Législatives : que reste-t-il de la démocratie en France ?

Législatives : que reste-t-il de la démocratie en France ? Source: AFP
Gabriel Attal a subi un revers... mais seulement de façade, soutient Karine Bechet-Golovko.
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Emmanuel Macron a, selon Karine Bechet-Golovko, atteint son but à l'issue de la dissolution : son clan pourra continuer comme si de rien n'était. Analyse.

Les résultats des élections législatives provoquées par Macron sont tombés et le but est atteint : le clan globaliste macronien va pouvoir continuer comme avant, comme si de rien n’était, comme si les Français ne les avaient pas rejetés. Et tel était bien le but. Mais que reste-t-il de la démocratie en France alors ?

Un système de gouvernance est démocratique, quand les gouvernants représentent la majorité de la population. Selon les résultats officiels, l’étrange coalition tactique de la gauche globaliste constituée autour de Mélenchon arrive en tête avec 178 sièges, les macronistes tombent à 150 sièges et le RN monte à 143.

On pourrait dès lors penser que si telle est la volonté populaire, le RN a simplement revendiqué un peu trop vite, à l'issue du premier tour, la victoire et sa volonté de gouverner. Certes. Cela serait possible, si l’on ne tenait pas compte du nombre d’électeurs. Si l’on compte les voix reçues par les candidats RN et ceux de l’alliance faite avec Eric Ciotti, on arrive à plus de 10 millions de citoyens français. 10 millions. 10 millions de citoyens qualifiés d’extrémistes et rejetés au ban de la bonne société politique. 10 millions, c’est plus que le nombre d’électeurs ayant voté pour les coalitions mélenchoniste et macroniste. Le pot-pourri des gauches et extrême gauche a reçu en gros 7 millions, et les macronistes dits centristes quelque 6,3 millions.

La volonté populaire neutralisée

Donc, institutionnellement, le système électoral est organisé pour neutraliser la volonté populaire. C’est bien ce que l’on appelle la post-démocratie, qui n’est plus de la démocratie.

Il faut tout d’abord rappeler que nous ne votons pas aux législatives pour une personne, mais pour quelques centaines. Et à chaque fois, le résultat du vote va dépendre de la configuration des candidats en lice. Ici, tout d’abord, la stratégie du désistement et l’accord tacite conclu entre les macronistes et les mélenchonistes, soi-disant d’opposition, contre le RN, a fortement joué. Ensuite, au deuxième tour, on ne retient pas les deux premiers candidats désormais, ce qui permettrait de dégager une majorité stable à l’Assemblée nationale en structurant le paysage politique. Pour qu’un candidat puisse rester au deuxième tour, il doit avoir obtenu au moins 12,5% des voix, ce qui ouvre la possibilité à des triangulaires et permet d’atomiser le paysage politique français, tout en affaiblissant considérablement l’Assemblée. Cette règle est fondamentale pour le pouvoir en place, lorsque celui-ci ne s’appuie pas sur un parti traditionnel, structuré et fort, comme c’est le cas pour Macron. La devise «diviser pour mieux régner» trouve ici tout son sens.

La démission d'Attal déjà refusée par Macron

Toujours est-il que la situation devient particulièrement glissante. Car comment former un gouvernement et comment gouverner avec une Assemblée aussi fracturée ? Cela va constituer une véritable épreuve de force pour le pouvoir, surtout en rejetant aussi ouvertement le message de 10 millions de Français. Il est déjà annoncé par Séjourné que l'agenda intérieur et extérieur ne changera pas. Macron a même rejeté la démission présentée par Attal... en attendant «la structuration de l’Assemblée». Combien de temps va durer cette étrange transition, qui le sait ? C’est une première dans le système français, en tout cas. Et les résultats de Ensemble, bien meilleurs que prévus, soulèvent beaucoup de questions. Notamment, en ce qui concerne l'utilisation du record historique des procurations de vote et des algorithmes du vote électronique. Mais dans un cas comme dans l'autre, cela est invérifiable. Et c'est bien tout l'intérêt de ces méthodes «innovantes» à l'heure de la post-démocratie.

Mélenchon, de son côté, s’imaginait un peu vite à Matignon. Intransigeant, il refusait toute négociation et voulait récupérer les avantages des votes procurés par les Verts et les Socialistes, qui le calment en refusant de reconnaître sa primauté. La coalition n’a pas encore compté tous ses sièges, qu’elle explose déjà en vol. Séjourné a appelé les non-mélenchonistes à rejoindre le gouvernement, mais sans le héros médiatique et ses acolytes. Ici comme en Grande-Bretagne, la fausse gauche, bobo et globaliste, sert le système idéologique en place profondément antisocial en captant et nullifiant le vote social, surtout en période de crise socio-économique, inhérente au modèle néolibéral.

Le RN, enfin, continue à jouer le rôle d'épouvantail qui lui est dévolu dans la vie politique française : en criant bien fort à la lutte contre l'extrême droite, la véritable extrême gauche globaliste peut rester au pouvoir. Pourtant, il s’appuie sur un électorat de plus en plus important qui, malgré la propagande intrusive et massive, rejette le système globaliste néolibéral. C’est l’électorat, bien plus que le parti, qui fait peur, car ses membres sont somme toute bien alignés. En revanche, le deuxième rôle fondamental pour le système joué par le RN est la captation de l’opposition de droite, qui pourrait sinon se retourner vers de véritables figures d’opposition non pas politique (c’est-à-dire des figures, qui restent à l’intérieur du même paradigme idéologique de la globalisation néolibérale), mais idéologique (donc de figures qui veulent sortir de ce paradigme), comme par exemple Florian Philippot.

Dans tous les cas, constituer un gouvernement avec cette Assemblée va être une véritable gageure. Mais pourquoi Macron devrait-il se presser, alors qu’Attal est là pour faire en sorte que le cours néolibéral qui détruit la France ne change pas ? Il sera même possible d’introduire quelques éléments de la gauche globaliste, ce qui permettra d’aller encore plus loin dans la dilution du pays.

En marche vers la révolution ?

Nous entrons dans une période d’instabilité politique profonde, puisque le système de gouvernance refuse le résultat du vote populaire en déniant la majorité des sièges à l’Assemblée nationale au parti qui obtient le plus de vote ; en rejetant de la gouvernance les partis qui ne conviennent pas, quels que soient leurs résultats électoraux ; en rejetant de la société politique 10 millions de citoyens français qui osent exprimer leur mécontentement de la gouvernance néolibérale actuelle et vouloir que les choses changent.

Ce pouvoir globaliste, qui s’est emparé de la France, oublie les leçons de l’histoire : quand le peuple ne peut pas s’exprimer par l’intermédiaire de ses représentants, c’est-à-dire quand il ne se sent pas représenté, il prend lui-même le pouvoir. Dans la rue. Par la violence. Et il change alors radicalement le système. Cela s’appelle une révolution.

Macron et ses tuteurs globalistes conduisent la France non seulement au bord du chaos, mais sur le chemin de la révolte populaire. Il n’est pas certain que les JO puissent éteindre le feu, alors que tant d’électeurs de part et d’autre se sentent dépouillés. Quand les élites dirigeantes se conduisent sur le mode bien connu de «après moi le déluge», en général le déluge les emporte. Les élites globalistes en France peuvent un temps s’arc-bouter contre la volonté populaire, aucune zone de sécurité renforcée autour de l’Élysée ne changera le cours de l’histoire.

 

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