Les données du renseignement qui sont présentées au président américain sont souvent très idéologiques et biaisées, ce qui ne lui permet pas de bien évaluer la situation, estime Michael Maloof, ancien responsable au Pentagone.
RT : On voit que la rhétorique de Donald Trump à propos de la Syrie a changé. Pensez-vous qu’on puisse s’attendre à ce que le ton s'affermisse davantage et que les mesures militaires s’imposent ?
Michael Maloof (M. M.) : La rhétorique vient de changer radicalement, mais il y a quelques points essentiels qu’il faut prendre en considération et qui sont à présent ignorés. Il faut réunir tous les faits. Il y a des raisons de croire qu’un entrepôt d'armes chimiques a été touché par une frappe. La province d’Idlib est connue pour héberger des membres de l’opposition, mais aussi ceux qui viennent de Turquie, et on accuse tout de suite la Russie d'une part, mais principalement la Syrie. Je crois que l’ONU devrait suivre la proposition de Nikki Haley et montrer une certaine initiative, monter une équipe d'investigation et aller sur le terrain pour voir de quoi il retourne.
Ce à quoi nous assistons maintenant, c’est de la rhétorique idéologique, il faut raison garder
J’espérais que la Russie puisse inviter les Etats-Unis à envoyer des officiels pour procéder à un examen conjoint. C’est sûr qu'une initiative sous l'égide de l’ONU aurait plus d’autorité. Il reste beaucoup à découvrir, à explorer. Ce à quoi nous assistons maintenant, c’est de la rhétorique idéologique, il faut raison garder. Le président américain a raison de dire que ce qui est arrivé à ces enfants est déplorable, que c’est un crime contre l’humanité. Mais concrètement, je ne suis pas certain que la Syrie en ait la capacité militaire. La Russie avait de plus conditionné son engagement militaire contre la promesse des Syriens de se débarrasser de leurs armes chimiques et signer le traité les concernant. S’ils avaient vraiment des entrepôts cachés, nous aurions dû le savoir.
Donald Trump a dit que beaucoup de lignes rouges avaient été franchies, cela veut-il dire qu’il pourrait entreprendre des actions unilatérales ? On ne peut exclure cette possibilité.
Cela pourrait être la pire des attaques au gaz de l’histoire récente
RT : Aucune preuve tangible n'a été recueillie, comme l'a confirmé l’ONU. Pourquoi entend-on néanmoins toute cette rhétorique hostile ?
M. M. : Ils reçoivent leurs informations des services de renseignement, du département d’Etat, qui sont antirusses et antisyriens. Ils ont toujours cherché la destitution de Bachar el-Assad. C’est pourquoi, à mon avis, le président Trump devrait réfléchir au-delà de ce qui lui est dit, réunir un comité international et commencer à réellement examiner ce qu'il s'est passé. Cela pourrait être la pire des attaques au gaz de l’histoire récente. Les réputations de plusieurs pays sont en jeu, non seulement celle de la Russie, mais aussi la réputation des Nations unies, dont l’utilité sera remise en question. L’heure est venue d'agir de façon courageuse, créative et positive. C’est pourquoi quelque chose doit être fait immédiatement, sinon des difficultés bien plus importantes risquent de se dresser.
Il faut dire également que les données du renseignement qui sont présentées au président américain sont très idéologiques, très biaisées. Les services du renseignement peuvent, comme cela a été le cas en 2003 sous l’administration de Georges Bush, pousser le président vers un échec. Je crains qu’une telle chose ne se reproduise de nouveau, nous sommes au bord de cela.
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