Pour Ariel Beresniak, docteur en médecine, les autorités françaises, focalisées sur le confinement et ses corollaires, ont négligé d'autres pistes existantes pour lutter contre la pandémie de Covid-19.
C'est l'histoire classique de l’homme qui cherche ses clés sous un lampadaire. Pourquoi sous un lampadaire ? Non parce que l’homme a perdu ses clés à cet endroit, mais parce que c'est le seul endroit éclairé de la rue…
Cette situation serait comique si la vie d’une nation entière n’était pas en jeu. Elle représente tragiquement le comportement du gouvernement dépassé par les événements et cherchant les clés de la fin de l’épidémie dans les dires de son conseil scientifique. Pour obtenir des résultats tangibles, il conviendrait que le pouvoir exécutif accepte de regarder ailleurs.
Le confinement de la population (et son corollaire les couvre feux à géométrie variable) sont présentés par le ministère de la Santé comme la «seule» stratégie pour «casser» les chaînes de transmission de la pandémie de Covid-19. C’est loin d’être vrai.
La lutte contre les pandémies à virus respiratoires a en effet fait l’objet de nombreuses recherches, publications scientifiques et rapports internationaux. Au-delà des restrictions de liberté, masques tests et vaccins, il existe un certain nombre d’autres interventions de santé publique qui ont fait leurs preuves et que la puissance publique a choisi d’ignorer.
Quelles sont-elles ?
- Antiviraux : Administrés suffisamment tôt pendant la phase de réplication virale de la maladie, les médicaments antiviraux sont susceptibles de réduire le risque d’évolution vers des formes sévères de Covid-19 en diminuant la charge virale. Malgré la polémique en France alimentée par des publications contradictoires, l’hydroxychloroquine reste utilisée à ce jour comme antiviral avec un certain succès dans de nombreux pays y compris en Europe (Belgique, Italie, Russie...) De nombreuses molécules spécifiquement antivirales sont par ailleurs utilisées contre le Covid comme le lopinavir, ritonavir, umifenovir, oseltamivir, ganciclovir, ribavarine.
- Prévention des surinfections respiratoires : Les virus respiratoires autres que les coronavirus et la bactérie pneumocoque sont responsables d’un nombre très élevé d’hospitalisations et de décès chez les sujets de plus de 65 ans. Ces infections peuvent donc non seulement affaiblir l’organisme et favoriser le développement d’une forme grave de Covid-19, mais aussi survenir de façon concomitante ou en complications de la maladie. Dans tous les cas l’organisme devra se défendre contre plusieurs agents pathogènes en même temps. C’est la raison pour laquelle les vaccinations contre la grippe et le pneumocoque sont particulièrement recommandés durant l’épidémie de Covid, à plus forte raison chez les sujets fragiles.
- Oxygénothérapie à domicile : Le tropisme pulmonaire de la maladie Covid provoque un manque d’oxygénation de l’organisme. Cette hypoxémie aggrave l’état des alvéoles pulmonaires qui ont de plus en plus de mal a diffuser l’oxygène dans le sang, provoquant un cercle vicieux jusqu’à la détresse respiratoire. Une oxygénation précoce à domicile aide les poumons à oxygéner le sang et à s’oxygéner eux-mêmes. Prise en charge suffisamment tôt, une hypoxémie se traite facilement avec de l’oxygène. Une prescription par un médecin permet de disposer à domicile soit d’une bouteille d’oxygène, soit d’un générateur d’oxygène. Des oxymètres de pouls à prix très modique existent aujourd’hui permettant un autodiagnostic rapide d’hypoxémie. Leur généralisation associée à une oxygénothérapie précoce à domicile permettrait d’éviter un nombre très important d’admissions à l’hôpital et de décès.
- Traitements par anticorps monoclonaux : En l’absence d’immunité naturelle ou vaccinale, il est possible d’injecter directement des anticorps au début de l’évolution de la maladie afin d’éviter l’apparition des formes sévères. Ces anticorps bloquent la fameuse protéine «spike» du virus qui lui permet de pénétrer dans les cellules humaines. Développés par plusieurs laboratoires pharmaceutiques dont les américains Regeneron, Eli-Lilly et l’anglo-suédois AstraZeneca, certains produits ont été approuvés très récemment par l’agence sanitaire américaine FDA. Sans attendre les validations par les agences européennes, l’Allemagne est le premier pays Européen à avoir commandé 200 000 doses pour sa population.
- Ouverture de lits de «réanimation», «soins intensifs» et de «surveillance continue» : Le risque de «saturation-des-services-de-réanimation» est devenu un véritable mantra martelé par les autorités sanitaires comme l’unique raison du déclenchement des mesures privatives de liberté de la population. Contrairement à l’idée répandue qu’il ne serait pas possible de créer de nouveaux lits de soins intensifs car la formation du personnel spécialisé nécessiterait de nombreuses années, il est tout à fait possible de créer de nouvelles unités, soit de façon provisoire, soit de façon pérenne.
C’est ainsi que des unités de soins intensifs modulaires provisoires ont été montées en quelques jours en Chine à Wuhan durant l’épidémie initiale de l’hiver 2019-2020. Plus récemment en novembre 2020, un hôpital modulaire de 1 300 lits de «surveillance continue» dédiés entièrement au Covid-19 a été créé à Moscou dans le stade de course de vitesse sur glace. Un projet similaire a été monté en Europe à Varsovie où 500 lits dédiés Covid ont été installés au sein du stade national.
