François Ruffin et son journal «Fakir» auraient été espionnés par LVMH, selon Mediapart

François Ruffin et son journal «Fakir» auraient été espionnés par LVMH, selon Mediapart© IROZ GAIZKA Source: AFP
François Ruffin, député de la France Insoumise, devant le site de Sanofi à Mourenx, le 16 octobre 2018 (image d'illustration).
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Témoignages et documents à l’appui, Mediapart affirme que le député insoumis François Ruffin et son journal Fakir, auraient été espionnés entre 2015 et 2016 par LVMH. Le patron de la multinationale, Bernard Arnault, récuse toute implication.

Dans un article publié ce 21 mai, Mediapart affirme que François Ruffin, ainsi que son journal Fakir, auraient été espionnés entre mars 2015 et février 2016 par le cabinet I2F, officiellement spécialisé en stratégie opérationnelle et management du risque. Dirigé par Hervé Seveno, ancien membre de la Division nationale antiterroriste (DNAT) et de la Brigade financière pendant les années 1980 et 1990, le cabinet aurait été mandaté par la multinationale LVMH, dirigée par le milliardaire français Bernard Arnault.

Au cours de la période où se serait déroulée l'opération d’espionnage présumée, François Ruffin – qui n'avait pas encore revêtu son costume de député – réalisait Merci Patron !, son premier documentaire à succès, dans lequel il vient en aide à la famille Klur dont le père et la mère ont été licenciés de l'entreprise Ecce, un sous-traitant du groupe LVMH, après une délocalisation en Pologne.

Selon la police, toujours citée par Mediapart, l’opération aurait été placée sous la supervision de Bernard Squarcini, directeur central du renseignement intérieur (DCRI) sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Reconverti en consultant indépendant au sein de la société Kyrnos Conseil en 2013, il compte parmi ses clients la société LVMH pour laquelle il est officiellement chargé de lutter contre l’importation de produits de luxe contrefaits.

Entendu en début d'année comme témoin dans le cadre d’une enquête contre Bernard Squarcini, Bernard Arnault, a dit de son côté ne disposer d'«aucune information» sur ces opérations d’espionnage, selon le procès-verbal de son audition cité par le média d'investigation.

«Nous restons en alerte»

Pour appuyer ses dires, le site d’investigation a rendu public plusieurs notes de synthèse résumant ces surveillances. Dans une note de mars 2015, sur laquelle figure le logo du cabinet, est inscrit le commentaire suivant : «Le suivi de Fakir depuis ce début d’année, à travers plusieurs réunions internes ou publiques, amène à penser que François Ruffin a désormais une liberté totale dans ses opérations. En effet, E., coordinateur de Fakir, a finalement démissionné à la suite de désaccords avec François Ruffin. C’est désormais J., la compagne de François Ruffin, qui coordonne les actions de Fakir.» Mediapart précise qu’il a volontairement décidé de ne pas dévoiler les identités complètes de «E.» et «J.».

Citant une autre note en date du 15 avril 2015, Mediapart assure que des «barbouzes au services de LVMH» auraient relevé la plaque d’immatriculation d’un véhicule appartenant au journal indépendant.

François Ruffin et son journal «Fakir» auraient été espionnés par LVMH, selon Mediapart© Mediapart
Capture d'écran d'une note provenant d'un rapport attribué au cabinet I2F sur François Ruffin et le journal «Fakir».

I2F aurait par ailleurs réussi à se procurer un mail dans lequel il est fait état de «l’organisation d’une éventuelle opération du journal» pour perturber une assemblée générale de LVMH. «Nous restons en alerte», conclut la note à ce sujet.  

Joint par Mediapart, Hervé Seveno confirme et justifie ses missions pour le compte de LVMH : «Je ne peux pas mentionner le nom de mon commanditaire parce que je suis tenu par des clauses de confidentialité. Mais il est exact qu'on nous avait demandé une cartographie de Fakir, c'est ma spécialité. Il faut comprendre qu'il existe parfois des groupes activistes qui, sous couvert d'altermondialisme, mènent des opérations offensives. Certains veulent du coup savoir qui ils sont, comment ils sont financés, ce qu'ils prévoient.»

