Lavrov prévoit un gouvernement d’union en Syrie dans 6 mois et une transition politique dans 18
Lors d’un entretien avec son homologue américain, le chef de la diplomatie russe a jugé possible une prochaine solution diplomatique à la crise syrienne, alors que les experts doutent que Washington fera preuve de flexibilité.
Suite à l’adoption à l’unanimité de la résolution pour un plan de paix en Syrie par les grandes puissances de l'ONU, le ministre russe a expliqué aux journalistes à quel point il était important que toutes les parties soient impliquées dans les négociations.
«C'est uniquement en rassemblant tous les acteurs externes qui peuvent influencer ce qui se passe sur le terrain, que nous pourrons arriver à de bons résultats», a noté Sergueï Lavrov à New York.
John Kerry a à son tour précisé que les négociations entre le gouvernement syrien et l’opposition débuteront à la mi-janvier. Il a également souligné le progrès atteint par le Conseil de sécurité de l’ONU le 18 décembre, indiquant que «pour la première fois depuis le début de cette guerre», l’ONU était capable d’introduire avec succès une feuille de route qui prévoit «la résolution pacifique via un processus politique».
Pour le ministre russe, «les Syriens eux-mêmes peuvent déterminer l’avenir de leur pays». Tout le monde est d’accord avec le principe mais tous ne sont pas prêts à renoncer à leurs conditions préalables ou leur approche sur la manière de procéder, a affirmé Sergueï Lavrov.
«Les participants n'ont pas tous rejeté l’application d’une solution militaire en Syrie, ce qui est absolument inacceptable pour nous», a-t-il poursuivi.
Selon le diplomate, la résolution est une «étape importante» qui reflète tous les principes énoncés lors des négociations à Vienne. «Le succès le plus important consiste à ce que les documents de Vienne ont été appliqués dans la loi internationale avec cette résolution.
"Mission impossible is becoming possible today" @UN Envoy for Syria Staffan de Mistura to media on #UNSC resolution pic.twitter.com/YNYzId1YSS
— UN Spokesperson (@UN_Spokesperson) 18 декабря 2015
En ce qui concerne le président Bashar el-Assad, Sergueï Lavrov a fait savoir que la Russie ne peut soutenir aucune approche qui permettra à un pays de décider de l’avenir de l’autre. Dans le même temps, son homologue américain estime que le président Assad «a perdu la capacité et la crédibilité nécessaires pour unir et diriger son pays».
D'un autre côté, la Russie regrette que la mission d’unir les forces dans le combat contre Daesh et d’autres groupes terroristes soit retenue en «otage» à cause de la décision concernant le sort du président syrien actuel.
«On entend souvent ce type de logique, selon lequel, sans décider du sort d’Assad, il est impossible de mener une lutte coordonnée contre le terrorisme», a signalé le ministre russe, trouvant une telle approche «dangereuse».
John Kerry : le financement de groupes terroristes en Syrie doit cesser
Selon le cessez-le-feu instauré à la demande de la résolution de sécurité de l’ONU, les pays doivent arrêter de financer les groupes terroristes qui opèrent en Syrie, a fait savoir le ministre des Affaires étrangères.
Cependant, la liste de groupes terroristes est «très contradictoire» à ce stade-là, puisque certains pays ont une divergence de points de vue lorsqu’il s'agit de qualifier certains combattants de terroristes, a expliqué Sergueï Lavrov.
D’après son homologue américain, des critères pour désigner le groupe comme terroriste seront déterminés à un stade ultérieur des discussions sur la Syrie. Le diplomate russe a à son tour ajouté que ces critères vérifieront si le groupe a bombardé des zones résidentielles de Damas ou s’il a attaqué l’ambassade russe dans le pays.
Quant à la frontière turco-syrienne, elle doit être fermée afin de limiter le soutien qu’on accorde de l’extérieur à des groupes terroriste dans le pays, a souligné Monsieur Lavrov. «S’il s’agit d’un soutien extérieur des groupes luttant en Syrie, alors il serait idéal […] de fermer la frontière entre la Syrie et la Turquie».
#NewYork : le ton de #Washington sur la #Syrie s’est-il adouci ? https://t.co/S9v3pwygu3pic.twitter.com/KtQU3RC7AN
— RT France (@RTenfrancais) 18 Décembre 2015
Malgré des désaccords, la résolution de l’ONU a ouvert la porte à une plus grande coordination des frappes aériennes menées par les Etats-Unis et la Russie contre Daesh en Syrie, a noté John Kerry ajoutant que cette question avait été discutée avec le président Vladimir Poutine.
«Maintenant que nous avons la résolution de l’ONU, que nous avons un processus en marche, cette porte est beaucoup plus ouverte et il est plus important pour nous d’étudier les moyens d’atteindre une plus grande coopération», a noté John Kerry jugeant «contreproductif» de ne pas essayer d'accroître la coopération dans la lutte contre Daesh.
En réponse, Lavrov a souligné que la proposition de la Russie aux Etats-Unis portant sur la coordination de leurs raids contre l’Etat islamique était toujours au menu depuis deux mois et demi. Il a également ajouté que l’armée russe était en contact avec les forces des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de la France pour coordonner leurs actions en Syrie.
Départ de Bachar el-Assad, la position de Washington inchangée pour les experts
Avant le vote définitif de la résolution à New York, certains médias ont suggéré que Washington a «capitulé» sur sa répugnance de voir Assad au pouvoir. Cependant, Daniel Patrick Welch, écrivain et analyste politique, estime qu’en fait les Etats-Unis recherchent tout simplement de nouvelles voies au changement de régime à Damas.
«L’objectif américain a toujours été de destituer Assad et de le remplacer par un gouverneur plus accommodant», a souligné l’écrivain dans un entretien avec RT. «Le fait qu’ils prétendent maintenant coopérer signifie que les forces extérieures doivent cesser d’essayer ouvertement de renverser Assad et continueront de le faire par d’autres moyens», croit Daniel Welch.
Alors que la position de la Maison blanche paraît inchangée aux experts, elle n’a en fait aucun fondement légal, rappelle le professeur de droit international chez l’université de Georgetown Daoud Khairallah.
«J’espère que les Etats-Unis se rendent compte qu’ils n’ont aucune base légale pour réclamer le départ du leader d’un pays. L’élection des dirigeants syriens est un problème qui doit être laissé au peuple syrien», a souligné Daoud Khairallah.