Alors que la crise en Syrie semble loin d’être résolue et continue de jeter sur les routes toujours plus de réfugiés, l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin a partagé avec RT sa vision de la situation et les façons d’y faire face.
RT : La France a récemment entamé des frappes aériennes en Syrie, la Russie également, mais François Hollande n’a pas souhaité de coordonner ses actions militaires avec Moscou. Est-ce une décision raisonnable, à votre avis ?
Dominique de Villepin : Dans votre question, il y en a en fait une autre : est-il possible de résoudre la crise syrienne à travers l’option militaire ? Au final, je ne le crois pas. La solution doit être politique, même si l’option militaire peut être un élément de la solution à un certain moment. Je crois qu’il est nécessaire de coopérer autant que faire se peut, en menant une campagne militaire conjointe. Mais la solution ne passe pas uniquement par la guerre. Si on se plonge dans la compréhension de la crise en Syrie, en prenant en compte tous les facteurs politiques, on comprend qu’on ne peut pas combattre le terrorisme uniquement par la guerre. Je crois que la coopération avec la Russie est maintenant absolument indispensable, nous avons besoin de Moscou pour aider à créer un dialogue politique, qui est la clé de la sortie de crise en Syrie.
Jacques Myard: "Il faudra compter avec Bachar el-#Assad pour trouver une solution politique" https://t.co/XmAwzpkZ5Vpic.twitter.com/MQdpZvEX3p
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RT : On parle de dialogue, mais que peut-on vraiment négocier avec Daesh ?
Dominique de Villepin : On peut parler aux tribus sunnites et aux groupes de population syrienne qui soutiennent Daesh. Si on fait ça, le problème de Daesh prendre une dimension totalement différente : sans le soutien de la population sunnite en Syrie et en Irak, les terroristes se retrouveront dans une position nettement plus compliquée.
Mais pour ce faire, on a besoin d’un geste politique fort. Je crois qu’à travers les discussions et l’organisation d’une nouvelle conférence sur la sécurité de la région, qui comprendrait aussi les pouvoirs régionaux, on pourrait donner une voix à toutes les communautés du Moyen-Orient. Alors que l’instabilité pourrait également toucher les pays du Golfe persique, ils doivent eux aussi comprendre qu’il faut essayer d’intégrer toutes les minorités et accepter un processus politique, montrant ainsi le chemin à une nouvelle Syrie.
"L'ennemi de la France, ce n'est pas Assad, c'est Daesh" @Marion_M_Le_Pen (Interview) https://t.co/vrZ4iluNcgpic.twitter.com/fYaxe7ZIBO
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RT : De plus en plus de dirigeants aujourd’hui commencent à évoquer la nécessité d’inclure Assad dans la transition politique en Syrie. Que pouvez-vous ajouter à ce débat ?
Dominique de Villepin : Même si Assad restera au pouvoir pendant une certaine période de temps, je crois qu’il doit être clair qu’à la fin il devra partir, mais le groupe ethnique des Alaouites qu’il représente devra avoir sa place dans le futur gouvernement.
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RT : La crise migratoire actuelle en Europe, avec des milliers de musulmans qui affluent de Libye et de Syrie, a divisé l’Europe. Comment ce problème peut-il être résolu ?
Dominique de Villepin : Nous devons en fait utiliser différents procédés. La réponse de l’Europe a été de rejoindre la coalition en Syrie en espérant accélérer le règlement de la crise en bombardant Daesh. Mais nous voyons que ce n’est pas la solution. La première chose à faire est de créer des zones humanitaires en Syrie et dans les pays voisins, capables d’accueillir des millions des réfugiés, comme en Turquie par exemple. Car si on n’arrive pas à les accueillir à l’intérieur de la région, ils viendront chez nous. C’est pourquoi la deuxième mesure est évidemment d’aider à trouver une solution politique en Syrie, en Irak et aussi en Libye. Sans un règlement politique dans ces pays, nous verrons toujours arriver plus de réfugiés.
Crise des #migrants: "Les pouvoirs publics européens jouent avec le feu" Djordje @Kuzmanovichttps://t.co/2r7YHuKiigpic.twitter.com/3mPc15vIDt
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La façon dont nous traitons les réfugiés a en fait des conséquences énormes dans la région et peut bénéficier au processus politique. En refusant d’accueillir les migrants nous envoyons le message politique que nous, les pays riches, ne sommes pas seulement largement responsables de la situation au Moyen-Orient, mais aussi que nous ne nous soucions pas des conséquences. Nous devons donc accepter de les accueillir de la meilleure façon possible, en essayant en même temps de négocier une solution politique.
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