Le Super Tuesday est l'une des étapes clefs de la présidentielle américaine. A cette occasion, RT s'est entretenu avec plusieurs experts américains - Larry King, Rocky Anderson, Jesse Ventura - pour analyser les résultats.
«Quelque chose d’extraordinaire est en train de se produire dans la politique américaine… L’histoire de Sanders est incroyable et celle de Trump l’est également»
Découvrez l'opinion de Larry King, présentateur de l’émission Politicking de RT.
RT : L’année dernière le blog FiveThirtyEight a révélé que 46% de la couverture médiatique des candidats républicains étaient en lien avec Donald Trump. Les autres candidats, pourtant concurrents de taille, n’ont pas reçu une telle attention. D’après vous, quel a été le rôle des médias dans l’apparition du phénomène de Trump ?
Larry King : Il a été énorme. Les médias y ont contribué de manière extraordinaire, en lui assurant une couverture infinie. Il a un sacré caractère – je connais Donald très bien, depuis des années. C’est un personnage de télévision, un magnat de l’immobilier. Les médias ont fixé leurs caméras sur lui lors du premier débat des républicains, quand il s’en est pris à une correspondante, et puis à tout le monde, sur le plateau. Il a regardé Jeb Bush et lui a dit : «Tu n’as pas d’énergie». Ils ont eu des audiences énormes ! Comme a dit hier Leslie Moonves à l’occasion d’une conférence d’entreprises, «CBS frappe de la monnaie. Ce n’est peut-être pas bon pour le pays, mais c’est bon pour CBS». C’est leur façon de voir les choses.
Quelque chose d’extraordinaire est en train de se produire dans la politique américaine
Je traite de la sphère politique depuis longtemps. Je me rappelle la mort de Franklin Roosevelt – je me baladais dans les rues de Brooklyn à cette époque. C’était tellement triste. Je distribuais des tracts pour la campagne d’Harry Truman en 1948, qu’il a remporté face à John Dewey. Je me revois écouter la Convention républicaine en 1952, quand ils ont dû faire un vote supplémentaire à cause de Dwight Eisenhower et Robert Taft.
Ensuite, en 1960, j’ai commencé à couvrir les conventions. Je peux vous dire de mon expérience que je n’ai jamais, jamais, vu quelque chose comme ce qu’on a cette année. Il impossible à saisir, quelque chose d’extraordinaire est en train de se produire dans la politique américaine. C’est incroyable. L’histoire de Sanders est incroyable et celle de Trump l’est également…
Alors, il faut vous dire, si vous dirigez un média, et si Trump parle à un endroit et quelqu’un d’autre ailleurs, que vous allez vous diriger vers Trump. Car c’est lui qui attire les téléspectateurs. Je ne pense pas que ce soit la meilleure des choses, mais c’est comme ça.
Catch 22 : les médias américains refusent de s’intéresser aux messages de candidats de partis tiers
Les médias américains ne vont pas s’intéresser à votre message, à moins que vous ne bénéficiez du type de soutien qui mérite leur attention, a pu dire Rocky Anderson, ancien candidat à la présidence américaine.
Les candidats des deux partis sont un peu comme Dupond et Dupont sur nombre de questions
RT : Pourriez-vous nous parler de votre expérience de candidat d’un parti tiers ?
Rocky Anderson : Lorsque nous avons eu une couverture médiatique, nous avons eu beaucoup de soutien, car notre message était très semblable à celui de Bernie Sanders. Nous parlions d’une révolution politique. Nous avons parlé de l’influence corruptrice de l’argent au sein de notre système. Nous avions parlé de démantèlement des banques, qui sont «trop grandes pour faire faillite» et du fait que ceux qui ont créé ce désastre économique – non seulement dans notre pays, mais dans le monde entier – devaient être tenus responsables pour leur comportement illicite. Rien de cela n’a été fait. Et les gens ne devraient pas l’oublier.
