«Décisions spoliatrices» : les actionnaires salariés d'EDF menacent de porter plainte contre l'Etat
- Avec AFP
A la veille de l'annonce du plan du gouvernement pour renationaliser le groupe à 100%, les actionnaires salariés d'EDF entendent «mettre l'Etat devant ses responsabilités» après des décisions, qui selon eux, ont été nocives pour l'entreprise.
«L'association Energie en actions [...] annonce introduire une plainte pénale avec constitution de partie civile contre l'Etat en tant qu'actionnaire majoritaire d'EDF pour mise en difficulté de l'entreprise au mépris de l'intérêt social de celle-ci et des intérêts de ses actionnaires minoritaires, du fait de décisions inconsidérées et spoliatrices», explique ce 18 juillet dans un communiqué l'association.
Selon elle, «la gravité des dommages infligés à l’entreprise s’illustre dans la chute vertigineuse de la valeur de l’action dont le cours est passé de 32 euros lors de l’ouverture du capital au public fin 2005 à 7,4 euros au moment de la déclaration le 6 juillet 2022 par la Première ministre que le gouvernement souhaitait détenir 100 % du capital d’EDF», contre 84 % actuellement, soulignant également «l’augmentation non moins vertigineuse de l’endettement».
«La finalité, c'est de mettre l'Etat devant ses responsabilités. C'est lui qui est allé chercher les épargnants et les salariés, anciens salariés, et c'est lui qui a mis l'entreprise en difficulté et qui voudrait racheter à bas prix», a déclaré à l'AFP Hervé Chefdeville, secrétaire général de l'association Energie en actions.
Principal grief de l'association, «la vente, à prix inférieur aux coûts de production, aux concurrents d'au moins un quart de la production d'électricité nucléaire (100 TWh) d'EDF, selon le mécanisme dit de l'Arenh» (Accès régulé à l'électricité nucléaire historique), mis en place en 2010 pour éviter des poursuites de la Commission européenne, dans le cadre de la loi Nome, réformant le marché de l'électricité en France.
Contre un rachat à bas prix
Ce mécanisme permet la vente par EDF d'un quart de la production d'électricité de ses centrales nucléaires à ses concurrents, l'idée étant de faire profiter les nouveaux fournisseurs d'énergie des bas coûts de production du parc nucléaire français.
L'association pointe également la mise à l'arrêt «pour des raisons purement politiques» des deux réacteurs de la centrale de Fessenheim en Alsace.
«La chute des cours résulte pour une part très importante des décisions que l'Etat a prises dans l'intérêt général. Il ne s'agit pas de critiquer ces décisions-là, mais de constater que c'était incompatible avec la gouvernance et les règles d'une société privée, donc les actionnaires ont été victimes de décisions qui n'étaient pas conformes à leur intérêt», a commenté pour sa part Colette Neuville, présidente de l'Association de défense des actionnaires minoritaires, mandatée par certains dans ce dossier.
Elle souhaite que l'Etat rende aux actionnaires 32 euros par titre, soit le prix de l'action lors de l'entrée en Bourse.
«Aujourd'hui l'Etat doit rendre des comptes sur la gestion exercée en tant qu'actionnaire ultra-majoritaire de l'entreprise, gestion qui a pour conséquence de spolier gravement de très nombreux épargnants», conclut l'association, qui juge que l'Etat «traite EDF comme un simple outil de ses politiques jusqu'au point de la mettre en grande difficulté, en flagrante illégalité».
Le titre d'EDF a été suspendu le 13 juillet dernier à la Bourse de Paris, le temps de permettre à l'Etat de préciser, au plus tard le 19 juillet avant l'ouverture de la Bourse de Paris, les modalités de la renationalisation de l'énergéticien annoncée début juillet.