L’Iran vote : analyse

L’Iran vote : analyse© Morteza Nikoubazl Source: Reuters
Un homme dépose son bulletin de vote dans l’urne lors des élections législatives iraniennes le 2 mars 2012
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Les élections en Iran qui ont lieu aujourd'hui seront «quelque chose d'énorme», estime l'analyste en géopolitique Pepe Escobar.

Les élections iraniennes de cette semaine sont cruciales, car elles détermineront si une ouverture contrôlée de style persan, réalisée par le président Hassan Rohani et son premier ministre Javad Zarif, assurera la continuité, soutenue par un Majlis (parlement) favorable.

Non seulement les élections iraniennes mettent la lumière sur des acteurs politiques de premier plan, tels que le président du «dialogue des civilisations» [Mohammad] Khatami et le président immensément controversé [Mahmoud] Ahmadinejad ; les élections législatives, pour leur part, opposent un éventail de factions impliquées dans des alliances complexes quasiment opaques pour l’observateur extérieur.

Cette fois, sont en jeu : les affaires juteuses d’après accord nucléaire de Vienne et la fin des sanctions de l'ONU et de l'UE (des sanctions américaines importantes subsistant encore) et l'intégration progressive de l'Iran dans les nouvelles routes de la soie initiées par la Chine. La stratégie de l'Iran visant à récupérer des parts du marché mondial du pétrole, couplée à l'immense investissement nécessaire pour moderniser son industrie de l'énergie ; contrats après contrats conclus avec les partenaires européens (sans parler des partenaires asiatiques) ; l’entrée complète, et non partielle, de l'Iran sur les marchés de consommation mondiaux ; et dernier point mais pas le moindre – une chance d’être réélu pour Rohani lors du prochain scrutin présidentiel.

Alors, oubliez la désinformation occidentale proverbialement pathétique, en particulier l’habituelle diabolisation de tout ce qui est lié à l’Iran de la part des néo-conservateurs américains et des sionistes.

Voilà à quoi il faut faire attention pour ne pas perdre de vue ces élections.

Pas moins de 1 121 candidats se battent pour 30 sièges parlementaires

La participation est-elle importante ?

Oui. Lors des élections législatives de 2012, le taux de participation était de 64%. Plus il y a de gens à adhérer au système de Rohani, mieux c’est.

Les élections, comment ça marche ?

La règle du jeu, ce sont les «listes». A la tête de ces listes sont les personnages les plus populaires. Les électeurs font leur choix en grande partie en fonction de l’attrait de la tête de liste.

Y aura-t-il des candidats réformistes?

Quelques-uns, même si un bon nombre parmi les plus populaires ont été bannis. Le réformiste le plus influant, l’ancien président Khatami, n’a pas le droit de s’exprimer dans les médias officiels iraniens. Mais il a réalisé une vidéo déterminante, exhortant les électeurs à voter pour la liste réformiste.

Que se passe-t-il à Téhéran?

Quelque chose d’énorme : pas moins de 1 121 candidats se battent pour 30 sièges parlementaires.

Quels sont les favoris ?

Parmi les réformistes, c’est Mohammad Reza Aref, vice-président de Khatami de 2001 à 2005. Il ne s’est pas présenté aux élections présidentielles de 2013, suite à la suggestion de Khatami, ce qui a ouvert la voie à la victoire de Rohani. Il est fondamentalement modéré. Il y a aussi Kazem Jalali, membre d'une faction conservatrice, les partisans du Leadership.

Y at-il une sorte de front uni d'anti-traditionnalistes ?

Certainement. Il regroupe les réformistes (toutes sortes de partisans de Rohani et de Zarif), les conservateurs modérés (y compris le président du Parlement, l’influant Ali Larijani) et les adeptes du leadership mentionnés ci-dessus.

Qu'en est-il des conservateurs?

Gardez un oeil sur Gholam-Ali Haddad-Adel, conseiller principal du Guide de la Révolution Ali Khamenei ; sa fille est mariée avec le fils de Khamenei, Mojtaba, il dirige la liste conservatrice composée de 30 candidats.

