Grand schisme en préparation chez Les Républicains ?

Grand schisme en préparation chez Les Républicains ?© Jacques Demarthon Source: AFP
Le siège des Républicains, le 27 mai 2019, jour de bureau politique, dans le XVe arrondissement de Paris (image d'illustration).
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Après la claque reçue par LR lors des dernières européennes, la droite traditionnelle tente de se recomposer. Si certains incitent à des alliances avec le RN, les tenors du parti continuent eux de chasser sur les terres du centre.

Serions-nous en train s’assister à l’éclatement de la droite traditionnelle ? Avec ses 8,5% réalisés lors des élections européennes, le parti des Républicains (LR) se retrouve face à un dilemme : se lancer à la reconquête du centre, et par là, se rapprocher du parti d'Emmanuel Macron, ou droitiser encore un peu plus sa ligne politique, quitte à, dans un des scénarios possibles, contracter des alliances avec le Rassemblement national (RN).

Si de nombreux responsables politiques comme le président du Sénat Gérard Larcher ou la présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse se sont d’ores et déjà prononcés pour un recentrage de la ligne politique du parti, des élus et intellectuels de droite ne voient pas d’autre issue, afin de faire renaître la formation de ses cendres, que de tendre la main en direction du parti dirigé par Marine Le Pen.

Une «rupture» dans la droite républicaine

Présent sur le plateau de RT France le 28 mai, le président de l’organisation Racines d’Avenir, se décrivant comme le «mouvement de la jeunesse conservatrice, entrepreneuriale et populaire», Erik Tegnér, argumente : «Aujourd’hui chez les Républicains, nous avons une déconnexion entre la base et les élus. La base est beaucoup plus proche du RN […] comme sur les thématiques d’immigration et d’identité [...]. Les élus, eux, sont beaucoup plus "macron-compatibles" et l’électorat se dit que LR n’incarne pas une réelle alternative entre LREM et le RN.»

Il explique cette tendance par une «recomposition des clivages», non plus entre «la gauche et la droite» mais entre les «multiculturalistes, comme Emmanuel Macron, et ceux qui veulent défendre une identité, une souveraineté nationale». Il regrette la ligne qu’a adopté le parti pendant la campagne européenne, jugée trop centriste : «La stratégie des Républicains était d’aller draguer l’électoral tenté par Macron et non celui tenté par le Rassemblement national. […] On ne peut pas avoir François-Xavier Bellamy à côté d’Arnaud Danjean ou de Geoffroy Didier.»

D’après Erik Tegnér, la droite est à un tournant de son histoire. «Il faut maintenant acter une rupture dans notre famille politique. La droite, pendant des années, lorsqu’elle était au pouvoir, a gouverné au centre. Nous n’avons jamais eu une réelle politique de droite et avons toujours trahi notre électorat. C’est pour cela que nous sommes à 8,5%», conclut-il, amer.

Une analyse que partage Geoffroy Lejeune, directeur de la rédaction de Valeurs Actuelles, le 28 mai, au micro de RT France : «Les Républicains ont le choix entre fusionner avec Macron, car ils sont d’accord avec lui sur certains points, ou alors avec le Rassemblement national. [Les Républicains pourraient] proposer une alliance de gouvernement dans laquelle ils pourraient garder la présidence de la République et le poste de Premier ministre, mais donner [au RN] un certain nombre de ministère, ce que la droite s’est toujours refusée à faire. Sans une alliance avec une des deux structures, ils n’ont quasiment aucun moyen de s’en sortir […] et il fau[dra] qu’ils se préparent à vivre une dizaine d’années dans l’opposition au minimum.» C’est selon lui «stratégiquement et tactiquement», le «seul moyen pour la droite d’essayer d’imaginer remporter la prochaine élection présidentielle».

