En Russie, on réfléchit au passage à la semaine de travail de 4 jours d’ici une quinzaine d’années
Le Premier ministre russe est convaincu que les avancées technologiques entraîneront une réduction de la durée hebdomadaire du temps de travail. Mais la population redoute une réduction de salaires et le patronat demande un délai de 15 ans.
Malgré un accueil mitigé tant dans la population qu’au sein du patronat, Dmitri Medvedev, le Premier ministre russe, n’a pas renoncé à son idée d’adapter la société russe aux défis de la révolution industrielle 4.0 en faisant passer la semaine de travail de cinq à quatre jours.
Il a avancé cette idée à Genève le 11 juin, à l’occasion de la 108e conférence de l’Organisation mondiale du travail. Mais en Russie cette idée a immédiatement suscité un grand scepticisme. Le jour même, Alexandre Safonov, vice-recteur de l’Académie du travail et des relations sociales, et ancien ministre de la Santé, interrogé par l’agence TASS a déclaré que cette question, ne serait «pas d’actualité avant 10 ou 15 ans».
Il a aussi estimé que le maintien de l’activité du secteur public (administration, enseignement, santé), lequel emploie environ 14 millions de personnes, nécessiterait des recrutements et donc une augmentation de la masse salariale qui constitue un luxe que le pays ne peut pour le moment pas se permettre.
Alexandre Chokhine, lui aussi ancien ministre et actuel président du RSPP, acronyme russe d’Union des entrepreneurs et industriels de Russie, équivalent du Medef, a le même jour envisagé la même échéance en déclarant à l’agence de presse russe que ce changement était envisageable, mais à l’horizon 2035 et exigerait une augmentation de la productivité moyenne de 20%.
48% des Russes opposés à la semaine de 4 jours
Deux semaines plus tard, l’institut de sondage russe Vtsiom rendait les conclusions d’une enquête d’opinion selon laquelle 48% des personnes interrogées étaient opposées au passage à la semaine de quatre jours et 37% n’en attendaient pas d’effets positifs. Seuls 29% s’y sont déclarées favorables ; elles appartiennent en majorité à la classe d’âge des 25-34, et vivent à Moscou, Saint-Pétersbourg ou dans les autres métropoles de plus d’un million d’habitants.
Mais surtout 82% se sont dits convaincus que ce changement de la durée hebdomadaire de travail légale s’accompagnerait d’une réduction des salaires, une perspective insupportable pour les couches sociales les moins favorisées.
Mais ces appréhensions n’ont pas enterré la question. Ainsi, le 23 août Dmitri Medvedev a reçu le patron du RSPP et déclaré à l’issue de cet entretien : «Il est évident que nous devons aussi envisager pour l’avenir des changements dans le droit du travail en ayant à l’esprit des évolutions comme le télétravail, le temps partiel ou aménagé et la perspective d’un possible passage à la semaine de quatre jours.»
Le chef du gouvernement a tenu toutefois tenu à temporiser en ajoutant que cette évolution n’était «pas pour tout de suite», et que le passage à la semaine de quatre jours devait se faire au prix d’une augmentation de la productivité et sans réduction de salaire. Il a aussi annoncé qu’il avait demandé à plusieurs ministres de travailler sur cette question et à demandé au président de l’organisation patronale de faire de même.
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