Retour en France des enfants de djihadistes : une menace pour la sécurité nationale ?
Plusieurs officiels se sont exprimés sur le retour dans le pays des enfants de djihadistes, après qu'Emmanuel Marcon a préconisé un examen des dossiers au cas par cas. Ils appellent à protéger la France.
Avec la reconquête des positions l'Etat islamique (EI) en Irak et en Syrie, la question du retour des familles de djihadistes, et particulièrement des femmes et des enfants, se pose de manière aiguë. Début novembre, les services de renseignement français comptabilisaient «quelques dizaines» de djihadistes de nationalité française capturés par les forces qui combattent Daesh.
Interrogé à ce sujet en marge de l'inauguration du Louvre Abu Dhabi, le président Emmanuel Macron avait proposé d’examiner chaque dossier individuellement : «Pour les femmes et les enfants, ce sera du cas par cas, en fonction des situations.» Depuis, d’autres officiels ont fait connaître leur position, appelant à la vigilance et la protection nationale.
Mise en garde et appel à la lucidité
Les appels au djihad s'adressent aussi aux femmes et aux mineurs
On estime que 690 djihadistes français résident encore en Syrie et en Irak, dont 295 femmes et 28 mineurs combattants de plus de 15 ans répertoriés avant leur départ. Le procureur de Paris, François Molins, au micro de France Info le 10 novembre, l'a rappelé et a réagi aux propos du président : «Je pense que la notion de cas par cas est une approche pragmatique et pleine de bon sens», a-t-il précisé. Parmi les femmes et les mineurs qui se sont rendus dans cette zone, «certains ont été formés au maniement des armes [et] dans le même temps, les appels au djihad s'adressent aussi aux femmes et aux mineurs», a-t-il ajouté.
Selon lui, environ 400 mineurs français de moins de 15 ans se trouveraient actuellement en Irak et en Syrie. «Les femmes parties là-bas avaient un rôle de génitrice. Il fallait procréer pour augmenter les troupes et les recrues [du groupe] Etat islamique, donc il y a eu effectivement beaucoup de maternités et beaucoup de naissances», a souligné François Molins.
Il faut se départir de toute naïveté
«Je crois que dans ce dossier, il faut se départir de toute naïveté» au sujet des djihadistes et de leur famille dans les zones de combat, a prévenu l'homme qui dirige le parquet antiterroriste.
Il évoque, ainsi, le retour de certains intégristes. «Je n'ai pas perçu véritablement de regrets dans ce que j'ai entendu», a-t-il ajouté. Il estime de manière générale, être face à des gens qui sont «plus déçus que repentis».
"Revenants" d'Irak et de Syrie : "Le retour concerne un certain nombre de femmes, le plus souvent des veuves avec des enfants" affirme François Molins : "la notion du cas par cas est une approche pragmatique et pleine de bon sens" #8h30Politiquepic.twitter.com/VME2DDoknY
— franceinfo (@franceinfo) 10 novembre 2017
Nicolas Bay : «Ce qui est important aujourd'hui, c'est de protéger la France»
Des hommes politiques ont également donné leur avis. Nicolas Bay, vice-président du Front national (FN), interrogé sur LCP le 10 novembre, a estimé que les djihadistes français devaient «assumer». «Les conjoints qui, de façon délibérée, les ont suivis sont dans le même cas», a-t-il ajouté. Mais concernant la progéniture des combattants, sa position est plus souple : «S'agissant d'enfants, s'ils sont de nationalité française évidemment, il faut essayer autant que possible de les protéger, mais ce qui est important aujourd'hui, c'est de protéger la France.»
Enfants de djihadistes : "S'ils sont Français, il faut essayer, autant que faire se peut, de les protéger" @nicolasbayfn#PolMatpic.twitter.com/lYSnyzSgkr
— LCP (@LCP) 10 novembre 2017
Ils ont vocation à revenir sur le territoire français
Sébastien Chenu, porte-parole du FN, a estimé le 10 novembre sur BFMTV et RMC que les enfants français de djihadistes avaient vocation à revenir sur le territoire français. Pour «les mineurs, évidemment, il n'y a pas de problème», a affirmé le porte-parole. Pour lui, les enfants qui reviennent doivent «être pris en charge ou par leurs familles s'ils en ont, et si ces familles-là n'ont pas de lien avec le terrorisme évidemment, ou bien être placés dans les administrations chargées de l'accueil de l'enfance».
Le député sans étiquette et ex-Premier ministre socialiste Manuel Valls avait lui aussi évoqué le sort des familles de djihadistes, lors du «Grand rendez-vous» sur Europe 1/CNews/Les Echos du 5 novembre. «Certains sont revenus, leur place est en prison et ces familles doivent passer devant les tribunaux», avait martelé l'ancien Premier ministre. «Est-ce qu’il faut les rapatrier ?», lui avait demandé la journaliste Laurence Ferrari. «Je pense que non», lui avait rétorqué l’ancien Manuel Valls.
Faut-il les rapatrier ? "Je pense que non, parce qu'il y a un moment où la responsabilité d'une famille doit s'imposer et que ce n'est pas à nous d'aller les chercher", selon @manuelvalls#LeGrandRDV
— Europe 1 (@Europe1) 5 novembre 2017
La question du retour des enfants de djihadistes ne soulève pas des inquiétudes qu'en France : le chef des services de renseignement allemands a récemment fait savoir que «les enfants du djihad» pourraient représenter une menace future, en raison notamment des personnes avec lesquelles ils ont été en contact.