Les grands groupes patronaux français s'adressent à Emmanuel Macron pour faire avancer le projet européen. «Reste à savoir si cet engagement rendra l’intégration européenne plus populaire», tempère le rédacteur en chef du site Ruptures, Pierre Lévy.
Сhaque année, le 9 mai, c’est la Fête de l’Europe. Une fête qui donne libre cours à une liesse populaire incomparable. Jusqu’au moindre bistrot, on entonne en chœur l’Hymne à la joie. Dans les ateliers, on trinque à cette journée bénie. Dans les HLM, chaque fenêtre est spontanément pavoisée aux couleurs de la bannière bleue étoilée. Et la France enfin rassemblée danse jusqu’au petit matin pour fêter la grande aventure européenne. Les bonnes années, on découvre même avec émotion une interview du ministre délégué à l’Europe.
Bon, ça, c’est dans les rêves de Bruxelles. Dans la réalité, les seuls qui se sont souvenus de cette importante occasion à célébrer, ce sont, rien de surprenant à cela, les dirigeants patronaux. Quatre organisations qui rassemblent ceux-ci ont saisi l’occasion, au surlendemain de l’élection d’Emmanuel Macron à l’Elysée, pour adresser au futur maître des lieux une ardente missive. Et là, évidemment, on ne rit plus.
Nous savons votre engagement pour l’Europe et votre capacité à redonner vie au projet européen
Le Medef (qu’on ne présente pas), l’AFEP (Association française des entreprises privées, un club très sélect où se côtoient les poids lourds du CAC 40, loin de la plèbe des petits patrons), le GFI (Groupe des fédérations industrielles) et le Cercle de l’Industrie (fondé par Dominique Strauss-Kahn) ont donc rédigé un discret courrier (révélé par l’AFP, mais qui ne figure pas sur le site de ces organisations). Les signataires commencent par rendre hommage à l’ex-banquier de chez Rothschild : «Nous savons votre engagement pour l’Europe et votre capacité à redonner vie au projet européen» (l’expression sous-entend curieusement que l’UE est en état de coma dépassé…).
La lettre a pour objet de proposer au nouveau chef de l'Etat français un «Pacte européen» visant à «renforce[r] la visibilité et la gouvernance du projet européen». Car «la France a besoin, pour rayonner, d’une Europe compétitive et solidaire», cette dernière devant s’affirmer comme «grande puissance économique».
Au-delà des mots – qui ne brillent certes pas par leur originalité – les dirigeants patronaux se font plus précis : ils plaident pour un parlement de la zone euro et en faveur d’une «convergence budgétaire, fiscale et sociale». Il faut en outre «renforcer le Mécanisme européen de stabilité», et ce en vue d’«être prêt à assumer les conséquences d’une éventuelle crise».
Front européen ?
Bref, il faut franchir une étape décisive en matière d’intégration, insiste le texte, qui reprend ainsi certaines propositions au cœur de la campagne d’En Marche!.
Après l’union sacrée et le Front républicain «pour faire barrage au fascisme», nul doute que le valeureux plaidoyer du Medef et consorts suscitera des vocations pour un très large Front européen rassemblant les cinquante nuances de la caste politico-médiatique et de la société civile.
Reste à savoir si cet engagement patronal rendra l’intégration européenne plus populaire. Allez, Emmanuel, on essaye ?
Lire aussi : Couacs à tire-larigot après l'annonce des investitures de La République en marche
Source : www.ruptures-presse.fr
Les opinions, assertions et points de vue exprimés dans cette section sont le fait de leur auteur et ne peuvent en aucun cas être imputés à RT.