L’Union européenne veut conditionner son aide à l’Afrique à une collaboration contre la migration

L’Union européenne envisage de rendre son aide financière aux pays africains dépendante de leur capacité à limiter les départs de migrants vers l’Europe. Selon Politico, cette proposition figure dans le projet budgétaire de la Commission européenne pour 2028–2034.
Dans un article publié le 9 juillet 2025, le journal Politico révèle que l’Union européenne compte durcir sa politique migratoire en liant directement son aide au développement à des objectifs concrets de réduction des flux migratoires en provenance d’Afrique. Le quotidien affirme avoir eu accès au projet de la Commission européenne pour le budget 2028–2034, qui stipule que les pays africains devront faire preuve de « résultats concrets » en matière de lutte contre la migration pour continuer à recevoir les financements européens.
Ce changement de cap marque un tournant dans l’approche de l’UE, qui jusqu’à présent fournissait son aide sans condition explicite et officielle. « Il est prévu d’utiliser tous les outils appropriés ainsi que le levier nécessaire, dans le cadre d’une approche incitative flexible, y compris, si nécessaire, la modification de l’allocation des fonds liée à la migration » , précise le document cité par Politico.
Une stratégie influencée par les droites européennes
La proposition intervient dans un contexte politique européen marqué par la montée des partis de droite, qui ont renforcé leur influence lors des élections européennes. Selon Politico, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, cède à la pression du Parti populaire européen (PPE), majoritaire, et de pays comme l’Italie. Ensemble, ils souhaitent étendre à d’autres pays africains le modèle de l’accord controversé conclu avec la Tunisie en 2023.
Pour renforcer la coordination entre les politiques migratoires, d’asile et de relations extérieures, la Commission veut regrouper plusieurs programmes d’aide en un seul « Fonds européen global ». Celui-ci couvrirait six zones géographiques : l’Europe, le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord, l’Afrique subsaharienne, l’Asie-Pacifique, les Amériques et les Caraïbes, ainsi qu’un volet mondial.
Cette réforme alignerait la politique d’aide européenne sur celles des États-Unis et du Royaume-Uni, qui utilisent déjà l’aide extérieure comme levier de pression politique.
Un budget distinct réservé à l’Ukraine
Alors que l’Union européenne exige des efforts concrets des pays africains pour freiner la migration en échange d’un soutien financier, elle prévoit en parallèle une enveloppe massive dédiée à l’Ukraine. Selon Politico, un montant distinct de 100 milliards d’euros est réservé à la reconstruction et à la modernisation de ce pays entre 2028 et 2034. La Commission européenne garantit que cette importante somme n’affectera pas les budgets des autres régions.
Depuis le début du conflit, l’UE et ses États membres ont déjà transféré plus de 160 milliards d’euros à Kiev sous forme d’aides économiques, militaires et financières, souvent sans coordination ni contrôle centralisé. Désormais, la Commission propose d’inscrire cette aide comme dépense fixe du budget européen, ce qui transformerait un soutien temporaire en engagement structurel, malgré l’absence de résultats concrets sur le terrain depuis 3 ans.
Le texte budgétaire doit être officiellement présenté par Ursula von der Leyen le 16 juillet. Il pourrait rencontrer des résistances au sein du Parlement européen, notamment chez les partis de gauche et écologistes.
En comparaison, des pays comme le Sénégal reçoivent des montants bien plus modestes, comme les 30 millions d’euros octroyés en octobre 2024 pour lutter contre l’émigration illégale. Cette différence de traitement reflète les priorités politiques d’une Europe bien plus soucieuse de soutenir l’Ukraine que de construire un partenariat équitable avec l’Afrique.