Scandale Facebook : Zuckerberg sort de son mutisme et se dit «désolé», mais peine à convaincre
Mouvement #DeleteFacebook, chute du cours en bourse, menace des annonceurs : le patron de Facebook est enfin sorti de son silence pour tenter faire face au scandale autour de l'utilisation indue de données personnelles des utilisateurs. Sans succès.
Quatre jours après que le scandale sur l'utilisation des données des utilisateurs de Facebook par la firme britannique Cambridge Analytica a éclaté, le patron du réseau social Mark Zuckerberg est enfin sorti de son mutisme.
Dans une interview accordée le 22 mars à plusieurs médias américains, dont CNN et le New York Times, le milliardaire de 33 ans s'est aventuré dans un délicat exercice de damage control. «Nous avons fait des erreurs», a-t-il d'emblée reconnu, notant que celles-ci avaient entraîné «un abus de confiance très important». «Notre responsabilité est de faire en sorte que cela ne se reproduise pas», a-t-il assuré.
Facebook CEO Mark Zuckerberg says he is "happy to" testify before Congress "if it's the right thing to do" https://t.co/nqc5puq5Uapic.twitter.com/LW5Pn9ak8z
— CNN Breaking News (@cnnbrk) 22 mars 2018
«Je suis vraiment désolé», s'est-il encore excusé, avant de laisser entendre qu'il n'était pas impossible que le scandale soit de plus vaste ampleur, Facebook devant désormais vérifier que d'autres applications n'ont pas siphonné et transmis des informations privées des utilisateurs à leur insu, comme l'a fait Cambridge Analytica.
Avare en explications, Mark Zuckerberg s'est contenté d'annoncer un contrôle plus strict des applications qui ont accès à la base de données de Facebook. Et il s'est dit heureux de témoigner devant le Congrès américain «si c'est la chose à faire».
#DeleteFacebook
L'onde de choc créée par le scandale pourrait bien faire tomber de son trône le roi des réseaux sociaux. Plusieurs fronts se sont subitement ouverts contre Facebook. D'un point de vue financier, l'action du groupe a chuté en bourse dans les jours qui ont suivi. Une situation qui pourrait durer si les annonceurs tels que le groupe britannique ISBA, qui dépense des centaines millions d'euros par an sur la plateforme, mettent à exécution leur menace de purement et simplement quitter Facebook, comme le rapporte le Times.
La crainte pour eux est de se voir associés à une marque devenue toxique aux yeux du public. Des plaintes et des recours en nom collectif (class action) au nom de citoyens et d'actionnaires ont en effet déjà été déposés par des cabinets d'avocats américains.
Ce qui mène au second front, à même de mettre en péril durablement la firme californienne : son image de marque est aujourd'hui menacée. Une véritable campagne populaire pour abandonner le réseau social est en train de naître sous le hashtag #DeleteFacebook. Le fondateur de l'application Whatsapp – rachetée en 2014 par Facebook pour plus de 15 milliards d'euros – s'est même joint au mouvement par un tweet qui doit donner des sueurs froides à l'équipe dirigeante du réseau social : «Il est temps. #DeleteFacebook.»
It is time. #deletefacebook
— Brian Acton (@brianacton) 20 mars 2018
La sphère politique s'en mêle
La sortie – très – tardive et qui a peiné à convaincre de Mark Zuckerberg ne va probablement pas pouvoir enrayer le mouvement. La grogne est telle que la sphère politique s'est même saisie du scandale. «Beaucoup de questions restent sans réponses», a ainsi tweeté le président du Parlement européen Antonio Tajani.
Mark Zuckerberg’s statement is a step in the right direction, but many questions remain unanswered. I look forward to him giving further explanations before the elected representatives of over 500 million European citizens.
— Antonio Tajani (@EP_President) 22 mars 2018
A Bruxelles, le sujet s'est imposé aux 28 pays membres à la dernière minute, et ces derniers devraient insister dans la conclusion de leur sommet le 22 mars sur la nécessité pour les réseaux sociaux de garantir une protection totale de la vie privée et des données personnelles des citoyens.
«Franchement, je ne pense pas que ces changements [annoncés par Mark Zuckerberg] aillent assez loin», a de son côté commenté le ministre de la Culture britannique, Matt Hancock.
Un sentiment partagé par David Cicilline, un élu américain à la Chambre des représentants, qui espère voir le patron de Facebook témoigner devant le Congrès.