Quand Erdogan compare son propre système politique à celui d’Hitler pour le défendre
En voulant vanter le système présidentiel fort qu’il tente de mettre en place dans son pays malgré les critiques, le président de la Turquie n’a pas hésité à en donner un exemple pour le moins controversé : le IIIe Reich d’Adolf Hitler.
Ces propos pourraient apparaître comme une reductio ad Hitlerum (procédé rhétorique de diabolisation d’un adversaire)… Excepté qu’ils ont été prononcés par Recep Tayyip Erdogan lui-même.
Interrogé sur le fait de savoir si son pays pourrait maintenir un gouvernement unitaire en cas d'implantation d'un système présidentiel, le chef d'Etat a répondu que «dans un système unitaire [comme la Turquie], un système présidentiel peut parfaitement exister. Il y a actuellement des exemples dans le monde et aussi des exemples dans l'histoire. Vous en verrez l'exemple dans l'Allemagne d'Hitler».
#Turkey president #Erdogan cites "Hitler's Germany" as an example of effective government. (?) pic.twitter.com/8z8EqqaPfc
— Serhado (@Serhado_Fermi) 1 Janvier 2016
Prononcée en conférence de presse jeudi 31 décembre, au retour d’un voyage d’affaires en Arabie saoudite, la citation a été rapportée par l'agence de presse turque Dogan.
Erdogan et son Premier ministre, Ahmet Davutoglu, défendent tous deux l'idée qu’Ankara devrait s’écarter de son actuel système parlementaire et évoluer vers un gouvernement où le président aurait plus de pouvoir.
«Ce qui serait bon pour la Turquie serait d’adopter un système présidentiel en accord avec l’esprit [démocratique]. Ce système n’évoluera pas vers une dictature mais si nous n’avons pas cet esprit, même le système parlementaire peut évoluer» vers une dictature, a ainsi déclaré Davutoglu dans un entretien avec la chaîne de télévision tuque NTV.
Au pouvoir, le parti de la justice et du développement (AKP), qui a remporté la majorité absolue aux élections de novembre, cherche à adopter une nouvelle constitution afin de favoriser le passage à un système présidentiel. Mais les formations de l’opposition condamnent cette volonté, affirmant qu’un tel gouvernement donnerait trop de pouvoir à Erdogan.
Le président turc a déjà mis en prison de nombreux opposants politiques et journalistes qui s’opposent à lui. Le 31 décembre, le politicien Feyzi Isbasaran, lui-même ancien membre de l’AKP, a été condamné à trois ans pour avoir posté des tweets jugés insultants pour Erdogan.
Un autre membre de l’opposition, le parlementaire du parti républicain du peuple, Eren Erdem, a été accusé de «trahison» pour avoir confié à RT que l’organisation terroriste Daesh avait obtenu du gaz sarin via la Turquie. Il avait également déclaré qu’Ankara n’avait rien fait pour arrêter la transition du produit, malgré de nombreuses preuves.