Cybercrime : début à Paris du procès en appel du Russe Vinnik pour blanchiment d'extorsions
Réclamé par les Etats-Unis où il risque 55 ans de prison, l’informaticien russe Alexandre Vinnik est jugé en appel en France pour blanchiment d’extorsions via des crypto-monnaies. En première instance il a été lavé de 13 accusations sur 14.
Le procès en appel du citoyen russe Alexandre Vinnik s’ouvre aujourd’hui 18 mai à Paris. En décembre, le tribunal correctionnel a relaxé en première instance celui que l'accusation décrivait comme un «pirate d'envergure internationale» de 13 des 14 infractions pour lesquelles il était jugé.
Le parquet, qui a fait appel de la décision du tribunal, avait requis 10 ans de prison à l'encontre d’Alexandre Vinnik, âgé de 41 ans. Pendant le procès, le parquet s'est dit convaincu que le prévenu, était le «chef d'orchestre» du rançongiciel Locky qui aurait fait entre 2016 et 2018 près de 200 victimes françaises – environ 5 700 dans le monde – et aurait occasionné un préjudice estimé en 2018 à près de 135 millions d'euros.
Alexandre Vinnik a été condamné à cinq ans de prison pour le blanchiment des sommes issues d’extorsions via le logiciel Locky et à 100 000 euros d'amende, bien moins que l'amende maximale de 750 000 euros requise par le parquet. Il a de son côté fait appel de cette condamnation.
Tout au long du procès, il a répété qu'il n'avait «rien à voir avec ce virus» et s'est présenté comme «simple opérateur freelance» de la plateforme d’achat de cryptomonnaie BTC-e, aujourd’hui fermée et via laquelle des rançons auraient été payées.
Me Frédéric Bélot, un des avocats d’Alexandre Vinnik, a confié que son client était «inquiet», mais attendait ce procès en appel «pour que la lumière soit faite sur son innocence». Cité par l’agence Tass depuis Moscou, le défenseur des droits de l’Homme Tatiana Moskalkova a déclaré aux journalistes que les «pronostics [n’étaient] pas optimistes».
Arrêté à la plage et sans mandat
Alexander Vinnik, a d’abord été arrêté à la demande de la justice américaine au cours de l’été 2017, alors qu’il était en vacances dans la péninsule du Chalcidique, en Grèce, avec sa femme et son fils et sans qu’aucun mandat d’arrêt international n’ait été émis contre lui. Aux Etats-Unis, il est accusé de blanchiment de cybercrime pour un montant de 4 à 9 milliards de dollars et risque jusqu’à 55 ans de prison.
Son extradition a depuis été demandée par la Russie, pour une affaire d'escroquerie mineure, puis par la France vers juin 2018, soit plus d’un an après son arrestation à la demande des Etats-Unis. En attentant la décision finale des autorités judiciaires grecques concernant les trois demandes d’extradition, Alexander Vinnik a été détenu près de 18 mois en Grèce sans procès et sans qu’aucune charge ne pèse contre lui dans ce pays.
Le 23 janvier 2020, Alexandre Vinnik a finalement été livré à la France. Quelque jours plus tard, Zoé Konstantopoulou, avocate spécialiste des droits de l’Homme enregistrée en Grèce et aux Etats-Unis, a décrit, lors d’une conférence de presse à Paris, cette affaire comme la «persécution d’une personne qui n’a absolument aucune activité criminelle, mais qui a quand même commis le crime d’avoir une connaissance […] très rare dans la technologie blockchain, qui permet la création de monnaie électronique […] qui l’a transformée en personne très, très voulue [par la Justice] aux Etats-Unis et en France».