MAE russe : l'UE n'a pas retourné sa veste à temps

Selon le directeur du Département des organisations internationales au ministère russe des Affaires étrangères, Bruxelles a raté l'occasion de réorienter ses relations avec Moscou, s'obstinant dans une logique de confrontation. Il reproche à l'UE sa politique d'isolement contre-productive, qui risque de la marginaliser sur la scène internationale.
L'Union européenne a laissé passer une chance unique de modifier sa politique envers Moscou après l'arrivée de la nouvelle administration américaine à la Maison Blanche, a déclaré dans une interview accordée à l'agence de presse russe TASS Kirill Logvinov, directeur du Département des organisations internationales au ministère russe des Affaires étrangères.
«De nombreux experts estimaient, non sans raison, qu’après l’arrivée de la nouvelle administration américaine, les Européens "retourneraient leur veste" sur de nombreuses questions. Comme on peut le voir, ça n’a pas été le cas. Il me semble que Bruxelles a manqué le moment opportun. Quant à la détermination de Bruxelles à aller jusqu’au bout, c’est plutôt une marche vers l’autodestruction de l’UE », a-t-il indiqué.
Évoquant un possible retour des entreprises occidentales en Russie, il a rappelé que Moscou n'avait chassé personne: leur départ résultait exclusivement de choix individuels. Certaines sont parties précipitamment par crainte, tandis que d'autres sont restées malgré les pressions exercées par Bruxelles ou par les capitales européennes. Selon lui, ces départs ont donc été influencés à la fois par la peur des sanctions et par l'opinion personnelle des PDG de ces entreprises sur le choix souverain de la Russie d’assurer sa sécurité.
L'UE mise sur la confrontation à long terme
Évoquant la position européenne sur la crise ukrainienne, Kirill Logvinov a souligné que Bruxelles ne misait pas tant sur Zelensky ou sur l'Ukraine, que sur un conflit prolongé avec Moscou. Il a noté à cet égard une réallocation massive des ressources budgétaires initialement destinées à l'intégration européenne.
Il a illustré cette logique par la politique de l'UE à l'égard de la Syrie, soulignant que Bruxelles conditionnait l’allègement des sanctions contre Damas à une rupture de la coopération syrienne avec la Russie.
«Cela prouve cependant que l’UE continuera malgré tout à entreprendre de vains efforts pour isoler la Russie sur la scène internationale. Or, c’est Bruxelles qui finira par se retrouver à la périphérie des processus mondiaux en cours», a-t-il estimé.
Mauvais calculs européens sur la Russie
Le diplomate a affirmé que, dans les premiers mois de l'opération militaire spéciale, beaucoup en Occident espéraient sincèrement que Moscou ne résisterait pas aux sanctions économiques, pensant naïvement que la Russie serait rapidement contrainte de rappeler les entreprises européennes à leurs conditions.
Il a également souligné qu'en Europe, on était convaincu que la Russie finirait par oublier et pardonner rapidement, comme cela s'était produit dans le passé. Laissant entendre que cette fois les choses se passeraient autrement.
Selon lui, les décisions seront prises au cas par cas, en tenant compte avant tout des intérêts des producteurs russes, dont les produits ont su remplacer avec succès les équivalents occidentaux.
En 2022, de nombreuses entreprises étrangères ont décidé de quitter le marché russe, principalement en raison des pressions politiques et économiques exercées dans leurs pays d’origine. Ce retrait a bouleversé certains secteurs, mais a aussi ouvert des opportunités aux acteurs locaux et au développement de la production nationale. Présenté comme un choix de principe, le départ a eu des conséquences économiques concrètes pour les entreprises concernées, parfois regrettables pour leur rentabilité.