Le journaliste Ivan Rioufol, notamment passé par Le Figaro, publiait sur son blog un billet, le 27 mai, dans lequel il dit regretter que «la droite de gouvernement» rejette «l’hypothèse d’un rapprochement avec le RN, alors que celui-ci n’a plus rien de commun avec l’infréquentable FN de Jean-Marie Le Pen». Il prophétise : «Si Les Républicains persistent à regarder de haut un RN qui capte le vote souverainiste, lors de la prochaine présidentielle, en cas de probable nouveau duel Macron-Le Pen, cette dernière aura de grandes chances d’être à nouveau battue, à cause de son isolement.» L’ancien chroniqueur de RTL y voit «une absurdité» qu’il faut «résoudre» au plus vite expliquant que «sur les questions sociétales, les différences entre François-Xavier Bellamy et Jordan Bardella étaient mineures».

La solution au centre ?

Si la droitisation de la ligne du parti semble avoir les faveurs de certains éditorialistes et intellectuels, la tendance que soutiennent les ténors des Républicains est toute autre : chasser sur les terres d’Emmanuel Macron. Le président du Sénat, Gérard Larcher, lançait, le 28 mai sur Franceinfo, son appel à un rassemblement de la droite et du centre hors des frontières des Républicains. Il a également envoyé, le même jour, une lettre aux présidents des groupes parlementaires, ainsi qu’aux associations d’élus, afin de les inviter à Paris le 4 juin, refusant «d’assister, spectateurs, à la désintégration de la droite et du centre qui seuls peuvent représenter une alternance crédible».

Parmi ceux qui ont déjà confirmé leur présence on compte Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France, Xavier Bertrand, président des Hauts-de-France, Christelle Morançais, présidente des Pays-de-Loire, Renaud Muselier, président de la région Paca, Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, Christian Jacob, son homologue au Palais Bourbon ou encore Hervé Marseille, président du groupe Union centriste de la chambre haute. Seul Jean-Christophe Lagarde, président de l’UDI a fait savoir qu’il refusait l’invitation.

Autre exemple : le maire de Quimper, Ludovic Jolivet, a annoncé ce 31 mai qu'il quittait Les Républicains pour rejoindre la formation de centre droit Agir, présidée par le ministre de la Culture Franck Riester. Celle-ci s'était alliée avec LREM pour les élections européennes. 

Les élections municipales approchant, certains comme Claude Goasguen, député de la XIVe circonscription de Paris, militent eux pour des alliances de circonstance avec La République en marche (LREM), notamment à Paris. «J'essaie de toutes mes forces, depuis de longs mois, de demander à ce que les gens se réunissent pour battre Anne Hidalgo. J'essaie que le Premier ministre que j'ai vu plusieurs fois pourra être sollicité, ou des gens comme Borloo etc... Quelqu'un qui soit susceptible de rassembler. Non, nous ne sommes pas plus macronistes que ça, on est anti-Hidalgo surtout», a-t-il déclaré au micro de Sud Radio, le 31 mai.

Une aversion pour le RN qui perdure

L'aversion pour le RN est encore bien présente chez beaucoup d’élus LR. Dans une interview donnée à Nice-Matin, le 27 mai, soit le lendemain des élections européennes, Jean Leonetti, maire LR d’Antibes, est catégorique. «Ce qui nous a fait mal, ce n’est pas tant le RN, qui n’a pas vraiment progressé, c’est la conduite d’Emmanuel Macron pour faire barrage au RN. Les électeurs que nous avons perdus sont allés vers LREM, par souci d’efficacité», argue-t-il, assurant qu’il «n’y a pas d’alliance possible avec le Rassemblement national. La droite et l’extrême droite ne peuvent pas fusionner, leurs histoires et leurs valeurs n’ont rien à voir. Nous n’avons pas les mêmes programmes sociaux, économiques ni européens».

Alors que Laurent Wauquiez est fragilisé, ayant été désigné par Valérie Pécresse ou par le député LR Eric Diard comme responsable de l’échec aux élections européennes, la recomposition à droite risque de faire couler des larmes et du sang. Sur un siège éjectable, le président du parti a proposé, lors du bureau politique tenu le 27 mai, des «états généraux»  à la rentrée afin de «tout remettre à plat». A noter que ni Gerard Larcher ni Bruno Retailleau n’ont participé à la réunion. Faut-il y voir un signe ?

Alexis Le Meur

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