«Pas de versement» des fonds de relance européens : Macron tance la Hongrie et son Premier ministre
- Avec AFP
Emmanuel Macron a réaffirmé que l'UE n'effectuerait pas le versement des fonds de relance pour la Hongrie, justifiant la décision de Bruxelles par la «volonté assumée [de Budapest] de ne pas avancer» sur l'Etat de droit ou le respect des minorités.
En visite à Budapest le 13 décembre, l'europhile Emmanuel Macron avait à cœur d'afficher une bonne entente avec le nationaliste Viktor Orban, les deux hommes se reconnaissant l'un l'autre, dans les mêmes termes, comme «adversaires politiques mais partenaires européens».
Une entente pas suffisante toutefois pour régler les points de contentieux entre l'Union européenne et Budapest, notamment sur les questions sociétales. Ainsi, constatant que la Hongrie avait «la volonté assumée de ne pas avancer» sur l'Etat de droit ou les discriminations d'ici les élections d'avril, Emmanuel Macron a rappelé que l'UE n'effectuerait «pas de versement» des fonds de relance.
«Nous avons constaté nos désaccords [sur des sujets comme] l'Etat de droit, le respect des minorités, la lutte contre les discriminations et la corruption», a déclaré le président français devant des journalistes, à l'issue d'un entretien avec le Premier ministre Viktor Orban.
«Il y a de manière assumée une volonté hongroise, jusqu'aux échéances électorales d'avril, de ne pas avancer sur ces sujets, ça veut dire qu'il n'y aura pas de versements tant qu'il n'y aura pas d'avancées concrètes», a-t-il ajouté. «A partir du moment où c'est assumé par le gouvernement hongrois et qu'on constate nos désaccords, on a parlé des autres sujets [afin de] faire avancer l'agenda européen», a-t-il expliqué, à un mois du début de la présidence française de l'UE, pour laquelle la France cherche des alliés.
Viktor Orban se prépare à des législatives très serrées au printemps 2022, face à une opposition qui se présente pour la première fois de manière unie et dont Emmanuel Macron a rencontré le 13 décembre les représentants.
Macron : «Il faut faire pression pour que nos valeurs soient respectées de manière intraitable»
Le président français a aussi assuré avoir «explicitement mentionné tous les sujets problématiques», dont les droits de la communauté LGBT. «Il n'y a pas eu d'ouverture de la part du gouvernement hongrois sur ces sujets, mais c'est la Commission européenne qui porte ce dialogue», s'est-il défendu. «Il faut faire pression pour que nos valeurs soient respectées de manière intraitable[mais] je ne crois pas qu'on puisse apporter une réponse pertinente et durable à ces problèmes en excluant tel ou tel pays», a-t-il répété.
«Je souhaite qu'on avance sur le paquet migratoire, les sujets climatique et énergétique, la boussole stratégique, les sujets de défense et le cap macro-économique», a-t-il conclu.
Lors de sa déclaration commune avec Viktor Orban à la mi-journée, Emmanuel Macron avait souligné sa volonté d'alliance avec Budapest sur des sujets comme le nucléaire et la défense, malgré les désaccords avec ce gouvernement souverainiste à l'opposé de ses positions europhiles. Le chef de l'Etat a ensuite participé dans la soirée à la séance plénière du sommet des pays du groupe de Visegrad (Hongrie, Pologne, République tchèque, Slovaquie).
Relations tendues entre Budapest et Bruxelles
La Hongrie et l'UE s'affrontent régulièrement sur les questions de respect de l'Etat de droit en Hongrie ainsi que celles liées aux droits des minorités sexuelles et des migrants. La Commission européenne a envoyé le 19 novembre une lettre à la Hongrie, brandissant la menace d'un éventuel déclenchement du mécanisme qui permet de suspendre le versement de fonds européens en cas de violations de l'Etat de droit. Dans ce courrier, Bruxelles demandait des explications à Budapest concernant des problèmes relatifs à la passation de marchés publics, à des conflits d'intérêts et à la corruption. Le pays avait deux mois pour répondre.
Dans le même registre, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a rendu un arrêt le 16 novembre condamnant la Hongrie pour sa législation qui fait du soutien aux demandeurs d'asile une infraction pénale. Malgré le jugement de la CJUE, le gouvernement hongrois a déclaré se réserver le droit de lutter contre des ONG favorisant l'immigration.
Autre source de tension, le Parlement hongrois a adopté en juin des amendements législatifs interdisant la promotion et la représentation de l'homosexualité et du changement de sexe auprès des moins de 18 ans. Le Premier ministre avait annoncé le 21 juillet la tenue prochaine d’un référendum sur le sujet dans le pays et demandé le soutien des électeurs sur la loi. Cette loi a été dénoncée par plusieurs pays membres de l'UE dont la France qui réclame des sanctions contre la Hongrie.