Une organisation particulière du personnel permet aux médecins spécialistes de superviser ces structures provisoires, assistés d’autres médecins et surtout de nombreux yeux, bras et oreilles infirmiers pour appliquer les procédures standardisées de surveillance et de soins.
- Développement des équipements médicaux : La prise en charge efficace des patients souffrant de formes sévères de Covid-19 nécessite des équipements de haute technologie.
Les principales causes de décès du fait de cette maladie sont les détresses respiratoires par pneumonie. Les respirateurs artificiels permettent aux patients souffrant de pneumonie à Covid de respirer et donc d’oxygéner leur organisme. Les hôpitaux étant sous équipés en matériel moderne, une tentative de combler la pénurie en respirateurs a bien été ordonné par l’Etat qui a commandé fin mars 2020 10 000 respirateurs à un consortium associant les industriels Air Liquide, PSA, Valeo et Schneider Electric. Sur les 10 000 unités commandées, 1 500 sont du modèle Monal T60 réellement utilisable à l’hôpital… Depuis cette commande, l’Etat n’a plus évoqué de commande de respirateurs.
Un autre type d’équipement s’avère très utile dans le Covid : les ECMO (oxygénation par membrane extracorporelle). Cet appareil utilise un circuit extracorporel permettant d’ajouter de l’oxygène directement dans le sang, donc sans passer par les poumons dont l’état peut être trop dégradé pour qu’un respirateur soit efficace. Il s’agit d’une option de dernier recours permettant de sauver 70% des patients atteints de formes très sévères de Covid-19, selon plusieurs études scientifiques. Il n’existe malheureusement que très peu de plateformes ECMO installées sur le territoire qui pourraient faire drastiquement baisser la mortalité en réanimation.
- Contrôle des frontières au début de l’épidémie : Lors de l’éclosion de l’épidémie à Wuhan, peu de pays en Europe ont limité les échanges avec la Chine. L’Italie avait bien interdit l’arrivée des vols directs en provenance de la Chine, mais pas des vols indirects, permettant à la nombreuse communauté chinoise de pouvoir rentrer dans le nord de l’Italie après le nouvel an chinois, diffusant ainsi le virus dans le pays puis en Europe. Le contrôle des frontières peut prendre plusieurs formes. Il peut s’agir de la fermeture totale à partir d’une zone géographique ou sévit un foyer important, la fermeture totale aux passagers ayant pu transiter par une zone à risque durant une période récente, l’exigence d’une quarantaine, ou l’accueil et le simple contrôle des passagers arrivant par dépistage de fièvre à l’aide d’appareils thermiques, ou encore en exigeant de tests virologiques négatifs réalisés dans les derniers jours.
Nul doute que le contrôle strict des frontières pendant que l’épidémie était encore circonscrite en Chine aurait permis de limiter drastiquement la diffusion de l’épidémie lors du premier trimestre 2020. Une fois que le virus a diffusé au niveau mondial, le contrôle des frontières tel qu’il imposé désormais en France depuis le 31 Janvier 2021 est par définition moins efficace…
- Fermeture des écoles : Il s’agit d’une mesure de santé publique classique et très efficace pour lutter contre les épidémies par virus respiratoire. Les écoles sont en effet des communautés où la promiscuité est très difficile à contrôler chez une population très jeune par nature très sociale, curieuse et pas nécessairement très disciplinée. Même si les enfants ne semblent pas être une cible privilégiée des effets pathogènes du coronavirus, ils peuvent le véhiculer, le transmettre et le ramener dans leur foyer familial.Les effets collatéraux de la fermeture des écoles sont réels et bien connus, mais il n’est pas nécessaire que cette fermeture soit prolongée indéfiniment. Il suffit en effet que la fermeture survienne pendant un temps limité de quelques semaines seulement durant la phase ascendante de l’épidémie pour être déjà très efficace.
- Fermeture des transports publics urbains : Les transports en commun urbains sont des espaces très propices à la contamination. Tous les facteurs de risque y sont concentrés : foule, promiscuité, mauvaise ventilation, brassage de population, nombreux éléments métalliques manipulés par beaucoup de monde, etc. Le risque de contamination par virus respiratoire est si important dans les transports publics que ce serait idéalement le secteur à fermer en priorité en cas d’épidémie... Même si le port imposé de masques est très certainement utile dans les transports, ils ne permettent aucune protection contre la contamination manuportée. Les transports individuels au cours de l’épidémie devraient ainsi être largement promus, mais cela va à l’encontre de l’idéologie anti-voiture promue dans le pays.
L’utilisation de façon adaptée de toutes les armes à disposition contre le Covid-19 permettrait véritablement de lutter efficacement contre les pandémies présentes et futures. Enfermé dans le déni des alternatives à ses actions, il n’est pas certain que le ministère de la Santé accepte d’élargir le spectre limité des mesures qu’il a choisi de déployer, car ce serait reconnaître son incompétence et celle de ses conseillers…
La moindre suggestion à évoquer d’autres stratégies entraîne un feu nourri en retour principalement construit autour du reproche du manque de «preuves» suffisantes inhibant toute velléité pragmatique. La violente polémique autour de l’utilisation de l’hydroxychloroquine en est la meilleure preuve.
Toute critique envers la mauvaise performance des seuls moyens déployés par les autorités sanitaires ne génère en réponse que des procédés de culpabilisation : «Des gens meurent pendant que vous discutez… Allons nous continuer à pérorer ou allons-nous agir ? Nous sauvons des vies…». Ce type de discours est l’apanage des hommes de pouvoir ayant pour but d’imposer leur ordre moral qui n’est que la lumière du réverbère.
Ariel Beresniak
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