Renoncer au gaz russe plongerait l'Allemagne dans la récession selon des économistes
- Avec AFP
Les cinq principaux instituts économiques allemands ont publié un rapport dans lequel ils prédisent qu’un arrêt à court terme des importations de gaz bon marché plongerait le pays dans une sévère récession.
Alors qu’un embargo européen sur le gaz russe fait l'objet d'âpres pourparlers entre les Etats membres de l'UE, les principaux instituts d'analyse économique allemands (DIW, IFO, IfW, IWH et RWI) ont estimé, dans un communiqué commun daté du 13 avril, que l'Allemagne plongerait dans la récession en 2023 en cas d'interruption immédiate des flux de gaz.
En 2023, le Produit intérieur brut (PIB) de la première économie européenne reculerait ainsi de 2,2% et la perte de création de richesse cumulée sur 2022 et 2023 s'élèverait à environ 220 milliards d'euros, ou 6,5% de la richesse annuelle. L'activité se contracterait notamment de 5% au deuxième trimestre de 2023, avant de repartir en fin d'année. Mais ils anticipent un «autre revers à l'hiver 2023/2024». L'économie allemande souffrirait en raison d'une énergie devenue «sensiblement plus chère», avec un renchérissement appelé à durer en raison de la transition vers d'autres sources d'approvisionnement.
Berlin, qui achetait avant le conflit en Ukraine plus de la moitié de son gaz auprès de la Russie, a déjà réduit cette part à 40%, multipliant les démarches pour trouver des alternatives et accélérant sa conversion aux renouvelables. Mais l'Allemagne n'envisage pas de pouvoir se passer de gaz russe avant mi-2024. Et selon les économistes des cinq instituts le prix à payer pour une transformation radicale du modèle énergétique sera élevé, «même après que la situation militaire et politique se sera à nouveau calmée».
Basf cesserait sa production en Allemagne
Parmi eux, Stefan Kooths, vice-président de l'institut IfW de Kiel ajoute que cela «signifie qu'il n'y aura pas d'avenir pour tous les modèles d'entreprises qui ont été rentables en Allemagne dans le passé ». Et il appelle «la politique économique à en tenir compte». Le géant de la chimie BASF a déjà déclaré qu'il devrait cesser sa production en Allemagne si les fournitures de gaz russe s'arrêtaient subitement.
A long terme cependant, les économistes parient que ces changements structurels ne devraient «pas affaiblir l'économie européenne mais plutôt la renforcer en misant sur d'autres sources d'énergie qui sont plus prometteuses pour l'avenir». Ils ajoutent que l'économie allemande «traverse des eaux difficiles» et ce, au moment où la levée des restrictions liées à la pandémie laissait présager d'un coup de fouet à l'activité.
Dans leur rapport, les économistes allemands soulignent que les chaînes d’approvisionnement mondiales sont toujours sous tension alors que des restrictions sanitaires nouvelles frappent la Chine. De nombreux secteurs industriels ont du mal à s'approvisionner en composants et matières premières.
Les conséquences de la guerre en Ukraine amènent ces six instituts à tailler dans leur prévision de croissance pour 2022, désormais attendue à 2,7% – et 1,9% en cas de coupure du gaz russe – contre une estimation à 4,8% en octobre.