Accusée d'antisémitisme par Israël, la Pologne enterre un sommet de Visegrad prévu à Jérusalem
Après des propos polémiques du chef de la diplomatie israélienne au sujet d'un antisémitisme supposément intrinsèque à la Pologne, Varsovie a retiré sa participation à un sommet du groupe de Visegrad prévu en Israël, annulant de fait la réunion.
Les relations diplomatiques entre Varsovie et Tel Aviv ne sont pas au beau fixe. La Pologne a en effet annulé sa participation au sommet du groupe de Visegrad (V4) qui devait se tenir en Israël, après une déclaration du ministre israélien des Affaires étrangères concernant l'antisémitisme supposé des Polonais. Le sommet, prévu ce 18 février, a finalement été reporté et remplacé par des discussions bilatérales.
Le Premier ministre tchèque, Andrej Babis, a ainsi annoncé que le sommet qui devait réunir quatre pays de l'Est de l'Europe – Hongrie, Pologne, Slovaquie et République Tchèque – à Jérusalem, était repoussé en deuxième partie d'année. Le V4 avait été invité par Benjamin Netanyahou à se réunir à ses côtés à Jérusalem.
Deux polémiques coup sur coup déclenchées par les dirigeants israéliens
Deux controverses coup sur coup ont eu raison de cette rencontre sur la rive sud de la Méditerranée. Le 14 février, lors d'une conférence sur les questions de sécurité et de défense à Varsovie, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, avait allumé la mèche.
Des journalistes du Jerusalem Post, de Haaretz et du The Times of Israel ont rapporté des propos dans lesquels il évoquait la «collaboration» et la «coopération» des Polonais avec des nazis au cours de la Shoah. Dès le lendemain, Tel Aviv les a attribués à une erreur des médias pour dédouaner le chef de l'exécutif. Les propos polémiques ont été en outre démentis par l'ambassade d'Israël. Mais le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, courroucé, a informé le 17 février qu'il serait remplacé par son ministre des Affaires étrangères à la réunion du groupe de Visegrad.
Les Polonais tètent l'antisémitisme au sein de leur mère
Invité à réagir à cette première polémique sur la chaîne de télévision i24 News, le nouveau chef de la diplomatie de l'Etat hébreu nommé le jour même, Israël Katz, a précipité la crise entre les deux pays. Au lieu de chercher à désamorcer la controverse, il a au contraire confirmé que, selon lui, de nombreux Polonais avaient collaboré avec les nazis. Il a repris les propos de l'ancien Premier ministre israélien Yitzhak Shamir : «Les Polonais tètent l'antisémitisme au sein de leur mère.»
Le chef du gouvernement polonais a fait savoir le lendemain : «Nous attendons une réaction ferme aux paroles impardonnables et simplement racistes du nouveau ministre des Affaires étrangères d'Israël, c'est quelque chose qui ne peut pas être laissé sans réaction.» Lançant un ultimatum, il a prévenu que sans excuses, le ministre des Affaires étrangères ne serait pas dépêché aux réunions du V4, provoquant par là même l'annulation du sommet.
Cette nouvelle tension dans les relations diplomatiques entre la Pologne et Israël fait écho à une crise survenue en 2018 en raison d'une loi polonaise controversée, perçue en Israël et aux Etats-Unis comme une tentative implicite d'empêcher les survivants de l'Holocauste d'évoquer les crimes de Polonais à leur égard. La Pologne a fini par amender cette loi, destinée, selon elle, à défendre l'image du pays et des Polonais pendant la Seconde guerre mondiale.
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