Sont-ils tous conservateurs?

Pas vraiment. Leur liste comprend des durs - comme l'hodjatoleslam Morteza Agha-Tehrani (ancien conseiller de Ahmadinejad) et Esmail Kowsari (un membre clé de la Commission de la sécurité nationale et de la politique étrangère). Fait marquant : ils ne digèrent pas l'ouverture initiée par Rohani.

Est-ce que ces élections vont changer la politique étrangère de Rohani ?

Non.

Vont-ils interférer avec l'accord nucléaire de Vienne ?

Non.

Alors où est le problème ?

Les élections pour l'Assemblée des experts - parallèlement aux élections législatives.

Pourquoi ?

Parce que les 88 membres de l'Assemblée des experts, selon la Constitution iranienne, vont choisir le prochain Guide. Khamenei a 76 ans, son état de santé s’est amélioré, mais il y a une chance énorme que cette Assemblée – qui es élue pour huit ans – va finir par choisir le prochain leader.

ll est utile de rappeler que Rafsanjani – le conseiller le plus proche de l'ayatollah Khomeini – a joué un rôle décisif dans l’élection de Khamenei comme Guide suprême

Qui se présente ?

Il existe une liste de 16 membres réformateurs avec, en tête, un ayatollah notoire, Hashemi Rafsanjani, alias «Le Requin», nommé «l’expert du peuple».
La liste inclut le président lui-même, Rohani, ainsi que l'ancien ministre du renseignement de Rohani, Seyed Mahmoud Alavi.

Qui est hors course ?

Un autre favori, Hassan Khomeini, le petit-fils de l'ayatollah Khomeini. Il est très populaire en Iran. Les raisons de son exclusion sont assez troubles. Ce qui est intéressant c’est que les affiches de campagne pour cette liste montrent Rafsanjani, Khamenei, Rohani et Hassan Khomeini prier ensemble ; en termes iraniens, c’est comme les Rolling Stones en train de jouer Satisfaction.

Et qu'en est-il des conservateurs ?

En plein essor. Ils ont deux listes : l'une est présentée par la Société des enseignants des Séminaires de Qom, des membres du clergé très conservateurs. Ce qui est important c’est que les deux listes sont remplies des plus grands traditionnalistes - comme le président du Conseil des gardiens, l’ayatollah Jannati ; l’ayatollah Yazdi, de plus en plus dur ; et l'actuel chef de l'Assemblée et secrétaire de la Société des enseignants du Séminaire, Mohammad Yazdi. Et il y a même une troisième liste.

Que risque-t-il de se passer ?

Une bataille entre «Le Requin» Rafsandjani et les ultra traditionnalistes. Il est utile de rappeler que Rafsanjani – le conseiller le plus proche de l'ayatollah Khomeini – a joué un rôle décisif dans l’élection de Khamenei comme Guide suprême. Il a déjà présidé l'Assemblée des experts, de 2007 à 2011.

Que faire si les traditionnalistes gagnent ?

Ils vont en élire un en tant que prochain Guide suprême. Pas bon. Rafsandjani, dans ces circonstances, est un choix plus progressif, étant donné qu'il n'a jamais diabolisé les dirigeants du Mouvement Vert et affronte ouvertement les traditionnalistes.

Est-ce que le Leader Suprême s’est exprimé sur le sujet?

Non, il est censé jouer le rôle d'arbitre.

Et qu’en est-il des gardes de la révolution?

Ils privilégient un jusqu’au-boutiste ; quelqu'un qui ne pliera jamais face à Washington, Tel-Aviv et Riyad.

S’agit-il d’une étape importante pour l'Iran sur son chemin pour devenir la prochaine success story de l’économie mondiale ?

Bien sûr. Mais de préférence, dans un avenir proche, à la faveur d'un second mandat de Rohani et non pas avec un prochain Guide suprême qui ne prône pas une ligne trop dure.

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