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Navalny, la Biélorussie et la CIA : cris d'orfraie après les propos de Zemmour sur CNews

Eric Zemmour s'est interrogé sur la main des services américains dans l'escalade diplomatique autour d'Alexeï Navalny, ou dans la situation en Biélorussie. Plusieurs personnalités se sont émus de la diffusion, selon eux, de «propagande» pro-russe.

Le polémiste et essayiste Eric Zemmour n’est décidément pas effrayé par le «qu’en-dira-t-on». Présent comme chaque soir, le 9 septembre, dans l’émission de Cnews Face à l’info, l’écrivain s'est permis une analyse assez peu en vue dans les médias occidentaux traditionnels concernant l’affaire Navalny, mais également à propos des troubles survenus en Biélorussie depuis la réélection, contestée par l’opposition, du président Alexandre Loukachenko le 9 août. Il a émis l’hypothèse d’une entreprise des services extérieurs américains : la CIA.

«Certains fantasment sur le KGB devenu FSB, moi je fantasme sur la CIA restée CIA»

«J’essaye de comprendre et il y a des choses qui me troublent. Si c’est Poutine qui a donné l’ordre d’empoisonner cet opposant politique [Alexeï Navalny], pourquoi les médecins russes lui ont sauvé la vie et l’ont transféré en Allemagne pour se faire soigner par les Allemands quitte à voir [le] crime démasqué ? C’est bizarre», a-t-il d’abord déclaré au sujet de l’affaire Alexeï Navalny, opposant qui aurait, selon Berlin été victime d'empoisonnement.

«Il y a cette histoire au moment où les Américains font pression sur les Allemands pour qu’ils renoncent à Nord Stream 2 [projet de gazoduc devant relier l'Allemagne à la Russie] […] Incroyable hasard ! Certains fantasment sur le KGB devenu FSB, moi je fantasme sur la CIA restée CIA», a-t-il poursuivi, ajoutant : «Cela ressemble beaucoup à la CIA.»

Questionné par la journaliste Christine Kelly sur la mise en place de possibles sanctions contre la Russie dans ce dossier, Eric Zemmour a expliqué y être opposé par principe. «C’est contre-productif», a-t-il rétorqué, faisant mention de sanctions prises à l’encontre de la Russie concernant la Crimée qui «se sont retournées contre nous».

L’auteur du Suicide français a par la suite évoqué la situation en Biélorussie, développant un argumentaire similaire. «Sur la Biélorussie, je vois venir gros comme une maison la CIA derrière parce que c’est un coup qu’ils ont fait depuis dix ans. A chaque fois qu’il y a une révolution orange il y a comme par hasard les Américains derrière, les ONG "sorossiennes" [du financier George Soros] et les services secrets américains. C’est étonnant que BHL [Bernard-Henri Lévy] n’ait pas débarqué en Biélorussie», a-t-il fustigé.

«J'ai cru que j'étais sur Russia Today» : des élus choqués

Réagissant sur Twitter, la députée européenne du groupe Renew, Nathalie Loiseau, a dénoncé, selon elle, «l’extrême-droite russolâtre en action». L'ancienne ministre en charge des Affaires européennes a même fait référence à notre média : «J’ai cru que j’étais sur Russia Today. Non, c’est CNews et c’est Zemmour. Ça devient de plus en plus pareil. L’extrême-droite russolâtre en action.»

De son côté, sur le même réseau social, le député MoDem des Français de l'étranger pour l'Allemagne, l'Europe centrale et de l'Est et une partie des Balkans, Frédéric Petit, s'est dit «sidéré d’entendre Eric Zemmour déverser sur une chaîne française la propagande (complotiste) servie par le régime de Loukachenko et la Russie».

Un contexte diplomatique bouillant

Deux versions s'opposent actuellement sur le cas de l'opposant russe Alexeï Navalny, toujours hospitalisé en Allemagne. D'une part, les médecins russes qui ont initialement pris en charge l'opposant, selon lesquels «aucun poison ou trace de poison dans le sang ou dans l'urine n'a[vait] été trouvé».

D'autre part, Berlin soutient le contraire, affirmant que des tests toxicologiques réalisés par un laboratoire de l'armée allemande ont apporté des «preuves sans équivoque» de «la présence d’un agent chimique neurotoxique de type "Novitchok"» dans le corps d'Alexeï Navalny. Des accusations fermement contestées par la Russie.

Par ailleurs, l'Allemagne a fait savoir être ouverte à un possible gel du projet de gazoduc Nord Stream 2 si la Russie n'apportait pas rapidement les réponses attendues par Berlin, faisant peser une pression supplémentaire sur les autorités russes, déjà ciblées dans l'affaire Navalny par les accusations d'autres gouvernements occidentaux dont la France ou les Etats-Unis.

Concernant le dossier biélorusse, lui aussi au cœur de l'actualité, de nombreuses manifestations de l'opposition se succèdent dans le pays, rassemblant plusieurs centaines de milliers de citoyens, depuis la réélection d'Alexandre Loukachenko lors de la présidentielle du 9 août. L'opposition, emmenée par Svetlana Tikhanovskaïa, arrivée deuxième et qui a quitté le pays pour la Lituanie, conteste les résultats de l'élection et demande un nouveau vote. Le chef d'Etat biélorusse voit de son côté la main de l'étranger dans la crise que traverse son pays. Les autorités biélorusses ont arrêté, ces derniers jours plusieurs membres de l'opposition, comme Maxime Znak et Maria Kolesnikova.