Exécutions, enfants soldats, charia: sur les écrans pour le ramadan, une série sur la vie chez Daesh
- Avec AFP
L'univers violent et cruel des femmes djihadistes qui ont rejoint Daesh constitue la trame d'une série télévisée qui sera diffusée pour le ramadan et sur laquelle un groupe audiovisuel saoudien fonde de grands espoirs.
La nouvelle série «Corbeaux noirs» lancée par le Middle East Broadcasting Center (MBC), un puissant groupe saoudien de médias arabophones, a mobilisé d'énormes moyens et coûté la bagatelle de 10 millions de dollars. Elle relate des exactions commises par des femmes qui ont rejoint les combattants de Daesh sous «le califat» autoproclamé par les djihadistes en Irak et en Syrie à l'été 2014.
«Il a fallu une année de recherches et six mois de tournage», précise à l'AFP Mazen Hayek, porte-parole du groupe MBC basé à Dubaï. Selon lui, la série s'inspire de faits réels et se veut didactique. «Nous avons voulu reproduire des faits réels qui touchent les téléspectateurs et reflètent le visage hideux du terrorisme», explique-t-il.
I NEVER watch #Ramadan shows but I am definitely watching this. #blackcrows a dramatic series abt life under #IS. https://t.co/uPxOgJfdbA
— Dr. Ghanem Yazbeck (@DaliaGhanemYazb) 17 мая 2017 г.
Tournée en grande partie au Liban avec des acteurs de différents pays arabes, la série dénonce les «méthodes utilisées par Daesh pour attirer des adeptes sous couvert de religion», souligne le groupe MBC dans un communiqué présentant cette nouvelle série.
Des scènes choquantes
Selon des extraits visionnés par l'AFP, certains épisodes montrent la violence gratuite dont les combattantes de Daesh peuvent faire preuve. Il y a l'exécution de sang froid par une inspectrice de la police islamique – la Hisba – d'une commerçante dont le seule faute est de proposer à la vente des assiettes décorées avec des images d'animaux.
Dans un autre épisode, un groupe du même corps fouille des femmes à un barrage, leur reprochant de ne pas porter de gants et d'utiliser des téléphones portables, un «outil satanique». De même, «les parfums mènent à l'adultère» et «le maquillage est réprouvé». Dans un troisième épisode, on voit des enfants soldats s'entraîner au tir à balles réelles en prenant des prisonniers de Daesh pour cibles.
@CarterCenter Musalsala (Black Crows) features a scene of armed female morality police in Daesh, modeled off of Liwa al-Khansaahttps://t.co/s7xHn3iI3Cpic.twitter.com/Hcab6IJCuW
— Hampton Stall هامبتن (@HamptonStall) 18 мая 2017 г.
Pour Fadi Ismaïl, directeur-général de la société de production, «les scènes choquantes» de la série télévisée «peuvent attirer ou révulser le téléspectateur mais sans jamais le laisser indifférent».
Le réalisateur Amer Sabbah explique que «le plus grand défi à relever» a été la sécurité. «Lorsqu’on transforme une région du Liban en QG de Daesh, on est obligé de s’occuper de la sécurité et de la protection de l’équipe de production», souligne-t-il, cité par l'AFP.
L'Arabie saoudite se veut la championne de la lutte contre l'Etat islamique et a promis, lors de la visite de Donald Trump à Riyad en début de semaine, à redoubler d'efforts en la matière.
Ce n'est pas la première fois que la télévision se pose en outil de lutte contre Daesh. En 2014, la télévision irakienne s'y était essayé sur un ton comique dans sa série «L'Etat fictif» par opposition à «Etat islamique».
La superproduction «Corbeaux noirs» est lancée deux ans après un premier essai, par le même groupe, en 2015. L'un des épisodes de la série intitulée «Selfie» sur le groupe Daesh (Etat islamique) avait alors remporté un franc succès sur les chaînes du groupe de télévision, engagées dans une course folle à l'audience pendant le mois de jeûne musulman qui commence cette année le 29 mai.
Cet épisode racontait l'exécution d'un père par son propre fils, qu'il était allé chercher sur le front dans les rangs de Daesh. Le père avait auparavant refusé de commettre un attentat, ratant ainsi son examen de passage au sein du groupe djihadiste.
Traité dans un style humoristique, l'épisode avait provoqué des menaces de mort contre ses acteurs, preuve qu'on ne peut pas toujours rire de l'Etat islamique, dont l'acronyme en arabe est Daesh.
La production d'une série entière sur Daesh s'inscrit dans le prolongement de cette idée, précise Amer Hayek, soulignant que «les médias arabes ne pouvaient rester les bras croisés face à la machine de propagande des groupes islamistes».