L'heure du remaniement a-t-elle sonné pour Emmanuel Macron ?
Après un hiver mouvementé, le président de la République pourrait être séduit par un changement de gouvernement. Selon plusieurs commentateurs, l'hypothèse se précise. Encore faut-il qu'Emmanuel Macron trouve le bon casting...
Emmanuel Macron cédera-t-il à la tentation du remaniement chère à presque tous les présidents de la Ve République ? Seul Nicolas Sarkozy avait conservé le même Premier ministre, François Fillon, durant toute la durée de son mandat entre 2007 et 2012. Si la cote de popularité d'Emmanuel Macron semble peu à peu remonter, l'affaire Benalla a sévèrement écorné l'image du «nouveau monde» qu'il entendait promouvoir et les mobilisation des Gilets jaunes a mis un coup de frein au train des réformes. L'hypothèse d'un changement de gouvernement, pour trouver un nouveau souffle après un an et demi de mandat, se profile donc.
Le chroniqueur politique d'Europe 1 Michaël Darmon affirme sur Europe 1 le 28 février que cette option «circule dans les couloirs du gouvernement». «Ce remaniement pourrait intervenir fin mars ou début avril afin de permettre aux candidats éventuels aux élections européennes et peut-être municipales de se déclarer», ajoute-t-il. Le Monde du 27 février précise en effet que la consigne de l'Elysée est claire : «"Si un ministre est tête de liste ou en position éligible pour les élections européennes, il devra démissionner", afin de se consacrer à la campagne puis siéger au Parlement européen». Et pour cause, certains ministres ont déjà fait connaître leurs ambitions. Le secrétaire d'Etat chargé du Numérique Mounir Mahjoub et le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux ne font pas mystère qu'ils sont tous deux intéressés pour briguer la mairie de Paris en 2020.
La République en marche (LREM) doit aussi trouver ses têtes de liste pour les élections européennes du 26 mai. Il se murmure que la ministre chargée des Affaires européennes Nathalie Loiseau serait la favorite pour représenter LREM.
Une députée LaREM sur l'hypothèse Nathalie Loiseau tête de liste aux #européennes: "Son nom revient régulièrement. Pourquoi pas, mais alors il faudrait qu'elle soit bien entourée. Qu'elle se place au-dessus de la mêlée et qu'elle laisse d'autres aller au front" - @BFMTV
— Jules Pecnard (@JulesPec) 18 février 2019
D'autres considèrent que Nathalie Loiseau pourrait d'ailleurs être épaulée par d'autres membres du gouvernement pour muscler la liste macroniste en vue des européennes, cette élection faisant figure de grand test électoral pour la macronie depuis son accession au pouvoir en 2017. Ainsi, la ministre de la Santé Agnès Buzyn serait également pressentie pour être candidate, voire tête de liste. Le garde des sceaux Nicole Belloubet a elle aussi admis sur France 3 le 24 février, avec un trait d'humour, un possible ticket entre elle et Agnès Buzyn pour mener les marcheurs.
Sera-t-elle tête de la liste macroniste-centriste aux européennes? la partagera-t-elle avec Agnès Buzyn, Nicole Belloubet? Elle est prête au combat pour réveiller le fantôme de l'Europe! Demain à 7h20 avec Nathalie Loiseau, Ministre des affaires européennes @CNEWS
— JP Elkabbach (@JP_Elkabbach) 28 février 2019
Credo européen pour @NBelloubet, qui envisage avec humour une éventuelle candidature. #Europeennes2019@letellier_ftv@nbongarcon@France3tvpic.twitter.com/erwDdrWmNu
— DimancheEnPolitique (@DimPolitique) 24 février 2019
Si les membres du gouvernement convoitent un mandat électoral, Emmanuel Macron devra donc réattribuer certains portefeuilles ministériels. La mission n'est pas simple, étant donné que l'exécutif a jusqu'à présent eu bien du mal à trouver rapidement des successeurs aux derniers ministres démissionnaires tels Nicolas Hulot (démissionnaire au 28 août du ministère de la Transition écologique) ou Gérard Collomb (ministre de l'Intérieur jusqu'au 2 octobre).
Qui comme Premier ministre ?
Toutefois, le principal enjeu d'un remaniement reste le maintien ou non d'Edouard Philippe à la tête du gouvernement. Le choix du changement peut être un risque pour Emmanuel Macron, qui risquerait de rompre une apparente stabilité. Dans tous les cas, des noms circulent déjà...
Le chef de l'Etat pourrait rendre la pareille à François Bayrou, l'un des premiers centristes à avoir soutenu la candidature macronienne à la présidentielle, après l'échec d'Alain Juppé lors des primaires de la droite en novembre 2016. Ex-ministre de la Justice au début du quinquennat, François Bayrou avait rapidement été contraint de démissionner au bout d'un mois, après la médiatisation de l'affaire des assistants parlementaires du Modem au Parlement européen. Depuis, le patron du Modem fait le dos rond, espérant certainement récolter les fruits de son alliance et de son soutien indéfectibles envers Emmanuel Macron.
Autre possibilité, à l'issue du grand débat national mi-mars : Emmanuel Macron pourrait tenter de rassurer sa jambe gauche et l'électorat socialiste, en nommant une personnalité de la macronie représentant cette tendance politique. Considéré comme l'un des ministres les plus populaires du gouvernement, actuellement aux Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian pourrait apparaître comme une option avantageuse. En effet, depuis le quinquennat de François Hollande, lorsqu'il était ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian semble faire consensus, y compris au sein d'une partie de l'opposition. C'est également pour cette raison qu'Emmanuel Macron pourrait donc préférer préserver cette bonne carte pour ne pas affaiblir ce qui semble être un atout pour la majorité.
Pour conforter son image qu'il veut progressiste et moderne, Emmanuel Macron pourrait en revanche faire le pari d'une femme, avec la médiatique secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa. Le dernier épisode d'une femme Premier ministre remonte à Edith Cresson (11 mois entre 1991 et 1992), qui avait subi de concert les foudres de l'opposition et d'une grande partie de son propre camp. Le choix de Marlène Schiappa serait un défi d'autant plus risqué qu'elle est habituée aux polémiques, la dernière en date étant celle suscitée par sa comparaison le 20 février 2019 entre les militants de la Manif pour tous et le terrorisme islamiste.
Bastien Gouly
Lire aussi : «Explosif» : Edouard Philippe évoque des «contreparties» aux aides sociales