«Dans les deux camps, les gens rejettent le leadership de leur parti» estime Jill Stein, la candidate des Verts américains.
RT : Pourriez-vous s’il vous plaît décrire votre expérience dans la course à la présidentielle en tant que candidat d’un parti tiers ?
Dr. Jill Stein (J. S.) : Il s’agit d’un moment très excitant et très dynamique. Et ce dont le pays a besoin en ce moment ce n’est pas uniquement d'une campagne révolutionnaire, mais d’un parti politique révolutionnaire. Cela sera intéressant de voir ce qui va arriver aujourd’hui – mais selon les prévisions, les choses ne devraient pas très bien se passer pour Bernie Sanders. Cependant, il y a eu une grande manifestation de soutien en faveur de sa campagne, de même en faveur de celle de Trump. C’est intéressant de voir que, dans les deux partis politiques, les candidats qui obtiennent de bons résultats sont des candidats «outsiders». Les gens, dans les deux camps, rejettent le leadership de leur parti. Et si on regarde les sondages des électeurs américains, une grande partie des Etats-Unis rejette les candidats des partis démocrate comme républicain. Mais notre système politique étouffe toute opposition politique – je suis désolée de le dire. Donc les médias ont tendance de ne pas parler de nous. Mais, vous savez, la rébellion bat son plein et nous sommes peu à peu remarqués surtout par des jeunes, parce notre campagne est la seule qui va véritablement défier l’establishment. Nous allons sauver les jeunes comme d’autres ont sauvé les banquiers, comme ils ont sauvé Wall Street. Nous nous adressons à la jeune génération dans son ensemble, à 43 millions des jeunes. On sait que si ces 43 millions entendaient parler de notre campagne, s’ils venaient voter, ce serait suffisant pour remporter la course.
Nous avons dépensé 6 000 milliards de dollars ici, aux Etats-Unis, pour les guerres des quinze dernières années
RT : Les petits partis n’ont jamais gagné une élection aux Etats-Unis. Quels sont les problèmes auxquels de tels partis doivent faire face dans le processus électoral ?
J. S. : Je pense qu’on voit à présent ce qu’une personne doit traverser pour faire face à ces crises qui obligent réellement la population à faire d’immenses sacrifices ici, aux Etats-Unis, et dans une grande partie du monde. Nous sommes face à une inégalité économique incroyable, face à une crise environnementale, face à des guerres sans fin, en expansion permanente, qui nous mettent en faillite et génèrent davantage de terrorisme au lieu d’y mettre fin. Nous avons dépensé 6 000 milliards de dollars ici, aux Etats-Unis, pour ces guerres durant les quinze dernières années. La menace terroriste n’a fait que s’aggraver et la démocratie a été vendue aux grands prédateurs, aux banques prédatrices, aux profiteurs de Wall Street, aux géants des combustibles fossiles et au complexe militaro-industriel.
Afin de pouvoir résoudre ces problèmes, il faut sortir de l’emprise des partis politiques, eux-mêmes prisonniers de leurs grands contributeurs. Vous savez, j’ai vu le parti démocrate se vendre élection après élection. Il a ce qu’on appelle «un dispositif d’arrêt d’urgence» : il sabote ses candidats progressistes, ses rebelles. Cela leur tombe toujours dessus durant le «Super mardi», ces très importantes élections durant lesquelles les partis ont besoin de l’énorme soutien financier des entreprises pour se payer ces très chers spots publicitaires à la télévision. Le «Super mardi» est le jour durant lequel les candidats progressistes sont voués à échouer. Les super-délégués, qui sont des initiés des partis, font une campagne de diffamation qui sert à faire échouer les candidats. Cela a été le cas de, par exemple, Jesse Jackson, réformateur qui était appuyé par le mouvement des droits civiques : il avait remporté 12 primaires majeures du Midwest, puis sa candidature a été sabotée par une campagne de diffamation de la part du comité national démocrate. C’est un parti faussement de gauche, qui penche à droite tout en ayant recours à des arguments de gauche pour garder les gens. Il continue de pencher de plus en plus à droite, en devenant davantage corporatiste, davantage militariste, davantage impérialiste, et cela mène non seulement les Etats-Unis mais la communauté internationale toute entière au bord du gouffre. Il est très important que les citoyens, aux Etats-Unis et dans le reste du monde, se lèvent et insistent pour que l’on travaille pour eux. C’est en notre pouvoir.
Le parti démocrate a systématiquement fait échouer les candidats intègres, comme Bernie Sanders
RT : Pouvez-vous expliquer pourquoi quelqu’un comme vous a pu participer à la présidentielle en tant que candidat d’un parti tiers, sachant que les chances de remporter une telle course sont plus que faibles ?
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J. S. : Parce que dans l’histoire des Etats-Unis ont eu un impact important sur l’agenda politique, par exemple, le New Deal à l’époque de la Grande Dépression, la protection des travailleurs ou les droits des syndicats... Et tout cela est apparu à l’initiative de partis tiers. En outre, un parti tiers a remporté l’élection présidentielle une fois, lors d’une grande révolte sociale à l’époque de la Guerre civile : lorsqu’Abraham Lincoln a été élu, le parti républicain était un parti indépendant à l’époque. Il n’est donc pas impossible que cela se reproduise. Cependant, ce qui est impossible, c’est qu’un vrai et profond changement ait lieu dans un parti politique comme le parti démocrate, contrôlé par les banques, Wall Street, les géants des combustibles fossiles... Le parti a systématiquement fait échouer les candidats qui disposaient d’intégrité, comme Bernie Sanders. Il est à présent marginalisé par la machine du parti démocrate, par tous ceux qu’ils ont fait intervenir pour la campagne d’Hillary Clinton, par les grands contributeurs... Clinton obtient de grosses contributions, il échouera. Et il a déjà dit qu’il allait travailler pour Hillary Clinton. Donc, pour moi, cela veut dire qu’il ne peut pas y avoir de changement à l’intérieur du parti démocrate. Une fois marginalisé et éliminé de la course, les ressources du candidat et tout le dur travail mené pendant cette campagne progressiste est absorbé par ce parti contre-révolutionnaire et le mouvement disparaît. Vous ne pouvez pas construire, car vous ne pouvez pas réellement identifier l’ennemi. Les ennemis ne sont pas que des milliardaires, ce sont aussi les partis politiques qui travaillent en partenariat étroit avec des milliardaires.
RT : Ni Donald Trump ni Bernie Sanders n’ont été affiliés à des grands partis politiques avant l’élection. Certains disent que c’était une bonne chose. Pourquoi selon vous ont-ils décidé de rejoindre les deux plus grands partis ?
J. S. : Je pense que Donald Trump fait la promotion de sa propre marque - il n’est pas un représentant sérieux du peuple. Il est extrêmement hypocrite et brutal. Quant à Bernie Sanders, il a passé trop de temps à Washington, je pense qu’il a perdu sa perspective.
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