Selon l'ancien diplomate américain Jim Jatras, pour rester dans la partie en Syrie, les Etats-Unis se montrent disposés à coopérer avec des groupes terroristes proches d'Al-Qaïda.
Après les attentats du 11 septembre 2001 perpétrés par Al-Qaïda, les Etats-Unis coopèrent avec le groupe terroriste comme ils l’ont fait en Libye, en Bosnie et au Kosovo, déclare Jim Jatras.
Un haut responsable du groupe rebelle syrien Ahrar Al-Sham qui entretient des liens avec Al-Qaïda se serait rendu aux Etats-Unis fin 2015, d’après un site d’information américain.
Le chef du groupe syrien, Labib al Nahhas, qui se fait appeler «chef des Affaires politiques étrangères d’Ahrar al-Sham», se serait rendu dans la capitale américaine pour une courte visite en décembre dernier.
[Les Etats-Unis] savent que s’ils ne coopèrent pas avec Al-Qaïda, ils n’ont aucune option en Syrie et ils devront accepter qu’Assad reste au pouvoir
RT : Que pensez-vous de la visite d’un des hauts responsables du groupe Ahrar Al-Sham aux Etats-Unis ? Que pensez-vous de la réponse assez vague qu’a donné département d’Etat interrogé à ce propos ?
Jim Jatras (J. J.): Ils font des claquettes. Honnêtement, le fait que ce type de personnes puisse rendre aux Etats-Unis met en doute leur crédibilité. Quoi, nous n’avons pas de contrôle des visas ? Nous ne faisons pas attention à qui entre dans notre pays depuis un pays en guerre ? Et ils veulent nous faire croire que les fonctionnaires du gouvernement américain ne savaient rien de cette visite ? Mark Toner a dit que le représentant [d'Ahrar Al-Sham] n’avait rencontré personne ici, au département d’Etat. J’en déduis qu’il a rencontré d’autres personnes, dans d’autres départements.
Si les Etats-Unis, l’administration Obama, avaient une politique rationnelle, nous ferions marche arrière
RT : Connaissez-vous la raison de cette visite aux Etats-Unis?
J. J. : Je pense qu’il s’agissait de réunions opérationnelles. Nous entendons de plus en plus parler d’un soi-disant Plan B, au cas où les gouvernements russe et syrien ne se soumettaient pas et n’acceptaient pas le départ d’Assad à la fin de la période de transition. Les Saoudiens et les Turcs nous menacent –et honnêtement, l’administration Obama les soutient – de faire gagner ces groupes terroristes si nous n’obtenons pas ce que nous voulons lors de la transition. Cela m’inquiète beaucoup… Ils vont soutenir d’avantage ces groupes terroristes. Et je pense qu’Ahrar Al-Sham est l’un des composants clés, en dépit de ses liens étroits avec Al-Qaïda et le Front Al-Nosra, ainsi que sa participation au massacre de Zarah.
RT : Pourquoi les fonctionnaires américains continuent de travailler avec ce groupe qui entretient des liens étroits avec Al-Qaïda, affirmant qu’ils ne sont pas des terroristes ? Pensez-vous que les Etats-Unis vont être, en quelque sorte, forcés de revenir sur leurs positions ou qu’ils vont s’obstiner ?
J. J. : Je pense qu’ils vont s’obstiner. Tout le monde le sait à Washington. Ils savent très bien qu’Ahrar Al-Sham et d’autres soi-disant groupes modérés sont étroitement liés au Front Al-Nosra et à Al-Qaïda. Et ils ne s’en éloignent pas car ils savent que s’ils ne coopèrent pas avec Al-Qaïda, ils n’ont aucune option en Syrie et ils devront accepter à la fois le fait qu’Assad reste au pouvoir et que les terroristes soient vaincus. Et ils ne peuvent pas l’accepter.
Toutes les preuves semblent suggérer que [les Etats-Unis] continuent de recevoir des ordres de Riyad, d’Ankara et des pays du Golfe qui veulent s’assurer de la victoire des terroristes
RT : Comme les preuves s’accumulent, n’est-il pas de plus en plus difficile pour les Etats-Unis de nier qu’il y a un lien entre Ahrar Al-Sham et Al-Qaïda ? Ne vont-ils pas devoir réévaluer leur position à un moment donné ?
J. J. : Non, je ne pense pas. Ils savent très bien qu’il y a un lien. Et ils savent aussi que la plupart des Américains n’y font pas du tout attention. Et nous y voilà : des années après les attentats du 11 septembre 2001 perpétrés par Al-Qaïda contre les Etats-Unis, nous coopérons avec Al-Qaïda comme nous l’avons fait en Libye, en Bosnie et au Kosovo. Ils s’en fichent tout simplement parce que la plupart des Américains s’en fichent.
RT : Donc, comment aboutir à des négociations de paix si, visiblement, ni la Russie ni Assad ne s’en fichent ?
J. J. : Je ne suis pas optimiste. Je ne le suis vraiment pas. Si les Etats-Unis, l’administration Obama, avaient une politique rationnelle, nous ferions marche arrière, nous repenserions notre politique mais les éléments démontrent tout le contraire. De temps en temps vous entendez quelqu’un dire : «Regardez, il y a un accord entre Moscou et Washington». Mais à mon avis, toutes les preuves semblent suggérer qu’ils [les Etats-Unis] continuent de recevoir des ordres de Riyad, d’Ankara et des pays du Golfe qui veulent s’assurer de la victoire des terroristes.
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