Sénatoriales : le palais du Luxembourg, refuge pour les naufragés de la vague LREM en 2017 ?

Sénatoriales : le palais du Luxembourg, refuge pour les naufragés de la vague LREM en 2017 ?
Le palais du Luxembourg, siège du Sénat et ses jardins, illustration ©JACQUES DEMARTHON / AFP
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A l'occasion du renouvellement partiel du Sénat, pas moins de 1 996 candidats, un record, briguent seulement 171 sièges. Avec à la clé six ans de tranquillité, loin d'une Assemblée nationale «En Marche»... et des aléas du suffrage universel direct.

A l'occasion de son renouvellement partiel, comme tous les trois ans, le Sénat n'a jamais vu autant de candidats : 1 971 pour seulement 171 sièges ! Mais pourquoi un tel engouement ? Sont-ils attirés par les ors très Grand-Siècle du palais du Luxembourg légués à la République par la monarchie, ou encore les généreuses indemnités parlementaires octroyées aux sénateurs ? Peut être les postulants souhaitent-ils tout simplement trouver un point de chute, après une séquence électorale particulièrement meurtrière pour les partis historiques en 2017. Car les élections présidentielle et législatives ont renversé la table et fait de nombreuses victimes parmi les députés, au premier rang desquels ceux du Parti socialiste.

Pourtant, les sénatoriales paraissent loin des préoccupations des Français, et pour cause : ceux-ci ne participent pas directement au suffrage. Ces derniers sont en effet désignés par un collège de grands électeurs, dont le mode de composition est mal connu du grand public. Poussiéreux, archaïque, vestige monarchique... les critiques ne manquent pas à l'encontre de la Chambre haute du Parlement français. «Il faudra détruire ce Sénat», estimait ainsi le général de Gaulle, qui préconisait sa suppression au profit d'une seule assemblée et d'un conseil de la République. C'est peut-être la raison pour laquelle l'Assemblée nationale n'a pas été baptisée «Chambre des députés» – la Chambre basse du parlement – comme sous les IIIe et IVe républiques.

Les aléas du suffrage universel direct

Pour les hommes politiques, son existence semble en revanche plus importante que jamais. Car les législatives ont été cruelles, en particulier pour les membres du gouvernement de François Hollande. Elizabeth Guigou, Najat Vallaud-Belkacem, Myriam El Khomri, Jean-Christophe Cambadélis...nombreux sont ceux qui ont tout simplement disparu des radars. Une mort – exécution même – politique que d'autres ont esquivée de peu. Comme Manuel Valls, qui n'a dû sa réélection comme député de l'Essonne qu'à la mansuétude du parti présidentiel, lequel a consenti à ne pas lui opposer de candidat. Et encore, l'ex-Premier ministre socialiste a-t-il eu chaud, ne l'emportant sur la candidate de La France insoumise que de quelques dizaines de voix, de surcroît dans des circonstances controversées. Pour ceux qui n'ont pas rejoint les rangs de La République en marche à temps, leur carrière politique est ainsi devenue hasardeuse, voire périlleuse.

Le confort du palais du Luxembourg

Mais surtout, les logiques de cooptation, en dépit des réformes successives, s'y appliquent toujours. Or la cooptation est une sorte d'assurance-vie en politique. C'est elle qui permet de décrocher la précieuse investiture pour se présenter comme député, avant d'affronter le suffrage universel. C'est elle aussi qui permet, via les accords de désistement conclus entre les appareils de partis, de réduire un peu la glorieuse incertitude du suffrage universel.

Au Sénat, le fleuve est encore plus tranquille. Les sénateurs seront désignés par environ 76 359 grands électeurs qui sont pour partie... des députés et des sénateurs issus des circonscriptions à pourvoir. Afin d'ancrer le Sénat dans les territoires qu'il a pour mission de représenter, une autre partie, grosso modo, se recrute dans le vivier des élus locaux : conseillers régionaux, départementaux et municipaux. Le scrutin indirect favorise habituellement la stabilité au Sénat, assemblée toujours à droite à l'exception d'une courte parenthèse de trois années, de 2011 à 2014qui devrait cette fois encore le rester. Le corps électoral, composé principalement d'élus locaux (maires, conseillers municipaux, régionaux ou départementaux) reflète en effet les résultats des municipales 2014, remportées par la droite.

C'est donc cette clientèle que les candidats doivent séduire, ce qui explique sans doute les noms exotiques des listes de candidats pour celles des circonscriptions dotées de plus de deux sénateurs, où le scrutin se fait à la proportionnelle. La liste Divers gauche de la circonscription du Pas-de-Calais s'est ainsi baptisée «Solidarité, respect et proximité au service des élus».

Dans la circonscription du Nord, le socialiste Patrick Kanner, ancien ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports de Manuel Valls, écarté des législatives par les manœuvres de Martine Aubry au profit de François Lamy, également ancien ministre socialiste, ne perd finalement pas au change avec les sénatoriales, après la débâcle du Parti socialiste en juin 2017. Il n'est pas le seul : un certain nombre de députés, battus aux législatives tentent ainsi de rebondir au Sénat, tel Laurent Baumel, ancien député chevènementiste, candidat malheureux à sa succession en Indre-et-Loire, et qui s'est placé en tête de la liste socialiste dans la circonscription.

LREM, phare dans la nuit ?

Mais c'est le refrain du moment : la meilleure stratégie est encore de se ranger sous la bannière de LREM. Car le mouvement de transvasement entre le Parti socialiste, mais aussi Les Républicains, vers La République en marche touche aussi le Sénat. Le parti présidentiel dispose déjà d'un groupe de 29 sénateurs et présente 158 candidats. Dans l'Essonne, par exemple, le sénateur socialiste sortant Michel Berson est candidat à sa succession sous les couleurs de LREM.

Dans cette circonscription, où Jean-Vincent Placé a renoncé à se représenter, Manuel Valls a également vu sa liste, «L'Essonne qui se bat !», emmenée par Olivier Leonhardt, maire socialiste de Sainte-Geneviève-des-Bois et président de Cœur d’Essonne agglomération, refusée par la commission d'investiture de LREM. «Nous ne pouvons pas prendre le risque de perdre tous les sièges [socialistes] au Sénat, s’inquiétait en juillet dernier Michel Berson, sénateur socialiste sortant passé opportunément au parti d'Emmanuel Macron. «J’appelle donc à constituer une liste En marche, qui rassemblerait des élus autour des valeurs de la majorité présidentielle», exhortait-il alors. En vain. Les temps sont durs en Macronie...

Alexandre Keller

Lire aussi : «La tronche de Macron ne suffira pas» : contexte favorable pour l'opposition aux sénatoriales ?

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