Nord du Kosovo : vives tensions entre la police kosovare et les Serbes (VIDEOS)
La police kosovare a dispersé le 26 mai à l'aide de gaz lacrymogène des Serbes qui protestaient contre la prise de fonctions de maires albanais dans le nord du Kosovo, une région où ils sont majoritaires.
Nouvelle poussée de fièvre dans le nord du Kosovo. Des heurts ont eu lieu entre la police kosovare et des Serbes, venus protester contre la prise de fonctions de maires albanais dans cette province où ils sont majoritaires. Les édiles ont été désignés à l'issue des élections locales organisées par les autorités kosovares le 23 avril dans quatre municipalités en majorité peuplées de Serbes qui ont très largement boycotté ce scrutin : seuls quelque 1 500 électeurs, sur environ 45 000 inscrits, y ont pris part.
Le nord du Kosovo est une ancienne province serbe qui a proclamé unilatéralement en 2008 son indépendance, jamais reconnue par la Serbie et la Fédération de Russie, mais aussi par cinq pays de l'Union européenne (dont l'Espagne et la Grèce), ainsi que l'ONU.
Pour une fois, l'Occident appelle le Kosovo à reculer
Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a «condamné fermement» la décision des autorités kosovares de désigner ces édiles malgré les mises en gardes de l'Union européenne et des Etats-Unis. «Ces mesures ont exacerbé gratuitement les tensions, sapant nos efforts pour normaliser les relations entre le Kosovo et la Serbie et auront des conséquences dans nos relations bilatérales avec le Kosovo», a déclaré Antony Blinken dans un communiqué.
Les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni, l'Italie et l'Allemagne ont également appelé les dirigeants du Kosovo «à revenir immédiatement sur leur décision» et «à calmer la situation». Dans un communiqué commun, ces Etats ont dit être «préoccupés par la décision de la Serbie de relever le niveau de préparation de ses forces armées à la frontière avec le Kosovo». Ils ont appelé «toutes les parties à la plus grande retenue, en évitant les discours incendiaires».
Selon une journaliste de l'AFP, des échauffourées entre les manifestants serbes et la police ont eu lieu d'abord devant la mairie de Zvecan.
Les forces de l'ordre ont tiré du gaz lacrymogène pour repousser les protestataires, tandis que des déflagrations ont été provoquées par des grenades assourdissantes. L'AFP a aussi rapporté des coups de feu. Une dizaine de personnes ont été légèrement blessées et ont reçu des soins médicaux dans un hôpital de la partie nord de la ville divisée de Mitrovica, a déclaré la directrice adjointe de cet établissement, Danica Radomirovic, citée par des médiaux kosovars. Au moins une voiture de la police a été endommagée, selon les mêmes sources.
Les forces de l'ordre ont également fait usage de gaz lacrymogène pour disperser les manifestants dans deux autres municipalités, Leposavic et Zubin Potok, a rapporté la télévision nationale serbe (RTS). Des Serbes ont érigé des barricades près de Leposavic, a ajouté la RTS.
La Serbie place son armée en «état d'alerte maximale»
A Belgrade, le président serbe Aleksandar Vucic a donné l'ordre à l'armée de se placer en «état d'alerte maximale», comme cela est arrivé à de multiples reprises ces dernières années en raison des tensions avec le Kosovo – la fois précédente en décembre 2022 –, et aussi de se «mettre en mouvement» dans la direction de la frontière avec cette ancienne province serbe, a annoncé la RTS.
La police kosovare n'a pas fait de commentaires sur les derniers incidents, confirmant seulement dans un communiqué avoir assisté les nouveaux maires dans la prise de leurs fonctions dans trois des quatre municipalités concernées.
Les élections municipales se sont déroulées un peu plus d'un mois après l'annonce par l'Union européenne d'un accord sur la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina au cours d'une réunion à Ohrid, en Macédoine du Nord, mais que les deux parties n'ont pas signé.
Pour avancer dans ce dialogue, Belgrade réclame la mise en place d'une «association de municipalités serbes», qui jouirait d'une sorte d'autonomie et regrouperait quelque 120 000 Serbes du Kosovo, un pays peuplé d'1,8 million d'habitants, très majoritairement albanais.