Analyser d'imaginaires manœuvres russes dans les Amériques ? C'est ainsi que le rédacteur en chef de Ruptures Pierre Lévy répond au Secrétaire américain à la Défense, «un général plein d’humour».
«Notre présence renforcée est désormais pleinement opérationnelle au Mexique comme au Canada ; il s’agit d’un message clair à qui préparerait une agression contre ces pays : nous sommes déterminés.» Cette mise en garde inhabituellement ferme d’un haut diplomate russe est clairement destinée aux dirigeants américains, dont Moscou a quelques raisons de penser qu’ils s’apprêtaient à envahir l’un de leurs voisins.
Le Kremlin a précisé qu’un centre de commandement militaire aérien a été «activé» à Cuba, et que des chasseurs vénézuéliens alliés patrouillent désormais dans les espaces aériens canadien et mexicain pour assurer la protection de ces pays. L’Etat-major russe a précisé s’être assuré que les appareils étaient prêts à opérer même dans des zones de défense renforcée des Etats-Unis.
Enfin, le responsable russe a sommé Washington de faire toute la clarté sur les manœuvres qu’il prépare pour septembre au Texas, frontalier du Mexique.
Un QG aérien a bien été établi en Pologne, et la chasse britannique patrouille effectivement dans le ciel balte. Et là, pour le coup, ça n’a guère ému nos grands médias
Ces déclarations incroyables sont passées inaperçues ? C’est normal, elles sont imaginaires. Pas tant que cela cependant. Elles ont bien été prononcées le 29 juin, mais pas par des Russes. Elles émanent en réalité du Secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg. Bien sûr, il ne s’agit pas du Canada et du Mexique, mais de la Pologne et des pays baltes – ces derniers étant persuadés (ou feignant de l’être) que la Russie se prépare à les envahir à la prochaine occasion.
Cela donne donc : «notre présence renforcée est désormais pleinement opérationnelle en Estonie, Lettonie, Lituanie, et en Pologne ; il s’agit d’un message clair à qui préparerait une agression contre ces pays : nous sommes déterminés.» Un QG aérien a bien été établi en Pologne, et la chasse britannique patrouille effectivement dans le ciel balte.
Voilà qui est étonnant, lorsque l'on connaît l'inlassable rengaine des dirigeants américains : «la Guerre froide est finie.» Ces mots, assénés par George W. Bush à Vladimir Poutine lors du sommet OTAN-Russie de Bucarest en 2008, Barack Obama les a répétés en avril 2015 à Raul Castro. La Guerre froide est donc finie, puisqu'on vous le dit, mais restons prudents, il s'agit tout de même de se prémunir d'un mystérieux pays qui «préparerait une agression». Et là, pour le coup, ça n’a guère ému nos grands médias. «Où est le problème ?», en quelque sorte.
Dans le même souffle…
C’est dans cette ambiance que le Secrétaire américain à la Défense, le général James Mattis, a précisé que la réunion des ministres de l’OTAN, qui s’est tenue le 29 juin à Bruxelles, s’est concentrée sur «le terrorisme et les activités déstabilisatrices de la Russie», le tout cité dans le même souffle…
Pour qui n’aurait pas compris le message, M. Mattis met les points sur les i : «au-delà de ce que vous pouvez lire dans les journaux, il faut juger de l’engagement américain à partir de ces faits»
M. Mattis s’est félicité dans la foulée du renfort des 4 500 militaires de l’Alliance atlantique manoeuvrant actuellement «dans les forêts de Lituanie» (à proximité des frontières russes, donc) : «c’est vraiment formidable de penser que de jeunes soldats de l’Alliance manoeuvrent ensemble». Et le chef du Pentagone de conclure : «quand vous mettez des troupes sur le terrain sous commandement d’autres nations, quelle plus belle preuve d’unité (de l’Alliance) ?».
Et pour qui n’aurait pas compris le message, M. Mattis met les points sur les i : «au-delà de ce que vous pouvez lire dans les journaux, il faut juger de l’engagement américain à partir de ces faits». Comprendre : quoi que puisse raconter Donald Trump sur l’OTAN et sa clause de défense mutuelle automatique. On sait en effet que le président américain a tenu des propos ambigus et contradictoires à cet égard qui avaient fait enrager ses alliés européens.
En déplacement le 28 juin en Allemagne, le général Mattis a par ailleurs confirmé que les Etats-Unis avaient prévu de consacrer 1,8 milliards de dollars supplémentaires pour leurs forces stationnées en Europe l’année prochaine.
Car, a précisé, imperturbable, le ministre américain, «Vladimir Poutine fait tout pour semer la zizanie au-delà de ses frontières».
Enfin un général plein d’humour !
Du même auteur : Après les législatives… attention à la Marche
Source : ruptures-presse.fr
Les opinions, assertions et points de vue exprimés dans cette section sont le fait de leur auteur et ne peuvent en aucun cas être imputés à RT.