Covid-19 : une séquence sur le test d'un vaccin en Afrique fait polémique
Le débat entre un chercheur de l'Inserm et un médecin sur LCI, évoquant la possibilité de tester un vaccin contre le coronavirus en Afrique, a créé la polémique, notamment sur Twitter.
«Bienvenue en occident, là où le blanc se croit tellement supérieur que racisme et débilité deviennent banalité. TIME TO RISE [Il est temps de se soulever].» C’est ainsi qu’a réagi le footballeur sénégalais du Basaksehir FK (Turquie), Demba Ba, à une séquence diffusée sur LCI le 1er avril. En plateau dans la vidéo en question, le chef du service réanimation de l’hôpital Cochin à Paris, Jean-Paul-Mira, discute avec Camille Locht, directeur de recherche à l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale), par visioconférence, à propos des études sur un vaccin contre le coronavirus.
«Si je peux être provocateur, est-ce qu’on ne devrait pas faire cette étude en Afrique, où il n’y a pas de masques, pas de traitements, pas de réanimation ? Un peu comme c’est fait d’ailleurs pour certaines études sur le Sida. Chez les prostituées, on essaye des choses parce qu’on sait qu’elles sont hautement exposées et qu’elles ne se protègent pas», explique Jean-Paul Mira.
«Vous avez raison, on est d’ailleurs en train de réfléchir à une étude en parallèle en Afrique», lui répond son interlocuteur. La scène passe dans un premier temps quasiment inaperçue avant d’être reprise sur Twitter, sans aucun commentaire, par le rappeur orléanais Dosseh.
— D O $ $ € # | 2020 (@DossehLaFamine) April 1, 2020
Par la suite de nombreuses personnalités ont réagi à la séquence au premier rang desquels des joueurs de football africains.
«Il est totalement inconcevable que nous continuions à devoir mettre en garde contre cela. L'Afrique n'est pas un laboratoire d'essais. Je voudrais dénoncer des paroles dégradantes, fausses et surtout profondément racistes […] Ne prenez pas les Africains pour des cobayes humains! C'est absolument dégoûtant... Les dirigeants africains ont la responsabilité de protéger leurs populations contre ces horribles complots», a tempêté, toujours sur le réseau social, l’Ivoirien Didier Drogba, ancienne légende de l'Olympique de Marseille et du Chelsea FC.
It is totally inconceivable we keep on cautioning this.
— Didier Drogba (@didierdrogba) April 2, 2020
Africa isn’t a testing lab.
I would like to vividly denounce those demeaning, false and most of all deeply racists words.
Helps us save Africa with the current ongoing Covid 19 and flatten the curve. pic.twitter.com/41GIpXaIYv
Il a été imité par le Camerounais Samuel Eto'o, dans un style plus direct, qualifiant les intervenants de «fils de putes» sous la publication de Demba Ba.
Des fils de putes.
— Samuel Eto'o (@setoo9) April 2, 2020
«Pourquoi ces médecins veulent prendre l’Afrique comme cobaye..?», s’est demandée la journaliste de CNews Christine Kelly.
Pourquoi ces médecins veulent prendre l’Afrique comme cobaye..? https://t.co/Oijb90rWIV
— Christine KELLY (@christine_kelly) April 2, 2020
Le président de SOS Racisme, Dominique Sopo, a précisé vouloir que son association «interpelle le CSA suite à cette séquence et étudie les suites à donner à de telles déclarations».
Sur @LCI, 2 médecins devisent de faire des Africains des cobayes à des études sur le #COVID19. Le prétexte: "là-bas", il n'y a ni masque, ni traitement. Comme en Europe? @SOS_Racisme interpelle le @CSA suite à cette séquence et étudie les suites à donner à de telles déclarations. pic.twitter.com/tSqUyF8zWB
— Dominique Sopo (@d_sopo) April 2, 2020
De son côté, le syndicat des travailleurs et travailleuses du sexe (STRASS) a également dénoncé les propos des deux scientifiques toujours sur Twitter : «Les travailleuses du sexe africaines et en Asie servent régulièrement de cobayes. Assez des essais non éthiques au profit des labos occidentaux tandis que l'accès aux traitements reste réduit aux pays riches.»
Merci Amandine Gay de signaler ces propos. Les travailleuses du sexe africaines et en Asie servent régulièrement de cobayes. Assez des essais non éthiques au profit des labos occidentaux tandis que l'accès aux traitements reste réduit aux pays riches.https://t.co/E9Zb3cqTZB
— STRASS (@STRASS_Syndicat) April 2, 2020
Visiblement gêné aux entournures, l’Inserm a publié un communiqué, le 2 avril. «Une vidéo tronquée, tirée d’une interview sur LCI d’un de nos chercheur à propos des études sur l’utilisation potentielle du vaccin BCG contre le Covid-19, fait actuellement l’objet d’interprétations erronées», assure l’institut, dénonçant une «fake-news».
«L’Afrique ne doit pas être oubliée ni exclue des recherches car la pandémie est globale. Si les essais internationaux étaient concluants, le vaccin BCG pourrait être une grande aide pour protéger les soignants», est-il souligné dans le document.
#FakeNews Une vidéo tronquée, tirée d’1 interview sur @LCI d’1 de nos chercheurs à propos de l’utilisation potentielle du vaccin #BCG contre le #COVID19 fait l’objet d’interprétations erronées sur les réseaux sociaux. Voici les bonnes explications. ⬇️⬇️ pic.twitter.com/3QRcLgOkso
— Inserm (@Inserm) April 2, 2020