Faute de candidats, l'Allemagne envisage de recruter des étrangers dans son armée
Peut-on intégrer l'armée d'un pays dont on ne possède pas la nationalité ? En Allemagne, cela pourrait bientôt devenir possible pour les ressortissants de l'Union européenne. Une perspective accueillie de façon mitigée par plusieurs Etats membres.
L'armée allemande doit-elle être composée uniquement d'Allemands ? C'est la question que se pose Berlin, qui envisage sérieusement de faire appel à des recrues étrangères – ressortissants d'autres Etats membres de l'Union européenne (UE) – pour pallier le manque de recrues dont souffre la Bundeswehr.
En cause : une pénurie de candidats qualifiés parmi la population allemande. A l'heure de l'armée européenne proposée par Emmanuel Macron et des discussions autour d'un siège unique de l'UE au Conseil de sécurité de l'ONU, l'initiative la plus osée pourrait ainsi provenir de l'autre côté du Rhin.
Beaucoup de soldats [ont déjà] des origines étrangères ou la double nationalité
Alors que l'armée du pays «a besoin de personnel», le chef d'Etat-Major de la Bundeswehr, Eberhart Zorn, a affirmé au groupe de journaux régionaux Funke Mediengruppe qu'il devait désormais «regarder dans toutes les directions en période de pénurie de travailleurs qualifiés». Selon lui, le recrutement de profils de spécialistes étrangers européens, comme des médecins ou des ingénieurs, constitue «une option» envisagée par l'armée allemande. Le ministère de la Défense allemande a également confirmé ces informations.
Une réforme de la Constitution nécessaire
Cette perspective a également reçu l'approbation du commissaire parlementaire des forces armées allemandes, le social-démocrate Hans-Peter Bartels, qui a rappelé que «beaucoup de soldats» allemands avaient déjà «des origines étrangères ou la double nationalité». Il a également relevé que cette réforme du recrutement ne serait pas «une exception» puisqu'il y a «déjà depuis longtemps des citoyens européens qui travaillent dans la police allemande».
Pour pouvoir recruter hors de ses frontières, l'armée allemande devra néanmoins procéder à une modification du texte constitutionnel. Selon la Loi fondamentale de la République fédérale d'Allemagne, un soldat opérant pour la Bundeswehr doit en effet posséder la nationalité allemande. Mais les 27 accepteront-ils que leur ressortissants intègrent l'armée d'un pays étranger ? Selon le groupe de médias allemands, Berlin aurait d'ores et déjà tâté le terrain auprès de ses partenaires européens.
Les salaires attractifs en Allemagne vont-ils priver les autres pays de leurs recrues ?
Ainsi, la République tchèque, la Suède, la Belgique et le Danemark ne seraient pas opposés à cette idée, au contraire de la France qui aurait émis des réserves. La Bulgarie, la Roumanie, la Slovénie ou encore la Grèce auraient pour leur part exprimé de sérieux doutes, craignant que leurs soldats potentiels ne soient attirés par un salaire plus élevé en Allemagne. «Nous devons bien entendu veiller à ne pas entrer en concurrence avec nos homologues européens», a souhaité tempérer le chef d'état-major de la Bundeswehr.
La Bundeswehr s'intéresserait pour l'heure prioritairement aux citoyens européens vivant déjà en Allemagne. Les candidats devront répondre à plusieurs exigences : parler allemand, présenter un certificat de bonne conduite de la police et prêter allégeance à l'Etat allemand. Confrontée au vieillissement de sa population et à une pénurie grandissante de main d'œuvre, l'Allemagne est par ailleurs sur le point de se doter d'une loi sur l'immigration visant à faciliter le recrutement de travailleurs extra-communautaires.