L'OTAN fait son possible pour présenter la politique de la Fédération de Russie au Moyen-Orient comme une menace sur l'Europe, estime Dario Citati, directeur du Programme de recherche «Eurasie» de l'Institut des hautes études en géopolitique de Rome.
RT France : Pourquoi le déplacement du porte-avions russe l'Amiral Kouznetsov vers le port de Tartous a-t-il provoqué autant de réactions au sein de la communauté internationale ?
Dario Citati (D. C.) : Il s’agit d’un cas typique de deux poids deux mesures, comme lorsqu’il y a des victimes [civiles] dans des bombardements. Lorsque la Russie est le responsable – du moins présumé – il y a tout de suite une campagne de la part des médias occidentaux. La même chose n'a pas lieu lorsque le suspect est l’Occident.
On voit un certain niveau de confusion et de tension à l’intérieur de l’OTAN
Derrière ce deux poids deux mesures se trouve aussi une différence de stratégies… en ce moment la Russie a une stratégie très claire - qu’on peut approuver ou non, mais qui est de poursuivre ses propres intérêts, de combattre l’Etat islamique et, bien évidemment, d’avoir une relation amicale avec le gouvernement syrien. Quant à l’Occident, on ne comprend pas quelle est sa stratégie. D’un côté combattre l’Etat islamique, de l'autre être contre le régime syrien. Et on ne comprend pas sur quel groupe rebelle on s’appuie. Cela témoigne d’un certain niveau de confusion et de tension à l’intérieur de l’OTAN.
RT France : Il y a des rumeurs selon lesquelles l'Espagne aurait cédé aux pressions de l'OTAN en refusant une escale de ravitaillement au navire russe dans son port de Ceuta. Cela vous surprendrait-il ?
D. C. : Non, cela ne me surprend pas. D’un côté on ne comprend pas très bien les raisons pour lesquelles l’Espagne aurait cédé à ces pressions. Sur un plan juridique, je ne pense pas que l’Espagne aurait violé des traités de l’OTAN en accordant l’escale. Car, techniquement l’OTAN n’est pas en guerre avec la Russie. Bien évidemment, il y a des tensions politiques, mais l’Espagne, en octroyant cette possibilité de ravitaillement au navire russe, n’aurait fait rien d'autre que ce que les pays de l’OTAN font quand ils poursuivent des relations amicales et une coopération militaire avec des pays qui ne font pas partie de l’OTAN. Donc je ne vois rien d’étrange à cela. Les pressions montrent que la question est plus politique qu'autre chose.
La politique étrangère russe au Proche-Orient ne peut pas être considérée comme une menace, mais elle doit être presentée comme telle
RT France : Peut-on dire que cela s’inscrit dans la stratégie de l'OTAN de contrer la «menace russe» ?
D. C. : Plutôt que de contrer, il s'agit de montrer qu’il y a une menace russe, qu’il y a une politique très active de la part de la Fédération de Russie. En Europe orientale, par exemple, il y a une tension objective avec l’Occident qui nuit à la sécurité de l’Europe. La politique étrangère russe au Proche-Orient ne peut pas être considérée comme une menace, mais elle doit être presentée comme telle : il s’agit d’une politique qui s’oppose aux intérêts des Etats-Unis, bien évidemment, mais ne peut aucunement être qualifié de menace par rapport à l’Europe.
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