Après le grave accident lors d'un essai thérapeutique dans un laboratoire de Rennes au terme duquel une personne a été déclarée en état de mort cérébrale et cinq autre ont été hospitalisées, RT France s'est entretenu avec le professeur Bernard Debré.
RT France : Pourquoi selon vous, ces expériences ont elles eu des conséquences aussi néfastes ? Les sujets qui se soumettent à ce genre d'expériences sont-elles suffisamment renseignées sur les possibles complications qu'elles peuvent entraîner ? La prévention devrait-elle être mieux organisée ?
Bernard Debré (B.D) : Il faut savoir que ce genre d'expérience est toujours très sécurisé et divisé en plusieurs phases. D'abord, il y a la phase 1 où le produit en question est testé sur des cellules, puis des rats ou d'autres animaux. Une fois que la phase 1 a été validée, on peut procéder à la phase 2, c'est à dire, tester le produit sur un nombre limité de personnes, en bonne santé et qui sont toutes informées de ce qu'elles font. Enfin, à la phase 3, le produit peut être testé sur plusieurs milliers de personnes avant validation définitive et mise sur le marché. On ne peut pas prévoir à l'avance des conséquences que ces expériences peuvent entraîner, aussi néfastes qu'elles puissent l'être parfois.
RT France : Pensez vous que l'utilisation d'un dérivé du cannabis devrait être mis en cause ?
(B.D) : Le cannabis ne peut pas être mis en cause en tout premier lieu car même si le cannabis est et reste un produit dangereux, de nombreux médicaments utilisés et vendus dans le commerce sont quand même à base de morphine qui est une substance beaucoup plus puissante et dangereuse que le cannabis ! Le problème provient manifestement du médicament lui-même. Pour déterminer toutes les causes de l'accident, il faut attendre les résultats des examens. Une prédisposition thérapeutique des sujets testés est également possible.
Ce sont malheureusement les aléas de la recherche scientifique et pharmaceutique.
RT France : Ce genre d'accident est-il courant en France ?
(B.D) : Absolument pas. Dans le cas de Rennes, il s'agit d'une expérience tout à fait légale et l'accident qui s'en est suivi est extrêmement rare et exceptionnel. Ce genre d'accident n'arrive jamais en France car les mesures de prévention y sont extrêmement importantes. Cela peut arriver plus fréquemment dans des pays du tiers-monde où le nombre de sujets volontaires est nettement plus important en raison de la rémunération de ces tests. Il peut alors arriver que les phases de tests ne soient pas respectées et que les laboratoires procèdent aux expériences directement sur des humains, ce qui est tout à fait impossible dans un pays comme la France.
RT France : Qu'est-ce que risque le laboratoire à l'origine de ces expériences à la suite d'un tel accident thérapeutique ? Quelles seront selon vous les conséquences sur l'industrie pharmaceutique en France ?
(B.D) : L'expérience étant tout à fait légale et encadrée par des professionnels. L'Etat est entièrement au courant du déroulé de la procédure et le laboratoire ne peut pas être poursuivi. C'est un laboratoire qui effectue 80% des tests pharmaceutiques en France et il n'y a jamais eu aucun accident de ce genre. il faut maintenant attendre les résultats de l'enquête pour savoir ce qui a pu entraîner un tel accident. Ces expériences sont necéssaires pour le développement pharmaceutique et il ne peut y avoir non plus de conséquences sur l'industrie pharmaceutique puisque toutes les conditions ont été respectées et que le produit a passé la phase 1. Il s'agit d'un accident tragique, mais extrêmement rare et exceptionnel. Ce sont malheureusement les aléas de la recherche scientifique et pharmaceutique.
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