Proche-Orient : Israël jure de «détruire» le Hamas et poursuit ses frappes sur Gaza
- Avec AFP
Israël continue ce 12 octobre à pilonner sans relâche la bande de Gaza après avoir juré d'«écraser» et de «détruire» le mouvement islamiste palestinien Hamas, responsable de l'attaque la plus meurtrière de l'histoire contre l'Etat juif.
Au sixième jour de la guerre entre les deux ennemis qui a déjà fait des milliers de morts, les frappes israéliennes se sont poursuivies durant la nuit du 11 au 12 octobre contre la bande de Gaza, d'où sont parties plusieurs salves de roquettes vers le sud d'Israël. Le tout à quelques heures de l'arrivée en Israël du chef de la diplomatie américaine Antony Blinken pour une visite de soutien à son allié.
«Tout membre du Hamas est un homme mort», a lancé le 11 octobre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lors d'une première allocution solennelle avec son gouvernement d'urgence, formé le même jour avec Benny Gantz, un des principaux chefs de l'opposition. «Le Hamas, c'est Daech [le groupe djihadiste Etat islamique] et nous allons l'écraser et le détruire comme le monde a détruit Daech», a-t-il ajouté après avoir qualifié l'attaque de «sauvagerie jamais vue depuis la Shoah».
Le 7 octobre, en plein Shabbat, le repos juif hebdomadaire, des centaines de combattants du Hamas avaient infiltré Israël à bord de véhicules, par les airs et la mer, pour tuer plus d'un millier de civils dans la rue, chez eux ou en pleine rave party, semant la terreur sous un déluge de roquettes.
«La dévastation ici est absolument immense»
A l'entrée du kibboutz Beeri, à moins de cinq kilomètres de la frontière avec Gaza, une pile de cadavres témoigne de l'ampleur de l'attaque à l'intérieur du village dont plus d'une centaine d'habitants ont été tués, selon l'armée. «La dévastation ici est absolument immense», se désole Doron Spielman, porte-parole de l'armée israélienne. «Et c'est sans compter les nombreux membres du kibboutz qui ont été pris en otage et emmenés dans Gaza», renchérit un autre porte-parole de l'armée, Jonathan Cornicus.
Lors de cette offensive d'une violence extrême qui a sidéré le pays, les combattants du Hamas ont enlevé plusieurs dizaines d'otages israéliens, étrangers et binationaux, que le mouvement menace d'exécuter. Parmi ces otages figurent des jeunes capturés pendant un festival de musique où des combattants palestiniens ont fait irruption le 7 octobre, tuant 270 personnes d'après les autorités.
L'armée a fait état de 1 200 morts en Israël, pour la plupart des civils. Dans la bande de Gaza, au moins 1 200 personnes, dont de nombreux civils, ont été tuées dans les raids aériens destructeurs israéliens menés en représailles, selon les autorités locales. L'armée israélienne a par ailleurs affirmé avoir récupéré les corps de 1 500 combattants du Hamas qui s'étaient infiltrés le 7 octobre dans plusieurs localités proches de la bande de Gaza.
La bande de Gaza privée d’eau et d’électricité
Près de la frontière de Gaza, les correspondants de l'AFP ont vu le 11 octobre des corps en décomposition présentés comme ceux des assaillants du Hamas. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a indiqué ce 12 octobre qu'il était en contact avec le Hamas pour œuvrer à la libération des otages.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a lui aussi lancé un processus de négociations avec l'organisation islamiste, a indiqué le 11 octobre au soir une source officielle à l'AFP. Les autorités israéliennes recensent 150 otages, alors que des centaines de personnes sont encore portées disparues et des corps toujours en cours d'identification.
Israël a déployé des dizaines de milliers de soldats autour de l'enclave palestinienne et à sa frontière nord avec le Liban, d'où le Hezbollah, allié du Hamas, lance régulièrement des attaques de roquettes.
