Désengagement américain en Syrie : Donald Trump assure qu'il n'a pas «abandonné» les Kurdes
En annonçant un retrait de troupes américaines de Syrie, alors que la Turquie s'apprête à y intervenir, Donald Trump a suscité une levée de bouclier, y compris à l'étranger. Il a par la suite tenu à réaffirmer le soutien de Washington aux Kurdes.
Donald Trump a assuré le 8 octobre qu'il n'avait pas «abandonné» les Kurdes, ces «magnifiques combattants». «Nous sommes en train de quitter la Syrie mais nous n'avons absolument pas abandonné les Kurdes qui sont des gens formidables et de merveilleux combattants», a tweeté le président américain, précisant : «Nous aidons les Kurdes financièrement [et en leur fournissant des] armes», a-t-il ajouté.
We may be in the process of leaving Syria, but in no way have we Abandoned the Kurds, who are special people and wonderful fighters. Likewise our relationship with Turkey, a NATO and Trading partner, has been very good. Turkey already has a large Kurdish population and fully....
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) October 8, 2019
Ces déclarations sur Twitter font suite au tollé soulevé par la double annonce américaine du retrait de troupes du nord de la Syrie et de la décision de laisser la Turquie intervenir en Syrie.
Le 6 octobre, la Maison Blanche avait annoncé dans un communiqué que la Turquie s'apprêtait à «mettre en œuvre son opération [militaire] prévue de longue date dans le nord de la Syrie». Dans ce communiqué, Washington affirmait également que les forces militaires américaines ne seraient pas dans la zone d'opération de l'armée turque.
Et le 7 octobre, Donald Trump avait fait part de son souhait de retirer des troupes américaines de Syrie, notamment à cause du coût que cela faisait peser sur l'économie américaine. Il avait ainsi affirmé : «Les Kurdes se sont battus avec nous, mais ont reçu une somme énorme d'argent et d'équipement pour le faire. Ils combattent la Turquie depuis des décennies [...]. Il est temps pour nous de sortir de ces guerres ridicules et sans fin, dont beaucoup sont tribales.»
....almost 3 years, but it is time for us to get out of these ridiculous Endless Wars, many of them tribal, and bring our soldiers home. WE WILL FIGHT WHERE IT IS TO OUR BENEFIT, AND ONLY FIGHT TO WIN. Turkey, Europe, Syria, Iran, Iraq, Russia and the Kurds will now have to.....
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) October 7, 2019
Une volonté de désengagement américain qui ne passe pas
La classe politique américaine avait vivement réagi à ces annonces de désengagement américain – jusqu'au sein du camp républicain. Lindsey Graham, sénateur proche de l'administration en place, avait ainsi appelé le chef d'Etat américain à «revenir» sur sa «décision» de retirer des troupes de Syrie. Selon lui, «si ce plan est appliqué, j'introduirai une résolution au Sénat demandant à ce que l'on revienne sur cette décision. Je m'attends à ce qu'elle soit largement soutenue par les deux partis», avait prévenu l'élu républicain dans un tweet.
* Ensures ISIS comeback.
— Lindsey Graham (@LindseyGrahamSC) October 7, 2019
* Forces Kurds to align with Assad and Iran.
* Destroys Turkey’s relationship with U.S. Congress.
* Will be a stain on America’s honor for abandoning the Kurds.
De même, le chef de file des républicains au Sénat américain, Mitch McConnell, avait annoncé qu'un retrait de la Syrie ne «pourrait que profiter» à la Russie, à l'Iran et au gouvernement syrien. Nikki Haley, ancienne ambassadrice des Etats-Unis à l'ONU, a estimé : «Les Kurdes ont joué un rôle crucial dans notre combat couronné de succès contre l'EI en Syrie. Les laisser mourir est une énorme erreur.»
Hors des Etats-Unis, Londres s'est déclaré «profondément préoccupé» par l'intervention militaire prévue par la Turquie en Syrie, avertissant qu'une «action unilatérale» pourrait «déstabiliser la région», dans une déclaration rapportée par l'AFP. La porte-parole du ministère français des Affaires étrangères a appelé «la Turquie à éviter une initiative qui irait à l'encontre des intérêts de la Coalition globale contre Daech dont elle fait partie.» La ministre des Armées, Florence Parly, a également fait état de craintes sur le fait que le retrait américain conduise à «renforcer plutôt qu'à éradiquer» l'organisation terroriste Daesh dans la région, selon des propos transmis par l'AFP.
Les Kurdes ont également regretté la décision américaine de retirer leurs troupes du nord de la Syrie. Mustafa Bali, directeur du bureau de presse des Forces démocratiques syriennes (FDS) dans le nord de la Syrie, a déploré la décision de Donald Trump de «paver la voie à l'invasion turque». Néanmoins, il a tenu à affirmer : «Les Américains sont de vrais amis pour les FDS.»
Enfin, sur leur compte Twitter, les Unités de protection du peuple (YPG), le fer de lance des Forces démocratiques syriennes (FDS), ont affirmé que la surveillance des prisonniers de Daesh était devenue une «priorité de second ordre», alors que les Etats-Unis avaient «ouvert la voie à un assaut turc». Pour eux, la décision de Donald Trump «va surement coûter des vies de combattants qui ont bataillé aux côtés des soldats américains [face à] Daesh».
"Watching over the ISIS prisoners locked up in Syria is a second priority now that the U.S. has cleared the way for a Turkish assault likely targeting the mostly #Kurdish forces along the border."
— Rojava Defense Units (@DefenseUnits) October 8, 2019