Rapporteur de l'ONU : les sanctions contre le Venezuela «affectent considérablement» le peuple
Après un séjour au Venezuela, le Rapporteur spécial des Nations unies sur l'impact négatif des sanctions sur les droits humains a appelé les Etats-Unis et l'UE à la levée des sanctions qui «affectent considérablement la population», selon elle.
«Les sanctions unilatérales contre le Venezuela affectent considérablement les droits du peuple vénézuélien et devront être levées» : c'est le constat sans appel dressé par Alena Douhan, rapporteur spécial sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l'exercice des droits de l'homme.
Unilateral sanctions on Venezuela drastically affect rights of Venezuelan people and shall be lifted: findings, conclusions and recommendations of the country visit of 1-12 February https://t.co/r77bBmen5M
— Alena Douhan (@AlenaDouhan) February 13, 2021
A l'issue d'une visite du pays latino-américain du 1er au 12 février, l'envoyée de l'ONU a déclaré que les sanctions des Etats-Unis et de l'Union européenne contre le Venezuela aggravaient la crise humanitaire. Alena Douhan recommande en conséquence aux Etats-Unis de lever les mesures coercitives unilatérales, un argument que l'opposition du pays menée par Juan Guaido a qualifié de «propagande du régime».
Les sanctions ont «exacerbé les calamités»
Dans son rapport préliminaire publié après son voyage de 12 jours, Alena Douhan a non seulement recommandé que les sanctions soient levées, mais aussi que le gouvernement vénézuélien ait accès aux fonds gelés aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et au Portugal.
Depuis 2017 et l'arrivée au pouvoir de l'administration Trump, les Etats-Unis et l'UE ont infligé au Venezuela une longue série de sanctions qu'ils n'ont cessé de renforcer pour tenter d'évincer le président Nicolas Maduro du pouvoir. Mais les mesures contre les responsables vénézuéliens avaient commencé à être imposées dès 2014, sous la présidence de Barack Obama.
Alors que le pétrole est la principale ressource du pays, les Etats-Unis ont décidé de placer la compagnie nationale pétrolière PDVSA sur liste noire en 2019, mettant à genoux l'économie vénézuélienne. Le gouvernement de Maduro attribue ainsi les problèmes économiques du Venezuela à ces mesures contraignantes qu'il qualifie de «spoliatrices».
«Les sanctions unilatérales de plus en plus imposées par les Etats-Unis, l'Union européenne et d'autres pays ont exacerbé les calamités», a déclaré Alena Douhan aux journalistes, lors d'une conférence de presse à Caracas. Elle a néanmoins souligné que le déclin économique du pays «avait commencé en 2014 avec la baisse des prix du pétrole et que la mauvaise gestion et la corruption y avaient également contribué», selon Reuters.
L'opposition du Venezuela, menée par Juan Guaido, et des responsables des Etats-Unis estiment pour leur part que l'effondrement économique du pays a commencé avant la mise en place de sanctions économiques et soutiennent que celles-ci sont justifiées dans la mesure où le gouvernement de Maduro n'utiliserait probablement pas les ressources gelées pour soulager les souffrances des Vénézuéliens. «Nous regrettons les imprécisions du rapporteur et le manque de mention de sujets tels que la corruption, l'inefficacité, la violence politique et l'utilisation de la faim comme outil de contrôle social et politique», a écrit Miguel Pizarro, envoyé du chef de l'opposition Juan Guaido aux Nations Unies, sur Twitter. «Cela correspond à la propagande du régime», a-t-il ajouté.
Les conclusions de l'envoyée de l'ONU font pourtant écho à une étude publiée en mai 2019, par le Centre de recherche économique et politique (CEPR, basé à Londres), dans lequel les analystes estimaient que les sanctions économiques contre le Venezuela étaient responsables de dizaines de milliers de morts et évaluaient à 40 000 le nombre de décès liés à ces sanctions rien qu'entre 2017 et 2018. «Les sanctions privent les Vénézuéliens de médicaments vitaux, de matériel médical, de nourriture et d'autres biens essentiels importés», expliquait ainsi Mark Weisbrot, co-directeur du CEPR et co-auteur du rapport.
Meriem Laribi