Affaire Chouviat : de nouvelles révélations sèment le doute sur le rapport d'intervention
Si les policiers assurent ne pas avoir su évaluer le niveau de détresse du livreur décédé après son interpellation, l'un d'eux aurait tenté d'arrêter son collègue. Une preuve que le récit des événements fait par les policiers serait erroné ?
Le 21 juillet, le site d'investigation en ligne, Mediapart, rapporte de nouveaux éléments sur l'enquête de l'IGPN concernant le décès du livreur Cédric Chouviat au cours de son interpellation. Dans cet article à charge pour les policiers nationaux intervenus ce jour-là, mais également pour leurs collègues arrivés ensuite sur les lieux ainsi que pour leur hiérarchie, la journaliste Pascale Pascariello estime que des «mensonges» auraient été proférés par les fonctionnaires et qu'ils auraient été couverts, notamment par un commandant.
Après la révélation d'un enregistrement du téléphone de Cédric Chouviat dans lequel on l'entendait dire «j'étouffe» à plusieurs reprises, les policiers avaient assuré que, pour leur part, ils n'avaient pas perçu cette alerte du livreur. Mais des éléments révélés par le média en ligne sèment le doute sur cette ligne de défense.
«C’est bon, c’est bon, lâche»
«Au cours de leurs auditions, les policiers assurent n'avoir pas entendu les cris de détresse du livreur», écrit Mediapart, qui fonde principalement sa démonstration sur des extraits d'audition de l'Inspection générale de la police nationale (lesquels sont en théorie confidentiels et auxquels RT France n'a pas eu accès).
Or, l'un des policiers ayant participé à l'interpellation, Ludovic F., aurait, selon le rapport de l'IGPN cité par Mediapart, interpellé «son collègue, le chef de bord Michaël P., alors qu’il fait pression sur Cédric Chouviat, en lui disant "c’est bon, c’est bon, lâche", "sur un ton paraissant empreint d’inquiétude"». Le policier qui aurait tenté d'arrêter son collègue était-il conscient de la détresse de Chouviat ? Le média rapporte que le policier a «oublié les raisons qui l’ont poussé à interpeller son collègue».
«Pas d'étranglement» ? Un rapport qui pose question
Autre élément posant question : la responsabilité d'un fonctionnaire de la brigade anticriminalité du VIIe arrondissement dans le récit qui a été fait de l'intervention, alors qu'il n'y aurait pas assisté. En effet, selon Mediapart, celui-ci serait arrivé sur les lieux après ses collègues. Il s'agirait en outre du «conjoint» de la fonctionnaire qui se trouvait déjà sur place et qui a participé à l'intervention.
Selon Mediapart, le membre de la BAC VII aurait fait le rapport suivant à l’état-major de la Direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne (DSPAP) : «Il s’agit en fait d’un individu qui a été contrôlé par PS07, ce dernier a été invité à les suivre suite au contrôle. Ce dernier s’est rebellé ; pendant la rébellion, il a fait un arrêt cardiaque.»
«Aucun moyen de défense intermédiaire, ni télés [matraque télescopique], ni taser, ni gazeuse. Il s’agissait juste de maintenir l’individu avec une clef de bras pour lui passer les menottes, il n’y a pas eu d’étranglement ni de coups portés», ajoute le même individu dans son rapport.
Décédé d'une asphyxie avec fracture du larynx, comme l'explicitent les résultats de l'autopsie, Cédric Chouviat aurait pourtant, selon le rapport de l'IGPN cité par Mediapart, été l'objet d'un «étranglement arrière» afin de l'amener au sol, lors de son interpellation.
Trois des quatre fonctionnaires ayant procédé à l'intervention sur le quai Branly à Paris le 3 janvier 2020 ont été mis en examen en juillet pour homicide involontaire et la quatrième fonctionnaire sous le statut de témoin assisté. L'enquête est toujours en cours pour déterminer comment le décès du livreur âgé de 42 ans est survenu ce jour-là.