La Guinée-Bissau entame une campagne de 21 jours pour les élections générales
© mtcurado Source: Gettyimages.ruDans un climat d’instabilité politique et institutionnelle, la Guinée-Bissau démarre la campagne électorale présidentielle et législative avec un mot d’ordre : restaurer la stabilité dans un pays qui vient d’annoncer une tentative de coup d'État déjouée, juste avant le début de la course électorale.
L’histoire politique de la Guinée-Bissau entame un nouveau volet crucial avec le coup d’envoi le 1ᵉʳ novembre de la campagne électorale pour la présidentielle et les législatives. Les 860 000 électeurs bissau-guinéens sont appelés aux urnes, dès le 23 novembre, pour élire un président de la République et les 102 députés de la nouvelle Assemblée nationale populaire.
Au bout de près de deux ans après la seconde dissolution du Parlement et plusieurs mois d’instabilité institutionnelle, 14 partis politiques sont en lice pour remporter les 102 sièges de la nouvelle Assemblée nationale dans le cadre de l’élection législative. Pour la présidentielle, 12 candidats, dont le président sortant Umaro Sissoco Embaló et son prédécesseur José Mario Vaz sont en lice. Pour les dix autres candidats, ils sont des figures issues de la société civile, des anciens ministres ou encore des militaires à la retraite.
La stabilité représente l’enjeu majeur pour ces élections, dans un pays où la vie politique a été régie, jusqu’à ce jour, par les coups d’État, les crises militaires et les rivalités claniques.
En campagne sans « gilet pare-balles »
La veille du lancement de la course électorale, le général Mamadu Ture, chef adjoint d’état-major de l’armée bissau-guinéenne, a annoncé, lors d’une conférence de presse, une tentative de putsch déjouée, impliquant plusieurs officiers, et une enquête en cours pour déterminer les responsabilités. C’est dans ce contexte que le président sortant Umaro Sissoco Embaló a ouvert la campagne présidentielle, dans le quartier populaire Bairro de Ajuda. Le candidat tente de se présenter en tant que dirigeant confiant et proche du peuple, malgré l’instabilité politique et institutionnelle. Lors d’un meeting devant ses partisans, il a opté pour l’ironie concernant la tentative de coup d'État, en déclarant qu’il comptait mener sa campagne électorale sans porter de « gilet pare-balles ».
« Regardez, moi non plus, je n’ai pas de gilet. Que celui qui veut la confrontation vienne, aucun d’entre nous ne porte de gilet. Nous sommes venus au pouvoir par les urnes, nous partirons de là par les urnes. Rien d’autre que cela », a-t-il lancé à ses partisans.
Un scrutin sans le parti historique d’opposition
Les élections en Guinée-Bissau se feront sans le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), une formation historique qui avait mené à l’indépendance du pays pour ensuite largement dominer sa vie politique. La formation politique avait été exclue des scrutins présidentiel et législatif pour irrégularités administratives, selon des sources officielles.
Face à cette disqualification, le leader de l’opposition, Domingos Simões Pereira, a cependant décidé de ne pas boycotter activement la campagne en concluant un accord de soutien avec le candidat indépendant Fernando Dias, afin de tenter de maintenir une présence symbolique dans le processus électoral.
Selon des observateurs, cette disqualification porte un sérieux coup à la crédibilité démocratique du processus électoral et prive l’électorat d’une opposition structurée et pourrait engendrer de futures abstentions des partisans du PAIGC, fragilisant ainsi la légitimité politique du prochain gouvernement.
Pour rappel, la Guinée-Bissau a été le théâtre d’une dizaine de coups d’État ou de tentatives de putsch depuis son indépendance en 1974. L’actuel président Umaro Sissoco Embaló, élu en 2019, a dû dissoudre le Parlement à la suite de plusieurs crises institutionnelles en 2022, avant d’organiser des législatives anticipées en 2023. La cohabitation qui a résulté de ce scrutin entre le parti du président et le PAIGC n’a été que de courte durée. Elle a ensuite éclaté et installé un climat politique extrêmement polarisé, engendrant à nouveau une dissolution du Parlement, le 4 décembre 2023.