Cinq bonnes raisons de soutenir la privatisation d'ADP
Le Conseil constitutionnel a récemment ouvert la voie à un potentiel référendum sur la privatisation d'ADP, lors duquel les Français pourraient être amenés à se prononcer sur la question. Quels sont les arguments des partisans de l'opération ?
L'Etat, jusqu'alors tenu de conserver la majorité des parts du groupe Aéroports de Paris (ADP), pourrait, dans le cadre de loi Pacte (définitivement adoptée par le Parlement le 11 avril 2019), procéder à la vente au privé de tout ou partie de ses actifs dans l'entreprise aéroportuaire, soit 50,63% des parts, représentant quelque 9,5 milliards d'euros au moment de l'élaboration du projet. Le gouvernement entend que l'opération prenne la forme d'une concession pour 70 ans.
En amont d'une hypothétique consultation populaire sur la privatisation d'ADP, les partisans du projet gouvernemental mettent en avant plusieurs arguments en sa faveur. Voici les cinq principaux.
1. Réduire les conflits d'intérêts
C'est l'un des points régulièrement soulevés par les partisans d'une privatisation d'ADP : éviter les conflits d'intérêt. L'économiste Jacques Delpla, dans les colonnes de L'Opinion, pointait récemment du doigt le développement d'une situation de «conflits d'intérêts» dans des situations où l'Etat est actionnaire d'un groupe. «Quand un gros actionnaire est présent dans deux entreprises concurrentes, il hésite à forcer chaque management à être le plus efficace possible craignant que cela ne se fasse au détriment de l'autre» estime l'économiste.
En l'espèce, il s'agit d'un possible conflit d'intérêts entre ADP et Air France. La compagnie aérienne aurait «intérêt à payer le moins cher possible les taxes d'aéroport et slots de décollage et d'atterrissage ; pour ADP c'est le contraire», explique Jacques Delpla. Selon lio, «le gouvernement défend systématiquement Air France pour des raisons politiques et non économiques» : «Il faut donc couper le cordon ombilical.»
2. Passer d'une logique de rentier à une logique d'investisseur actif
Le gouvernement justifie la privatisation du groupe ADP sur le long terme : l’Etat passerait alors d’une logique de «rentier», recevant des fonds chaque année, à une logique d’«investisseur actif». Une partie de la somme perçue par l'Etat lors de l'opération de privatisation serait ainsi reversée au Fonds pour l’innovation et l’industrie, créé en janvier 2018, dont l'un des principaux objectifs est de permettre le financement des innovations dites «de rupture», supposées encourager le renouveau industriel dans l’Hexagone.
Par ailleurs, une partie des recettes pourrait servir à améliorer les finances du pays, dont la dette publique approche peu à peu des 100% du PIB. Dans un contexte européen tendu, et alors que Bruxelles veille au grain, les partisans de l'austérité budgétaire se montrent particulièrement sensibles à cet argument.
Olivia Grégoire, députée LREM de Paris, avançait récemment que la privatisation d'ADP devait selon elle produire des effets positifs sur l'emploi. Avec elle, nombreux sont les commentateurs qui estiment en effet que l'Etat n'a plus les moyens d'accompagner cette ambition. «Ouvrir le capital d’ADP permettra un développement profitable à l’emploi (non-délocalisable), aux usagers et aux salariés. Privatiser ADP, ce n’est donc pas chercher de l’argent frais, c’est injecter du sang neuf», expliquait la députée.
4. Conférer un nouveau «triple pouvoir» à l'Etat
Invitée à l'antenne d'Europe 1 le 13 avril, la députée parisienne évoquait également un futur cahier des charges du gouvernement après la privatisation, grâce auquel l'Etat pourrait avoir «un triple pouvoir sur ADP», dont il ne dispose actuellement pas. «Un pouvoir de contrôle (via la Cour des comptes et un commissaire du gouvernement qui siégera au conseil d’administration), un pouvoir de régulation économique (un contrat sera renégocié tous les cinq ans entre l’État et le concessionnaire) et un pouvoir de sanction (faute de respect du cahier des charges, l'Etat pourra sanctionner le concessionnaire jusqu’à 2 % de son chiffre d’affaires)», expliquait Olivia Grégoire.
5. «Des garanties nouvelles» pour le climat
Dans un texte destiné à répondre aux «idées fausses sur la cession d’Aéroports de Paris», le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire faisait le lien, au mois d'avril, entre l'opération de cession et les enjeux en termes de climat et d'emploi. «Dans le cahier des charges, l’État apporte des garanties nouvelles et plus fortes sur les modalités d’exploitation que celles qui existent aujourd’hui. Il comportera des points précis sur le respect de l’environnement, sur les services, sur les emplois», affirme en effet le ministre.