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Crise entre Washington et Téhéran : Donald Trump persiste dans la stratégie du «fou»

Entre menaces et apaisement, le président américain ne cesse depuis son élection d'alterner les déclarations contradictoires à l'égard de l'Iran. Ce discours, déstabilisant, est la marque de fabrique de son approche des relations internationales.

Dans le dossier iranien comme dans d'autres – la Corée du Nord ou encore les relations entre Washington et ses alliés au sein de l'OTAN – Donald Trump continue de se montrer déstabilisant.

Alternant sans complexe les déclarations contradictoires, tour à tour incendiaires et plus conciliantes, le président des Etats-Unis s'est montré optimiste quant à une résolution de la crise avec l'Iran.

Avec une stratégie sans doute assumée qui ressemble fort à la madman theory (théorie du fou en français), Donald Trump a assuré le 27 mai que la diplomatie étasunienne ne cherchait pas à renverser le gouvernement iranien. «Nous ne cherchons pas un changement de régime [à Téhéran], je veux que cela soit clair», a-t-il affirmé à l'occasion d'une visite au Japon. «Ce que nous voulons, c'est l'absence d'armes nucléaires. Je ne veux absolument pas nuire à l'Iran», a ajouté le dirigeant américain, à l'issue d'un sommet avec le Premier ministre japonais Shinzo Abe, estimant même pouvoir «parvenir à un accord».

Ces déclarations font suite à une montée de la tension dans le golfe Persique, notamment au cours des dernières semaines. Alors que Donald Trump assurait déjà que les Etats-Unis ne cherchaient pas «la guerre avec le régime iranien», le Pentagone déployait début mai un porte-avions ainsi que des bombardiers B-52 dans la région, puis un navire de guerre et une batterie de missiles Patriot en renfort, avec pour justification, sans plus de précisions, «des indications inquiétantes d'escalade et de mises en garde».

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Le «régime» de Téhéran bel et bien dans le collimateur de Washington

Le 19 mai, énième mouvement de balancier, le président américain s'était fait plus menaçant. «Si l'Iran veut se battre, ce sera la fin officielle de l'Iran», avait-il fulminé.

De son côté Téhéran s'était aussi défendu de vouloir une guerre autre que défensive. «La différence entre nous et [les Américains], c'est qu'ils ont peur de la guerre», avait défié le général Hossein Salami, commandant du corps des Gardiens de la Révolution islamique (GRI).

Pour autant, les Etats-Unis ont bel et bien exprimé par le passé le souhait de voir le «régime» iranien tomber. Fin 2017, alors que l'Iran était le théâtre de manifestations contre le coût de la vie, Donald Trump n'avait pas hésité à souffler sur les braises et à s'ingérer dans les affaires intérieures de l'Iran. «Le monde entier comprend que le bon peuple d'Iran veut un changement et qu'à part le vaste pouvoir militaire des Etats-Unis, le peuple iranien est ce que ses dirigeants craignent le plus», avait-il alors martelé. Se faisant plus clair, le président américain avait promis en janvier 2018 «un grand soutien de la part des Etats-Unis le moment venu».

Autre signal fort qui n'avait pas échappé à l'attention de Téhéran, le «faucon» Mike Pompeo succédait au secrétaire d'Etat Rex Tillerson en avril 2018, annonçant un tournant beaucoup plus interventionniste de la diplomatie américaine que ne le laissaient présager les déclarations plus pacifistes d'un Donald Trump candidat à la Maison Blanche. En 2014, Mike Pompeo suggérait l'usage de la force contre Téhéran. «Selon une estimation déclassifiée, il faudrait moins de 2 000 [frappes aériennes] pour détruire les capacités nucléaires de l'Iran», déclarait-il alors qu'il était représentant du Kansas au Congrès. Et d'ajouter, cité par la Jewish Telegraphic Agency : «Ce n'est pas une tâche insurmontable pour les forces de la coalition.»

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Brandir le pire, une stratégie déjà mise en œuvre avec la Corée du Nord

Le parallèle avec la gestion de la crise nord-coréenne par Donald Trump est d'ailleurs instructif. Ce même 27 mai à Tokyo, le président américain – premier dirigeant à rencontrer le nouvel empereur du Japon Naruhito, s'est ainsi félicité de sa relation avec Kim Jong-un, vantant «l'intelligence» du président nord-coréen et saluant «un grand respect entre les Etats-Unis et la Corée du Nord».

C'est oublier, là aussi, que la tension était montée entre les deux pays au point, à l'automne 2017, de faire craindre un conflit nucléaire. Donald Trump et Kim Jong-un se traitaient alors qui de «fou», qui de «gâteux» ou de «chien dérangé»... Ce 26 mai, Donald Trump a fait part de sa «confiance» envers son homologue, malgré de nouveaux tirs de missiles nords-coréens. «La Corée du Nord a lancé quelques petites armes, ce qui a dérangé certains dans mon pays et d'autres, mais pas moi», a-t-il estimé. Très sérieusement.

Alexandre Keller

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