«On n’en a pas parlé, on a écrasé» : Emmanuel Macron évoque la mémoire de la guerre d'Algérie

«On n’en a pas parlé, on a écrasé» : Emmanuel Macron évoque la mémoire de la guerre d'Algérie© Ludovic Marin Source: AFP
Emmanuel Macron rend hommage aux déportés juifs de France au Mémorial de Roglit, près de Jérusalem, le 23 janvier 2020 (image d'illustration).
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Emmanuel Macron a dit souhaiter régler la question mémorielle de la guerre d'Algérie à l'instar de ce qu'avait réalisé Jacques Chirac pour la Shoah. Son prédécesseur avait alors reconnu la responsabilité de la France dans la déportation des Juifs.

Quelques heures après avoir quitté Jérusalem où il avait pris part à la commémoration de la libération d'Auschwitz, Emmanuel Macron a accordé, dans l’avion présidentiel, une interview au Figaro dans laquelle il évoque la sensible question mémorielle et notamment le rapport qu'entretient la France avec la guerre d’Algérie. «Je suis très lucide sur les défis que j’ai devant moi d’un point de vue mémoriel et qui sont politiques. La guerre d’Algérie, sans doute, est le plus dramatique d’entre eux. [...] Je le sais depuis ma campagne», assure-t-il en préambule. 

«J’ai crispé des gens. [Mais] je pense que je les ai ramenés, maintenant, dans une capacité à dialoguer»

La question mémorielle s’était en effet invitée lors de la campagne de l’élection présidentielle de 2017. Depuis Alger, au cours d’une interview accordée au journaliste algérien Khaled Drareni, il avait qualifié la colonisation de «crime contre l’humanité», de «vraie barbarie». Un jugement qui avait alors immédiatement suscité le tollé notamment à droite de l’échiquier politique français et au sein de la communauté pieds noirs.

Le chef de l’Etat n'en démord pas, il n’a commis aucune faute politique : «J’ai crispé des gens. [Mais] je pense que je les ai ramenés, maintenant, dans une capacité à dialoguer.» Concédant ne pas avoir actuellement «la réponse» pour mettre un terme «au conflit mémoriel», il espère néanmoins parachever le travail de mémoire concernant cet épisode douloureux de l'histoire franco-algérienne. «S'il y parvient, ce sujet aura "à peu près le même statut que ce qu’avait la Shoah pour Chirac en 1995"», écrit le Figaro

Le président de la République fait ainsi référence à la reconnaissance, par son prédécesseur, de la responsabilité de la France dans la déportation des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale à l'occasion de la commémoration de la grande rafle des 16 et 17 juillet 1942 communément appelée «rafle du Vél'd'Hiv». «Oui, la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des Français, par l’État français. Il y a cinquante-trois ans, le 16 juillet 1942, 450 policiers et gendarmes français, sous l’autorité de leurs chefs, répondaient aux exigences des nazis», avait-il alors déclaré. 

«On n’en a pas parlé, on a écrasé. [...] Il n’y a pas eu un travail politique mémoriel»

Dans ce sillage, le chef de l’Etat a évoqué les raisons qui, selon lui, expliquent la complexité d’accomplir le travail de mémoire au sujet de la guerre d’Algérie : «On n’en a pas parlé, on a écrasé. [...] Il n’y a pas eu un travail politique mémoriel […]. On a jamais fait ce travail, aussi, parce que le problème c’est que la contrepartie n’est pas là», estime-t-il sans founir plus de détails sur «la contrepartie» qu’il entendait désigner.

Et de conclure à ce sujet : «D’abord, il y a une histoire officielle de la relation à l’Algérie. Il y a une histoire d’État. [...] C’est une histoire très particulière, d’ailleurs, qui a toujours été au cœur d’une histoire militaire héroïque. C’est ensuite un dialogue très particulier avec l’Algérie. [...] Et, ensuite, c’est un traumatisme dans l’histoire d’Etat. Je veux dire : la guerre d’Algérie, c’est ce qui fait la Ve [république]. Et donc c’est, dans la vie institutionnelle, politique, militaire française, quelque chose qui pèse», a enfin conclu Emmanuel Macron sur ce sujet. 

Depuis son accession à l'Elysée, Emmanuel Macron a tenu à clarifier à maintes reprises sa position sur l'histoire coloniale de l'Afrique. Fin novembre 2017, lors de sa visite officielle au Burkina Faso, il avait notamment souligné : «les crimes de la colonisation européenne sont incontestables.» «[C'est] un passé qui doit passer», avait-il toutefois ajouté, alors que la tournée du président français était présentée comme fondatrice de nouveaux rapports entre la France et l'Afrique. 

Lire aussi : Afrique : le discours «antifrançais» est-il le fait de «puissances étrangères» ?

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