Le journal Que choisir épingle le roi du poulet frit KFC, accusé d'évasion fiscale
Le magazine Que choisir publie une enquête édifiante sur KFC. Malgré des bénéfices en France, l'enseigne pratiquerait ainsi l'évasion fiscale pour ne payer aucun impôt, tandis que leurs salariés dénoncent des conditions de travail déplorables.
Alerté par des salariés, le média de défense des consommateurs Que choisir a réalisé une enquête dans son édition de mars qui écorne l'image de l'un des leaders de la restauration rapide, KFC.
D'après le mensuel, les salariés apprennent par surprise de leur employeur KFC, en décembre 2016, qu'ils ne recevront pas de participation aux bénéfices, l'enseigne française ayant des comptes dans le rouge. Le roi du poulet frit serait-il en crise ? Pas du tout, d'après Que Choisir. En effet, entre 2011 et 2017, le chiffre d'affaires de KFC France a même progressé de 58%, grâce à l'ouverture d'«une dizaine de restaurants supplémentaires chaque année» – soit plus de 200 actuellement contre 36 en 2005. Interrogé par le journal, un expert précise même que la France «serait [pour KFC] le pays le plus rentable d'Europe».
Que Choisir s'interroge : comment KFC France parvient-il donc à déclarer un déficit cumulé de 30 millions d'euros début 2017 ?
Un déficit qui justifie qu'aucun impôt ne soit payé sur le sol français par la société et ce, depuis 15 ans, selon le magazine. Par le biais de documents analysés par le cabinet d'expertise comptable Diagoris, Que Choisir a ainsi pu découvrir que, courant 2016, KFC France avait redistribué près de 27 millions d'euros de «charges intragroupes». KFC France a réalisé ces transactions vers KFC Holding dans l'Etat du Delaware, aux Etats-Unis, vers «deux sociétés sœurs immobilières» et vers KFC Restaurants Asia à Singapour, «asséchant intégralement les bénéfices réalisés en France». Précision : Singapour et l'Etat du Delaware sont considérés comme des paradis fiscaux par plusieurs organisations internationales, comme l'ONG Tax Justice Network (TJN).
Questionné par Que Choisir, KFC France «conteste les conclusions» de Diagoris et atteste que «tous ses revenus sont bien taxés en France», sans toutefois «donner plus de précision». Sauf qu'en attendant, les salariés tirent la sonnette d'alarme.
Des salariés victimes de leur employeur ?
Ne touchant aucune participation, les salariés de KFC subissent le contrecoup des déficits ainsi publiés, permettant de fait à leur employeur de justifier des «réductions d'effectifs». En conséquence, Diagoris estime que l'effectif moyen des employés a été «réduit de 1,2 personne par restaurant entre 2015 et 2016». Et le personnel de dénoncer les conditions de travail «de plus en plus infernales [...] des conditions d'hygiène et de sécurité déplorables». D'ailleurs, Diagoris constate une hausse du nombre d'heures travaillées par personne, et des élus syndicaux de remarquer que les salariés n'étaient pas pour autant «payés plus».
Ouest-France a informé fin février que des salariés d'une enseigne à Angers poursuivaient en justice KFC «pour harcèlement professionnel et travail dissimulé». Les prud'hommes de Paris ont également été saisis par des salariés pour «privation des contreparties en repos et congés payés» après que ceux-ci ont effectué plusieurs milliers d'heures qui auraient dû donner droit à des compensations de la part de KFC France.
KFC a touché 10 millions d'euros d'aide publique par le CICE
Un constat noir qui peut surprendre lorsque Que Choisir note que KFC a perçu près de 10 millions d'euros d'aide publique à travers le crédit d'impôt à la compétitivité de l'emploi (CICE), mis en place en 2013 par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, attiré par la promesse du président du Medef, Pierre Gattaz, de créer «1 million d'emplois».
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