Colonisation de l'Algérie : Benjamin Stora affirme ne pas être opposé à des «excuses» de la France
L'historien, dont le rapport rendu le 20 janvier a provoqué d'importants débats, a néanmoins expliqué à un quotidien algérien s'interroger «au plan de l'efficacité, sur ces présentations d'excuses en évoquant les cas du Japon face à la Chine».
Dans un entretien avec le quotidien algérien L'Expression publié le 7 février, l'historien français Benjamin Stora a indiqué ne pas être contre des «excuses» de la part de la France pour la colonisation en Algérie, alors qu'il lui avait été reproché de ne pas avoir pris position sur la question dans son rapport sur la réconciliation mémorielle entre les deux pays remis le 20 janvier au président français Emmanuel Macron.
«J'ai écrit dans mon rapport, que je ne voyais pas d'inconvénient à la présentation d'excuses de la France à l'Algérie pour les massacres commis», a-t-il rappelé, ajoutant qu'«il n'y a pas dans mon rapport le slogan, «Ni excuses ni repentance»».
L'historien a néanmoins expliqué auprès du journal algérien s'interroger «au plan de l'efficacité, sur ces présentations d'excuses en évoquant les cas du Japon face à la Chine». «On pourrait ajouter que la présentation d'excuses des [Etats-Unis] au Vietnam, n'a pas empêché le développement des idéologies des suprématistes blancs contre les minorités», a-t-il développé.
La France, par la voix d'Emmanuel Macron, s'est engagée à des «actes symboliques» quant à la mémoire sur la colonisation et la guerre d'Algérie, tout en excluant de présenter des «excuses» réclamées par Alger.
L'historien surpris par «l'énorme retentissement médiatique»
Alors que le président Abdelmadjid Tebboune est toujours soigné en Allemagne après avoir été contaminé par le Covid-19, l'exécutif algérien n'a pas encore commenté le rapport. En revanche, l'Organisation officielle des moudjahidine, les anciens combattants de la guerre d'indépendance (1954-1962), l'a rejeté, accusant Benjamin Stora d'avoir «omis d'aborder [...] les différents crimes coloniaux perpétrés par l'Etat français».
Dans son rapport de 200 pages, Benjamin Stora propose de créer en France une commission «Mémoires et Vérité» chargée de proposer des «initiatives communes entre la France et l'Algérie sur les questions de mémoire». Au rang de ces initiatives envisagées, l'historien propose notamment de faire entrer au Panthéon l'avocate Gisèle Halimi, figure d'opposition à la guerre d'Algérie, d'accorder une plus grande place à l'histoire de la France en Algérie dans les programmes scolaires, ainsi que de restituer à Alger l'épée d'Abdelkader, héros de la résistance à la colonisation française au XIXe siècle.
«Au lieu de rejeter [le rapport] en bloc, je crois qu'il est important de s'en servir comme d'un tremplin permettant de faire avancer la cause des Algériens», a plaidé Benjamin Stora auprès de L'Expression, ajoutant avoir été surpris par «l'énorme retentissement médiatique» que son travail a eu.