Matteo Renzi : quand la critique modérée de l'Union européenne ne suffit plus aux électeurs
Après le Brexit, l'issue du référendum italien plonge l'Union européenne dans l'incertitude. Et donne des ailes aux eurosceptiques, tels le parti M5S de Beppe Grillo en Italie, mais aussi en Europe. Matteo Renzi paie ainsi son ambiguité face à l'UE.
La défaite personnelle de Matteo Renzi ouvre un boulevard aux souverainistes et autres «eurosceptiques», à l'instar de Beppe Grillo. Aussi, certains tentent d'expliquer le vote des Italiens par une peur du déclassement et les charmes du «populisme».
Mais, bien plus que les effets délétères de la crise migratoire sur l'opinion publique italienne, ou encore le taux de chômage largement au-dessus des 10 %, c'est l'austérité imposée par l'Union européenne à ses pays membres que les électeurs ont souhaité dénoncer en désavouant un Matteo Renzi, à la fois critique vis-à-vis de Bruxelles mais aussi exécutant de la politique de réformes imposées par l'Union européenne.
Réformes structurelles contre souplesse budgétaire
Car Matteo Renzi s'était bel et bien posé en défenseur des Italiens face à Bruxelles. En janvier 2016, il tente ainsi le bras de fer avec la Commission européenne, s'en prenant à son président Jean-Claude Juncker – lequel est connu pour son aversion des référendums. En cause, la flexibilité budgétaire, et le deux poids deux mesures de la Commission, toujours plus compréhensive avec les piliers historiques de l'Europe, qu'avec les «PIGS» du Sud.
«L'Italie mérite le respect», avait-il lancé à l'adresse de la Commission en janvier 2016, après avoir obtenu à grand-peine un assouplissement des exigences d'équilibre budgétaire. Le président du Conseil italier avait alors fustigé Angela Merkel, accusée de bloquer un projet de garantie européenne des dépôts, planche de salut de banques italiennes moribondes.
Le président du Conseil avait alors arraché de haute lutte un ballon d'oxygène de 0,4 % du produit intérieur brut (PIB), et un «cadeau» supplémentaire de Bruxelles de 0,2 % de déficit permis afin de faire face à l'«urgence migratoire». Seulement, voilà, en échange, Matteo Renzi s'était engagé à appliquer les «réformes structurelles» exigées par Bruxelles. Matteo Renzi, bascule alors de la position de défenseur des Italiens à celle d'exécutant de la politique d'austérité européenne. La marge de manœuvre pour Matteo Renzi devenait trop étroite.
Huit banques italiennes pourraient s'effondrer si le référendum du Premier ministre italien échouait @RTenfrancaishttps://t.co/eoyNIUdWsqpic.twitter.com/T0JGgjx6AZ
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Le spectre d'un «Italexit»
Le terme n'est pas encore forgé, «brexitaly», italexit. Mais en ouvrant la voie aux eurosceptiques en Italie, et en remettant en cause le deal entre Rome et Bruxelles, c'est la troisième économie de la zone euro qui menace le château de cartes européen. La réforme constitutionnelle visant à casser le bicaméralisme «parfait» italien, cause de blocages du travail législatif, mais en mettant son nom en balance, Matteo Renzi a, de lui-même changé la destination de ce référendum.
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Les Italiens se sont avant tout emparé de cette consultation pour exprimer leur opposition à la politique européenne. Et, comme l'analyse Jacques Sapir, Matteo Renzi a incarné, aux yeux des instances européennes, l'homme chargé de mettre en place les mêmes réformes du marché du travail que dans d'autres pays de l'Union européenne, parmi lesquelles la France, avec la loi El Khomri ou la loi Peeters en Belgique, dont les grandes lignes ont été tracées dans les bureaux de la Commission européenne et transmises pour exécution aux gouvernements locaux.
Alexandre Keller
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