonciation, elle insiste sur le fait que le #balancetonporc viendra au secours des femmes : «Ce n'est pas avec un tweet qui ne révèle pas de noms qu'on pourra condamner qui que ce soit. En revanche, ça peut aider des consœurs qui donnent des indices sur qui il faut se méfier dans le métier.»
En deux jours, 60 000 femmes avaient déjà témoigné. Toutefois peu de femmes, comme Sandra Muller, ont osé livrer les noms de leurs agresseurs présumés.
Parmi elles, l'écrivain Méryl Pinque a aussi relaté un incident qui impliquerait une personne de l’univers des médias, le journaliste Eric Brunet.
Le journaliste @ericbrunet m'a fait en 2006 des propositions indécentes. Une sordide histoire de bottes. #BalanceTonPorc#harcelement
— Méryl Pinque (@MerylPinque) 15 octobre 2017
Jean Lassale m'a mis une main aux fesses
Julia Castanier, la directrice de la communication du PCF n’a pas hésité à écrire sur un geste déplacé qu’aurait eu l'ancien candidat à la présidentielle fait Jean Lassalle.
J avais 25 ans et j étais attachée parlementaire. En allant vers l'hémicycle, @jeanlassalle m a mis une main aux fesses. #balancetonporc
— Julia Castanier (@JuliaCastanier) 15 octobre 2017
La journaliste Julia Molkhou a mis en cause un animateur producteur dont elle n’a pas souhaité révéler le nom.
Animateur-prod tele dont je refusais les avances "tu ne bosseras plus jamais petite pute! Plus jamais tu m'entends??!!!!" #balanceTonPorc
— Julia Molkhou (@JuliaMolkhou) 14 octobre 2017
La grande majorité des tweets évoquent des violences, gestes, menaces et commentaires déplacés et sexistes vécus par les femmes au quotidien.
#balancetonporc
— mathilde larrere (@LarrereMathilde) 15 octobre 2017
le collègue qui te dit que si t'as été cacique à l'agreg, il aurait aimé être dans le jury car tu as du bien sucer pour ça
20 ans, je travaillais pour SOS médecins et les locaux étaient dans une sté d'ambulance. Le gérant de la société est venu un après mdi, ma couché sur le lit et mis son sexe devant ma bouche. Il a pris peur quand je lui ais dit : "tu vas pas me violer quand même". #balancetonporc
— d'haussy (@dhaussynat) 16 octobre 2017
Certaines femmes dénonçant les agissements ont reçu des insultes en réponse.
Et on s'étonne que les femmes ne prennent pas la parole. Désespérant. #balancetonporcpic.twitter.com/HTqWw43oRu
— Maé' (@MissMaevaCam) 16 octobre 2017
Par le passé, on avait déjà pu retrouver ces dernières années d'autres initiatives de ce genre, comme les témoignages de harcèlement vécu dans la rue sur le facebook de Paye ta schnek, dans le cadre de l’Assemblée nationale, sur le blog Chair collaboratrice ou dans le milieu médical sur le blog de Paye ta blouse.
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