La bande de Gaza, enclave pauvre et exiguë où s'entassent 2,3 millions d'habitants qui subissent un blocus terrestre, aérien et maritime depuis 2006, est désormais en état de siège, privée d'approvisionnement en eau, en électricité et en nourriture, coupés par Israël. L'unique centrale électrique de l'enclave s'est arrêtée l’après-midi du 11 octobre, faute de carburant, et les hôpitaux sont débordés et manquent de matériel.
Fabrizio Carboni, le directeur régional du CICR pour la région Proche et Moyen-Orient, a demandé aux deux camps de «réduire les souffrances des civils», et notamment ceux résidant dans la bande de Gaza. «Sans électricité, les hôpitaux risquent de se transformer en morgues», a-t-il affirmé dans un communiqué, disant craindre notamment pour les nouveau-nés placés dans des incubateurs et les patients sous oxygène ou sous dialyse.
«C'est comme une apocalypse ou un tremblement de terre»
«Nous nous préparons pour les prochaines étapes. Nous avons frappé un grand nombre de cibles», a déclaré ce 12 octobre à l'aube le porte-parole de l'armée israélienne Jonathan Cornicus.
Au cours des dernières 24 heures, il y a eu «moins de roquettes» tirées vers Israël et «c'est toujours un bon signe», a-t-il noté. Les bombardements ont touché des dizaines d'immeubles, des usines, des mosquées et des magasins, d'après le Hamas. Des femmes, leurs enfants dans les bras, fuyaient entre les décombres, dans des rues dévastées.
«C'est comme une apocalypse ou un tremblement de terre [...] Ils [les Israéliens] sont venus pour détruire, comme si ces gens ne méritaient pas de vivre. Comme s'ils n'étaient pas des humains», a affirmé au milieu des ruines un habitant du quartier de Karama à Gaza, qui n'a pas voulu donner son nom. Plus de 338 000 personnes ont été déplacées par les frappes contre l'enclave, selon l'ONU. Depuis le 7 octobre, 29 Palestiniens ont par ailleurs été tués dans des violences en Cisjordanie.
Les concentrations de troupes à la frontière font craindre une offensive terrestre contre l'enclave, dont Israël s'était retiré unilatéralement en 2005 et qui est gouvernée par le Hamas depuis 2007.
Une perspective terrifiante de combats au cœur d'une ville à l'extrême densité de population, dans des souterrains et en présence d'otages. «Quand on rentre dans Gaza, on ne sait jamais dans quel état on en ressortira», affirme à l'AFP le commentateur politique Akiva Eldar.
Gaza : Biden demande à Israël de respecter «le droit de la guerre»
Sur le plan diplomatique, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken est attendu ce 12 octobre en Israël pour une visite de solidarité. «Nous sommes déterminés à nous assurer qu'Israël obtienne tout ce dont il a besoin pour se défendre», a-t-il déclaré avant son départ. Le président américain Joe Biden a toutefois demandé à Israël de respecter «le droit de la guerre» dans sa riposte contre Gaza.
Le prince saoudien Mohammed ben Salmane et le président iranien Ebrahim Raïssi se sont pour leur part parlé au téléphone le 11 octobre. Le prince héritier saoudien a déclaré au président iranien que Riyad communiquait «avec toutes les parties internationales et régionales pour mettre fin à l'escalade en cours», selon l'agence de presse officielle saoudienne SPA. Il a également souligné «la position ferme du royaume en faveur de la cause palestinienne».
La guerre entre Israël et le Hamas risque d'exacerber le sentiment anti-israélien en Arabie saoudite, pressée depuis des mois par Washington de conclure un accord de normalisation historique avec l'Etat hébreu.
Le Brésil, qui préside actuellement le Conseil de sécurité de l'ONU, a convoqué pour le 13 octobre une nouvelle réunion de cet organisme. Lors d'une précédente réunion d'urgence le 8 octobre, les membres du Conseil n'étaient pas parvenus à un consensus pour condamner unanimement l'attaque du Hamas.