Un journal satirique turc contraint de mettre la clé sous la porte après une caricature de Moïse
- Avec AFP
Les éditeurs de Girgir, une célèbre publication humoristique, ont pris la décision de la fermer et de licencier tous ses journalistes. En cause : une caricature du prophète Moïse jugée «de mauvais goût».
L'un des plus célèbres magazines satiriques de Turquie a été fermé et toute son équipe a été remerciée par son éditeur après la publication d'une caricature de Moïse jugée insultante. Dans son dernier numéro, Girgir a publié une caricature dans laquelle Moïse guide les juifs hors d'Egypte, ses compagnons se plaignant dans un flot d'injures.
«La décision a été prise de fermer le magazine et de renvoyer tout le personnel à cause d'une caricature de mauvais goût», ont annoncé les éditeurs dans une déclaration publiée par l'hebdomadaire sur les réseaux sociaux. «La caricature a gêné la société et nous a gênés en tant qu'entreprise de publication», ajoutent-ils.
En outre, selon un utilisateur de Twitter se présentant comme un professeur à la George Mason University, le groupe terroriste Etat islamique (EI) aurait appelé ses partisans en Turquie à assassiner les dessinateurs de Girgir, après la publication de cette caricature.
Moïse, prophète majeur chez les juifs, est également une figure sacrée pour les chrétiens et les musulmans.
Depuis 2015, Girgir est publié par le groupe de Sözcü, un quotidien nationaliste laïc fermement opposé au président Recep Tayyip Erdogan. Selon les éditeurs, cette caricature est une tentative délibérée de «mettre l'entreprise dans une position délicate». Ils ajoutent qu'ils transmettront au procureur les noms des responsables. Dans un communiqué publié avant l'annonce de sa fermeture, Girgir s'était excusé, affirmant que la caricature avait échappé à l'attention des relecteurs «du fait de la fatigue et de l'insomnie». Les caricatures des personnages sacrés, principalement musulmans, sont quasiment taboues en Turquie.
«Un crime de haine», selon le porte-parole d'Erdogan
«Cela n'a rien à voir avec l'humour et la liberté d'expression, c'est immoral et un crime de haine», a tweeté le porte-parole de Recep Tayyip Erdogan, Ibrahim Kalin, avec une image de la caricature.
Bunun adı mizah ve ifade özgürlüğü değil, ahlaksızlık ve nefret suçudur. Mukaddesata yönelik bu saygısızlığı şiddetle kınıyorum. pic.twitter.com/QBY2rkTdnd
— Ibrahim Kalin (@ikalin1) 16 février 2017
Celle-ci a aussi été fermement condamnée par le rédacteur en chef de l'hebdomadaire juif stambouliote Shalom, Ivo Molinas, qui a tweeté : «Quelle honte ! Quel irrespect !»
Gırgır dergisindenmiş.Bu ne rezalet,bu ne saygısızlık ! pic.twitter.com/K6s7YbLTH9
— ivo molinas (@basyazar) 16 février 2017
Deux journalistes du quotidien Cumhuriyet avaient été condamnés à deux ans de prison l'année dernière pour avoir reproduit la caricature de Mahomet publiée à la une de Charlie Hebdo, après l'attentat qui a visé le siège de l'hebdomadaire satirique français.
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