Dans les rangs des enquêteurs missionnés par I2F figure également Jean-Charles Brisard. Cet expert médiatique en terrorisme a également confirmé à Mediapart avoir planché sur le cas Fakir. Il nie toutefois avoir mené une quelconque activité d'espionnage. Son travail se serait en effet borné à la réalisation d'un trombinoscope des membres de l’équipe ou à la rédaction d’un agenda des événements du journal.

«J’ai fait de la veille, c’est vrai, sur ses publications, ses activités et les événements qu’il organisait. Mais je ne me suis jamais intéressé à la vie privée de quiconque. Il faut savoir qu’à l’époque, beaucoup de groupes, pas que LVMH, s’intéressaient à la propagande de Fakir. J’ai donc fait des notes que je faisais passer», explique-t-il, sans pour autant démentir ou confirmer l’existence de lien entre sa personne et la société I2F.

Un autre cabinet appelé en renfort ?

Mediapart affirme enfin qu’un autre cabinet aurait travaillé sur Fakir avant la première opération présumée d’espionnage. Se référant à un témoignage publié en décembre 2016 dans L’Obs d’un ancien conseiller en sécurité de LVMH, Jean-François Digeon, le média écrit que Bernard Squarcini aurait déjà fait espionner Fakir en 2014 en passant par une «taupe».

 «Il m’a dit que c’était un informateur en poste au sein de Fakir, une taupe quoi, qui travaillait pour une société d’intelligence économique qui avait fait les poubelles de Fakir ou piqué des documents», avait-il confié à la police en septembre 2016, dans le cadre d’une enquête ouverte contre l’ancien patron de la DCRI.

Un mois après, devant les juges Tournaire et Buresi, il avait rapporté une scène ubuesque lors d’une assemblée générale de LVMH en avril 2014 : «Il y a eu beaucoup de remue-ménage par les gens de Fakir qui ont essayé de s’y introduire[…] J’ai intercepté un des chahuteurs et c’est comme ça que j’ai chopé la taupe. Il m’a dit que c’était lui la taupe. Il m’a dit : "Laissez-moi, laissez-moi, demandez, c’est moi la taupe !"» Avant d’ajouter : «J’ai demandé confirmation et on m’a dit que c’était vrai.»

«C’est toi la taupe ?» : entre humour et dénonciation, François Ruffin réagit aux révélations de Mediapart   

Quelques heures après la publication de Mediapart, le député de la première circonscription de la Somme a réagi par le biais d’une vidéo postée sur Twitter. «On apprend aujourd’hui que les deux Bernard, Arnault et Squarcini, s’appliquent à me surveiller, moi, Fakir et mes proches. Je tiens surtout à souligner une chose : la porosité entre la surveillance privée et la police nationale. Une police nationale devenue police des PDG», écrit-il en commentaire d’une vidéo dans laquelle, il fustige non sans humour ses «deux Bernard préférés».  

«C’est toi la taupe ? Parce qu’on ne sait pas qui c’est. Marie-Laure n’était pas là ce moment-là donc je sais que c’est pas elle mais toi Sylvain, t’étais déjà là», ironise-t-il en préambule de son intervention tout en s’adressant à des personnes qui n’apparaissent pas devant la caméra.

«Ils se sont mis à espionner ma vie privée, mais il n’y a pas tout. Je ne sais pas s’il va y avoir les prochains épisodes ou pas, c’est un peu le suspense», ajoute-t-il sur le même ton. «C’est une manie qu’il a mon copain Bernard, Arnault, le seul, le vrai. Il a toujours espionné ses adversaires [...] il procédait à des mesures d’espionnage, il cachait des micros tout ça, c’est expliqué dans [l’émission] Envoyé spécial», poursuit-il.

Déplorant avoir fait l’objet d’un fichage auprès de la police pour avoir «instauré un peu de démocratie dans les assemblées générales des actionnaires», il annonce enfin qu’il étudie l’éventualité de porter plainte et de se constituer partie civile.

Lire aussi : Mediapart publie un enregistrement inédit où Benalla et Crase discuteraient de détruire les preuves

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