Quand je me suis présenté en 2012 j’ai compris que les médias ne vont pas s’intéresser à votre message, à moins que vous ne bénéficiez du type de soutien qui mérite leur attention. Et nous constatons la même chose avec le débat présidentiel actuel. Ce sont les partis démocrate et républicain qui composent la Commission sur les débats présidentiels. Ils l’ont fait ainsi pour pouvoir tenir les autres hors de la scène. Comme c’était le cas la dernière fois en 2012, les candidats des deux partis sont un peu comme Dupond et Dupont sur nombre de questions, en particulier celles concernant notre économie et nos relations avec l'étranger.
Il n’y a pas beaucoup de différence notable entre eux. Cela ne sert pas le peuple américain et n’est certainement pas démocratique.
Selon ses propres mots, si Jesse Ventura se lançait dans la course présidentielle américaine de 2016, il en changerait complétement la dynamique.
L’ancien gouverneur de Minnesota et catcheur professionnel, Jesse Ventura a déclaré dans une interview avec Ed Schultz et Ameera David de RT America qu’il pensait à s’engager dans la campagne présidentielle, étant donné qu’il a déjà réussi à battre les deux partis principaux auparavant.
RT : Pensez-vous vraiment à plonger dans cet enfer électoral ?
Jesse Ventura : Oui, j’y réfléchis. Le parti libertarien et moi avons discuté à plusieurs reprises et leur convention aura lieu à la fin du mois de mai. Lors de l’élection précédente ils avaient, bien sûr, choisi l’ex-gouverneur du Nouveau-Mexique Gary Johnson, un type formidable plus ou moins expulsé du Parti républicain. Ils sont très intéressés à l’idée que je sois leur candidat. Je regarde comment les choses se déroulent dans les camps démocrate et républicain, et j’y vois la colère se développer. Et si ça se termine avec Clinton et non Trump, ou avec un autre candidat classique - ou même avec Trump, je pense que l'arrivée dans la course de Jesse Ventura changera complètement la donne.
Rubio, comment ose-t-il dire que je suis une «honte». Il devrait, lui, avoir honte – il est classé troisième
J’ai plutôt réussi en battant les deux partis à deux reprises par le passé. J’y réfléchis – ça pourrait être un bon moment. Je suis un guerrier. Et aujourd’hui je suis en colère, car Marco Rubio m’a qualifié de «honte». Et quand quelqu’un qui veut devenir «commandant en chef» traite de «honte» un vétéran du Vietnam – ça me dérange, énormément.
RT : Rubio prétend être le meilleur choix pour ce poste de commandant en chef à cause de son «expérience en politique étrangère», lui qui fréquente toutes les réunions du Comité des relations internationales…
Etant donné que vous avez gouverné avec succès l’Etat du Minnesota, comment avez-vous pris son commentaire vous qualifiant de «honte» ?
Jesse Ventura : Je pense qu’il a fait une erreur fatale vis-à-vis des gens du Minnesota, car ces gens ne me considèrent pas du tout comme une honte. Je me promène dans les rues, et tous les jours je les entends me dire : «Vous êtes le meilleur gouverneur qu’on ait jamais eu...»
Que sait-il [Rubio] de ce que j’ai accompli ? J’ai mis en place une ligne de train léger. La circulation de masse n’aurait pas eu lieu sans moi. J’ai entièrement réorganisé le système de l’impôt foncier. J’ai introduit des dégrèvements : pendant 3 ans des 4 [de mon mandat] les gens recevaient des chèques quand ils étaient surtaxés à cause d’une économie solide. Rubio, comment ose-t-il dire que je suis une «honte». Il devrait, lui, avoir honte – il est classé troisième.
RT : Les gens sont-ils fatigués du système bipartite ?
Jesse Ventura : Je trouve ça intéressant, quand vous entendez les républicains parler d’une «offre de partis tiers», alors que les deux partis ont fait tout ce qu’ils pouvaient pour détruire toute offre de partis tiers. Et je vais dire la chose suivante : Trump a fait attention à l’époque du Parti de la Réforme [lors de l’élection présidentielle de 2000, NDLR], lorsque les républicains ont envoyé Pat Buchahan se présenter pour ce parti et le détruire – ce qu’il a fait. Du coup, Trump fait aux républicains exactement la même chose qu’il a vu les républicains faire au Parti de la Réforme.
Les opinions, assertions et points de vue exprimés dans cette section sont le fait de leur auteur et ne peuvent en aucun cas être imputés à RT.