Economie

Fitch abaisse la perspective de la France de «stable» à «négative», mais maintient la note de «AA»

L'agence de notation américaine a revu à la baisse ses prévisions concernant la France. A l'instar de bien d'autres pays européens, les mesures annoncées par le gouvernement pour contrer la pandémie de Covid-19 ont largement creusé les déficits.

L’agence de notation nord-américaine Fitch, qui évalue la solvabilité des acteurs économiques – dont les Etats – a abaissé le 15 mai la «perspective» de la France, la faisant passer de «stable» à «négative». Dans une note mise en ligne sur son site, l’agence explique : «La révision de la perspective reflète la détérioration substantielle des finances publiques et de l'activité économique attendue cette année en raison de la pandémie de Covid-19.»

D’après Fitch, la «combinaison d'une activité économique très réduite en raison des mesures de confinement introduites à partir de mars et des politiques gouvernementales pour soutenir l'économie pendant la période d'activité réduite augmentera fortement les emprunts et l'endettement».

«Cette dégradation des paramètres des finances publiques françaises se produira dans un contexte d'endettement déjà élevé […] depuis la crise financière mondiale [débutée à l'automne 2008] et de croissance économique réelle modérée», note enfin la firme d'outre-Atlantique. La France conserve pour le moment sa note de «AA», mais suite à cette décision, l’agence se réserve le droit de la réviser pendant une durée de deux ans.

Un déficit «jamais atteint depuis la Seconde Guerre mondiale», selon Gérald Darmanin

La nouvelle n’est pas très surprenante. Selon la dernière loi de finances rectificative, promulguée le 25 avril après avoir été approuvée par le Parlement, le PIB français devrait connaître une chute de 8%, avec un déficit public de 9,1% et une dette publique totale de 115% du PIB. Des indicateurs très éloignés des règles imposées par Bruxelles (3% de déficit et dette publique plafonnée à 60% du PIB).

Le 21 avril, le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin, avait déjà prévenu sur l’antenne de France Inter : «Nous sommes dans le montant de déficit et de dette jamais atteint depuis la Seconde Guerre mondiale.» Soulignant que le gouvernement avait «préféré l’endettement à la faillite», il avait confirmé qu’«aujourd’hui, la France continue de pouvoir emprunter dans des conditions satisfaisantes […] avec des taux bas».

Et pour cause, le principal intérêt de bénéficier d’une note élevée, le fameux triple A («AAA») étant le plus convoité, est de pouvoir emprunter sur les marchés internationaux à des taux préférentiels. Fitch avait ainsi retiré son «AAA» à la France, le 12 juillet 2013.

Du côté des autres grandes agences de notation, les Américains de Moody’s avaient abaissé la «perspective» de la France, le 21 février dernier, la faisant cette fois passer de «positive» à «stable», et conservant la note de «Aa2» (équivalent de «AA»). Leurs compatriotes de S&P (anciennement Standard & Poor’s) maintenaient inchangée à la mi-avril la «perspective» de la France, évaluée comme «stable», ainsi que sa note de «AA». Enfin, les Chinois de Dagong n’ont pour le moment pas publié de note rectificative concernant la France depuis celle datée d’avril 2018 («stable», «A»).

Plusieurs pays européens concernés

En pleine pandémie mondiale de coronavirus, l’Hexagone n’est pas le seul touché, à l’instar d'autres pays européens. Depuis le début du mois d’avril, Fitch n’a pas hésité à revoir nombre de ses prévisions. Ainsi, le même jour, l'agence de notation a également abaissé la «perspective» de la Macédoine du Nord de «stable» à «négative». Le 17 avril, la Roumanie avait déjà connu le même sort.

Par ailleurs, entre le 1er et le 23 avril, la Croatie, Chypre, la Grèce et l’Ukraine ont vu leur «perspective» être révisée, passant de «positive» à «stable».

Pire encore, le 28 avril dernier, Fitch abaissait la note de l’Italie, de «BBB» à «BBB-», et quelques jours plus tard (8 mai), celle de la Slovaquie de «A+» à «A», faisant peser un risque supplémentaire de défaut de paiement sur ces deux Etats de la zone euro.

Alexis Le Meur